Camion Cross à Lessay

Une journée complètement folle ! Du rallycross avec des camions, il faut le voir, pour le croire ! Quia vidisti me, Joest, credidisti...

Tout a commencé il y a des mois... Comme souvent, le samedi matin, j'avais pas mal de choses à faire... Et la flemme de les faire ! Donc je tuais le temps sur les réseaux sociaux : "Mouais, photoshop, déjà vu, je m'en fiche, photoshop, vulgaire..."
Puis, je tombais sur le tweet ci-dessous. Je bloquais sur l'Iveco Daily châssis-cabine en travers. Du "camion-cross" ? Kézaco ? Du rallycross avec des camions ? Ils mettent vraiment des vans en travers, sur piste ? J'avais alors un mélange d'incrédulité et de curiosité. Si ça existait vraiment, je VOULAIS voir un Iveco Daily en travers, de mes propres yeux !

Si j'étais si focalisé sur l'Iveco Daily, c'est parce que je venais d'en conduire un pour faire mon déménagement. Et à aucun moment, il ne me serait venu à l'idée d'aller sur circuit avec !


Le Camion Cross n'a rien de nouveau. Les premières courses apparurent en 1982. A l'époque, il s'agissait davantage de stock-car avec des camions. La première épreuve au sens moderne eu lieu en 1985, à Kerbras, sur un circuit de crosskart. En 1998, la FFSA reconnu la discipline et il y eu donc un championnat de France.
Plus de 40 ans d'histoire, mais personne n'en a jamais entendu parler. Il faut dire qu'à Lessay, pour la promotion de l'épreuve, ils avaient disposé DEUX affiches sur la D900, point. Mais une fois que l'on y va, on en devient accro !

De par ses origines Bretonnes, le Camion Cross reste encore aujourd'hui cantonné à la façade ouest (avec une sortie aux Pays Basque.) Le plus près de Paris, c'était donc Lessay, dans la Manche.

Les tribunes sont pleines. On était pourtant au beau milieu de nul part et ce n'est pas avec les deux affiches que l'on pouvait attirer des visiteurs ! C'est dire comment le bouche-à-oreille fonctionne bien dans le cross-camion.

Et à quelques mètres de l'entrée, un premier van préparé course. En l'occurrence le Renault Mascott de Gwendal Le Padellec (NDLA : sans trop m'avancer, je pense qu'il est Breton.) C'était assez étonnant de voir cet utilitaire transformé en voiture de course !

Et ce n'était qu'un début. Car sur le stand voisin, il y en avait un autre, puis encore un autre, etc. Pendant quelques minutes, je restait bouche bée. Chaque création était plus étonnante que la précédente.

Et donc, comme dans tous les paddocks, de tous les circuits, vous avez une allée centrale, avec des véhicules capot levé, des véhicules qui arrivent de la piste (ou qui en repartent.) Sauf que les dit-véhicules sont donc des vans et des camions ! Comme l'impressionnant Volvo (White) de Franck Rougier.

Pas de quartier VIP, pas de "accès réservé" ! Le public peut tout voir. Ici, Jonathan Besnard propose un tour du propriétaire de son fameux Iveco Daily. Celui qui était sur l'affiche...

L'ambiance y était... Rurale. 

Je pense d'ailleurs que la discrétion du Camion Cross est un peu volontaire. Ils ne veulent pas qu'une grosse équipe professionnelle ne débarque, gagne tout et finisse par dégouter les concurrents. Ils souhaitent également échapper à la gentrification. La plupart des rédacteurs auto seraient mal... J'imagine si "Sojasun" était là : "Dites, où est la prise pour brancher ma voiture ? Je n'ai presque plus de batterie. Il y a un menu végan ? Et puis vous ne pouvez pas enlever le poster, là, avec une femme nue ? C'est dégradant pour elle. En plus, votre affichage n'est pas inclusive : c'est concurrent-e-s. Et sinon... - Breum !"

Parmi les animations, il y avait une démonstration de camions radio-commandés. Pour une fois, les engins radio-commandés étaient plus sages que ceux en vrai !

La parade

En piste, la principale animation, c'est la parade. Il y en avait deux par jours, ainsi qu'une parade en ville, le samedi soir. Les camions sont ceux des transporteurs et chauffeurs locaux.

Le coin des anciens, avec un Citroën Type H pick-up, un Renault Goélette (avec cabine de Voltigeur) et un Scania L75.

Celui-ci a programmé le klaxon de son Daf XF de manière à jouer La Cucaracha, Sandstorm de Darude et Baby shark. Ça doit être génial d'être bloqué dans les embouteillages à côté de lui...

Les camions Américains. Difficile de faire plus évocateur qu'eux ! Là, on est transporté dans le far-west, avec ses grands espaces, ses autoroutes interminables et ses truck-stops cyclopéens...

Anthony Janiec

Avant de débuter la course, les pilotes se sont réunis pour un hommage à Anthony Janiec, au nom de la grande famille du camion.
Pilote de kart, il s'est lancé en F3 en 2002. Malheureusement pour lui, c'était l'époque où les championnats Allemand et Français fusionnaient pour créer l'Euro F3 ; il n'y avait plus de place pour les amateurs. Il du se contenter du championnat de France circuit, qu'il remporta en 2004 et 2008. Puis il bifurqua vers les camions. En 2014, il fut recruté par le Lion Truck Racing, l'écurie officielle MAN. Il remporta les championnat de France 2017, 2018 et 2019, avant de se consacrer au championnat Européen. En parallèle, il dirigeait une piste de karting à Albi.
Que s'est-il passé, le 31 juillet ? Une fin sans doute gênante pour le fer de lance du Lion Truck Racing. Le paddock a donc choisi de célébrer le pilote et d'oublier l'homme.

Camions Légers

Les courses débutèrent par la catégorie Camions Légers. Autrement dit, les vans. Moi qui souhaitait voir des Iveco Daily, il y en avait quatre durant la toute première course ! Prescilla Soudais et son Renault Mascott complétant la grille. Signalons d'ailleurs que quatre des vingt-quatre concurrents sont des concurrentes.

Un van, ce n'est pas fait pour la course ! Même dépouillé du superflu, on reste autour de 2 tonnes. Qui plus est, la répartition des masses est déplorable, avec un centre de gravité haut. Enfin, l'essentiel de la masse est sur le premier tiers du véhicule (voire le premier quart, pour ceux à cabine avancée.)
Bref, l'exact opposé d'une voiture de course traditionnelle, collée au sol, légère et avec un centre de gravité au milieu.

Justement, c'est cela qui crée du spectaculaire. Les pilotes doivent prendre les virages pied dedans (car regagner des kilomètres-heure prend du temps) et se bagarrer avec une monture rétive...

Les sorties de piste sont fréquentes. De quoi pimenter les courses. Et les véhicules ont tellement de couple, qu'ils se sortent eux-mêmes des bacs à sable !

Le principe, c'est celui du rallycross : départ en groupe de cinq, pour six tours de course. Chaque concurrent doit passer deux fois par le tour alternatif, un secteur sinueux et bosselé. Les meilleurs accèdent à la finale.

A 16 ans, Enzo Neel est le benjamin du plateau. Durant le tour joker, il a voulu rouler à fond. Total, son Renault Mascott s'est renversé sur le côté. Pas de bobo, mais un drapeau rouge, un retour à la ficelle et un égo froissé. C'est le métier qui rentre !

Et il n'y avait pas d'épicier à Lessay. C'était attaque à fond, jusqu'au damier.

Notez que les véhicules ont conservé leur klaxon deux-tons. De quoi permettre de célébrer durant le tour d'honneur !

Super Cross

C'est la catégorie-reine (et la catégorie historique.) Il s'agit de poids-lourd à deux essieux. Il y a plus de diversité qu'en Camion Légers (où Iveco Daily et Renault Mascott formaient les trois quart du plateau.)

Les spectacle montait d'un cran. Les camions n'hésitaient pas à sortir large au dernier virage, passant vraiment près des officiels...

A chaque accélération, les camions émettaient une fumée noire bien épaisse. Après le départ, ils laissaient carrément derrière eux un épais nuage noir...

J'étais le seul à tousser, ce qui faisait bien rire mes voisins. "Oh, le Parisien, avec ses petits poumons fragiles !"

Et pour la bagarre, pardon ! Les carrosseries du Scania P380 de Gaëtan Codom et du Renault Sherpa de Ludovic Skrypezyk peuvent en témoigner... Apparemment, Ludovic Skrypezyk avait également prévu de créer un brouillard artificiel. Le terme "enfumer un adversaire" prenait un autre sens...

En définitive, je n'ai pas regretté les 357km de trajet ! Je suis reparti avec un masque de sable, mais j'avais un sourire jusqu'aux oreilles.

C'est une discipline qui gagne à être connue et j'espère que les photos vous ont mis l'eau à la bouche...

Bonus

Lessay possédait sans doute l'un des plus beaux safety-car : une superbe Peugeot 504 pick-up Dangel.

Le Mack Série R de François Freret figurait sur l'affiche, mais il n'a pas pu rouler. Une vraie guigne pour le Team Freret, qui courrait à domicile : leurs locaux sont situés juste derrière les bosquets !

En 1979, Renault devint actionnaire de Mack. Le marché Américain des poids-lourd connaissait alors un trou d'air. La firme aux losange n'eu ensuite de cesse de monter au capital de Mack. Il y eu des tentatives de distribuer le Série R en France. On en vit quelques uns dans les films avec des scènes censées se passer aux Etats-Unis...

Mon Camion Léger préféré : un Renault Master 1 ! La carrosserie a un peu souffert. La preuve que les contacts sont fréquents...

On ne voit plus beaucoup de Nissan Almera Tino, alors quatre d'un coup... Elles portent les couleurs de Dessoude, dont la concession de Saint Lô n'est pas loin.

Commentaires

  1. Intéressant ! Qui aurait pu imaginer une "course de camions chez les ploucs" être un véritable spectacle et évènement sportif !

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