Essai Alfa Romeo Ondine


Dans les années 50, les pays d'Europe de l'ouest ont encore des empires ou à défaut, des zones d'influence où ils peuvent écouler leurs produits. Mais dès qu'ils mettent une roue dehors, ils sont surtaxés. La solution, c'est de produire sur place. Y compris chez des voisins comme l'Italie ou l'Espagne. Renault et Fiat sont les rois du genre. Suivant vos moyens techniques et financiers, ils vous proposent une palette de services. Depuis l'usine tournevis, jusqu'à l'assemblage complet. L'astuce, c'est que le partenaire local prend en charge presque tous les coûts. Le constructeur n'a rien à perdre et tout à gagner.
En Italie, Renault approche d'abord Innocenti. Puis il signe avec Alfa Romeo, dont l'usine de Milan manque d'activité, en 1958. L'accord porte sur des Dauphine et l'assemblage débute en 1960. L'Ondine, version luxueuse, la rejoint peu après. Entre les bisbilles entre Alfa Romeo et Renault et le lobbying de Fiat, qui veut un monopole sur les "popus", l'affaire est orageuse. Elle capote en 1964, alors qu'Alfa produit des R4 (!) et certains disent que la R8 fut d'abord un projet transalpin... Hasard du calendrier, cette même année 1964, Palmiro Togliatti, l'inamovible premier secrétaire du PC italien, meurt. Il allait donner son nom à une ville, dans cette URSS qu'il aimait tant, qui produirait des dérivés de Fiat 124...

Cette Alfa Romeo Ondine est donc une voiture confidentielle, fruit d'un accord éphémère. J'en ai vu une, une fois, à Rétromobile. Bref, le genre de voitures que j'adore. Quand j'ai vu sur Facebook qu'un négociant en vendait une, il FALLAIT que je la conduise ! Tant pis si je dois traverser toute la région parisienne, aux heures de pointe, un jour de canicule !

Le négociant en question, c'est F & F Collection. Il s'est spécialisé dans les italiennes. Ça fait bizarre de voir sur les ailes "Ondine Alfa Romeo" ou que l'huile recommandée soit Agip. Quant à la batterie Lucas (!), elle délivre du 12V. Ce qui est dommage, c'est que le logo n'est pas d'origine. Elle a un logo RNUR à la place de l'emblème Alfa. La particularité de cette voiture, c'est que bien qu'elle date de 1962, elle n'a eu qu'un propriétaire et qu'elle n'a jamais été restaurée. La peinture anthracite est d'origine.

Au début des années 50, Renault avait conscience que la clientèle de la 4cv souhaitait monter en gamme. La Dauphine était donc une "grosse 4cv" : plus de centimètres, plus de chevaux. Le constructeur songe un temps à l'appeler "5cv". Dans l'absolu, les 36ch, les 130 en pointe et le 0-100km/h en 30 secondes peuvent faire sourire (a fortiori chez Alfa.) Sans oublier l'habitabilité ridicule (les places arrières sont davantage dignes d'une 2+2.) Mais c'était tellement mieux que la 4cv...
L'Ondine est une Dauphine de luxe. Elle reçoit un volant de Floride, une boite à 4 rapports, des tapis de sol... Et c'est tout ! Autant dire que l'intérieur est très dépouillé... Heureusement, les Italiens sont plus généreux en cm² de tissus que les Français. Ils lui donnent également des freins à disque (les Italiens se plaignant du freinage.)
C'est parti vers un spot de photos. Dans ce village du 78, ce n'est pas ça qui manque... Je repense au gens qui descendaient la N7, la voiture surchargée et les gamins à l'arrière. Déjà que sur l'A6, dans la Polo (86C) de ma mère, ça semblait interminable, alors avec une voiture qui atteignait 130 en pointe... Mais c'est une Italienne. Donc les vacances devaient avoir une ambiance à la Fellini, avec mama à la poitrine généreuse et garçonnet qui pleure... Come prima/tu me donnes/Tant de joie/Que personne ne m'en donne... Encore que cette voiture appartenait à un prêtre. Donc ça devait davantage être du Don Camillo...

Retour à 2017. On opte finalement pour un champ. La voiture cale et elle refuse de démarrer (à mon avis, c'était un coup de chaud.) En plus, la boite est très imprécise et vous passez facilement un vitesse (essayez de pousser une voiture avec une vitesse...) Je convainc M. F&F de la pousser hors du champ, pour un démarrage sur la route. Elle s'élance, il fait demi-tour et il cale. Cette fois, c'est moi au volant et lui qui pousse. Et ce coup-ci, donc, c'est moi qui cale. Ah, ces anciennes, toujours aussi capricieuses... Après ça, on rentre : il est persuadé qu'il y a un "bruit", il est 20h et il en a marre de pousser (je le comprends.) Donc retour au bercail.

Ce fut un essai écourté. Mais ce que j'adore, avec les anciennes, c'est que c'est toujours une balade dans le temps. En plus, là, on part dans l'Italie de l'aube des années 60...

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