C'est la première grande vente de l'année d'Aguttes. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle est pléthorique !
Concessionnaire et collectionneur de Citroën, le Suisse José Dula a décidé de disperser ses autos. Il y a donc beaucoup de voitures chevronnées à l'Espace Champerret...
L'un des lots les plus prestigieux, c'est cette BX 4 TC jamais immatriculée.
1982 fut une année charnière pour Talbot. Les ventes atones et la grève de l'été scellèrent son sort. Jacques Calvet, nouvellement nommé de PDG de PSA organisa l'effacement progressif de la marque. Alors que les structures de Talbot étaient fondues dans Peugeot, des ingénieurs, eux, se recyclèrent chez Citroën.
Depuis la fin des années 50, la marque aux chevrons était présente en rallye. La Visa avait marqué un retour, après une brève pause. Via Talbot UK, Citroën approcha Lotus pour concevoir une Visa Groupe B. Inconduisible, elle fit long feu. Talbot UK effectua ensuite un baroud d'honneur avec l'Horizon Lotus. La nouvelle star de Citroën, c'était alors
la BX. Guy Verrier, alors patron de Citroën Sport, songea à une BX Groupe B. Ce sont des anciens de Talbot qui y greffèrent le 2,2l de la Tagora. D'où le nom BX 4 TC (4x4 Talbot-Chrysler.) Conçue en 1984, la BX 4 TC ne débuta qu'en 1986. Le chevron avait recruté le vétéran Jean-Claude Andruet et le pur-produit maison Philippe Wambergue. 1986 ne devait être qu'une mise en jambe, avec trois rallyes (Monte-Carlo, Suède et Acropole.) Ce fut un bide absolue : la voiture était fragile et lente. Jean-Claude Andruet parvint à accrocher une 6e place en Suède, mais Philippe Wambergue connu trois abandons. En 1987, les Groupe B étaient bannies. Les 200 voitures nécessaires à l'homologation étaient invendables. Guy Verrier fut dégagé peu après, au profit de Guy Fréquelin. Bientôt, ce fut l'épopée victorieuse des ZX rallye-raid. Bien plus tard, lorsque la Xsara débuta en WRC, tout le monde chez Citroën fit comme si c'était sa première voiture en championnat du monde.
La BX 4 TC fut sans doute l'une des moins mémorables (et des plus moches) voitures de l'ère Groupe B. 107 700€, tout de même. La Visa Mille Pistes, à l'arrière-plan, parti pour 60 020€.
Les
Pegaso sont très rares. Comme nombre de constructeurs de voitures de sport contemporains, la marque espagnole laissait une grande latitude à ses clients. Chaque modèle est donc plus ou moins unique.
Cette Z-102 avait été envoyée à Neuilly-sur-Seine, avec une autre. C'est là que Jacques Saoutchik les carrossa, en vue du salon de Paris 1953. Elles préfiguraient une (petite) série de voitures, dont quatre cabriolets. Jacques Saoutchik avait alors passé les commandes de la carrosserie éponyme à son fils Paul. Ce dernier abandonna avec bonheur le style "péniche" caractéristique de Saoutchik sur la période 35-50. Saoutchik junior avait recyclé les traits d'une carrosserie pour Delahaye 235. D'où ce style très français, assez étonnant, alors que les autres Pegaso singeaient d'ordinaire les productions Italiennes.
D'ordinaire, le problème avec les Pegaso, c'est d'en trouver une à vendre ! En 2020, Bonhams avait vendu 713 000€ une Z-102 avec une carrosserie ENASA "standard". ArtCurial attendait 500 000€ de cette Z-102 Saoutchik. Mais ce n'était sans doute pas le lieu pour un tel lieu et elle est repartie bredouille.
Je ne crois pas plus au hasard chez LFI, que chez Aguttes. L'un des visuels de la vente rappelait clairement celui de
la vente Baillon d'ArtCurial.
Acheter une voiture de collection, c'est vouloir un objet ayant eu une histoire. Avec les "sorties de grange", on touche à la caverne d'Ali Baba ! Alors lorsqu'ArtCurial dévoila la vingtaine de lots de la collection Baillon...
ArtCurial a forcément voulu recréer cette photo évocatrice...


Une Mercedes-Benz 190SL joue le rôle de la Maserati A6G. Et celui de la Ferrari 250 GT SWB California "ex-Alain Delon" est tenu par une plus modeste 330 GT 2+2.
Exposée au salon de Paris 1965, elle fut une "VD" de Franco-Britannic. Donald Sleator, patron du célèbre importateur, l'employa comme Pace Car aux 24 Heures du Mans 1966. Charles de Cortanze, directeur des 24 heures du Mans et célèbre pilote-préparateur (ainsi que père d'André de Cortanze) était dans le baquet de droite. Pour info, de 1960 à 1967, Donald Sleator mena la danse avec quatre 250 GTE, puis quatre 330 GT 2+2 différentes. Donc non, cette 330 GT 2+2 n'a pas rempilé aux 24 heures du Mans 1967. En revanche, elle passa de mains en mains, durant les dix premières années de sa vie. "Monsieur A" l'acheta en 1977 et il la garda une trentaine d'années. Il mourut au début des années 2000 et la 330 GTE passa une vingtaine d'années dans une remise.
Elle est parti à 200 676€, soit la moitié de la valeur de la 330 GTE ex-Chris Amon. Un Chris Amon qui avait remporté les 24 heures du Mans 1966 (sur Ford GT40), où cette 330 GTE avait officié !
Que serait Aguttes sans ses "reconstructions" d'anciennes ? Dans un recoin de la salle, cette Mercedes 28/95 1921 semble se cacher.
La 28/95 dérivait des 18/100 dites "Grand Prix de l'ACF 1914". Conçue juste avant les hostilités, la Mercedes était encore compétitive au début des années 20. Une 28/95 remporta ainsi la Targa Florio 1921. Pour 1922, la firme à l'étoile (pas encore mariée à Benz) aligna
l'inédite 6/40/65 dite "Targa Florio" (suite au succès de l'année précédente.) Les privés devant se contenter d'une version à compresseur de l'ancien modèle, la 28/95/135.
La voiture de la Porte de Champerret apparu en 2001. C'est un châssis de 28/95 avec des éléments d'une K et de la plus récente 24/100/140. La carrosserie était récente. Un collectionneur Suisse voulu la restaurer avec un style plus authentique.
Traditionnellement, les horreurs d'Aguttes restent à quai. Estimée 200 000€, cette 28/95 n'a pas fait exception.
Retour à la collection Dula. Le Citroëniste possédait bien sûr des DS, de quoi permettre à Aguttes de surfer sur
les 70 ans du modèles. La voiture gris Palladium est une DS21 Pallas de 1967, reconnaissable à ses longues portées. Elles sont d'autant plus rares que le modèle est apparut juste avant le restylage.
La Pallas était une version luxueuse de la DS. La plus connue étant
la DS23 Pallas à injection électronique, l'ultime évolution de la DS -faute de V6-. Auparavant, en 1966, il y avait eu une DS21 Pallas. Et j'avoue qu'aujourd'hui, j'ai découvert la DS19 Pallas. Ainsi, la finition fut lancée avant l'apparition du 2,1l.
La DS21 Pallas a été adjugée 73 132€. La DS19 Pallas, encore plus rare, mais sous-motorisée, n'est partie qu'à 42 920€.
Le nom "Pallas" ne fait pas référence à un palace, mais à une naïade Grecque. Pallas était la fille du dieu Triton, qui vivait dans le lac éponyme. Hérodote prétendait qu'il existait une mer intérieure en Afrique du Nord, le lac Triton. En 1874, François Elie Roudaire explora et cartographia les chott Melhrir (aujourd'hui en Tunisie) et el-Jérid (dans l'actuelle Algérie.) Il était persuadé qu'à l'antiquité, les deux lacs salés étaient contigüe et surtout, rempli d'eau. Formant ainsi le lac Triton d'Hérodote. Le géographe voulu lever des fonds pour ouvrir un canal depuis le golfe de Gabès et inonder les deux chotts. François Elie Roudaire retourna sur place en 1876 et 1878. Il découvrit alors que le chott Melhrir est situé au-dessus du niveau de la mer. Sa théorie tomba à l'eau (humour.)
Il n'existe pas de canon de la mythologie grecque. Suivant les régions, les divinités avaient différentes histoires. Dans la plupart des mythes, Athéna était la fille de Zeus (née d'un mal de tête !) et Triton l'aurait adopté. Mais d'autres légendes disaient qu'Athéna était la fille de Pallas. Voilà pourquoi le successeur de la DS Pallas fut la CX Athéna.
C'est dire tout de même le niveau culturel des années 60-70... On ne peut qu'être nostalgique. Récemment, je suis tombé sur un publi-reportage de CNews sur Philippe de Villiers. A un moment, l'homme politique récita Mon rêve familier de Paul Verlaine. Sonia Mabrouk avait l'air complètement soufflée. Alors que c'était un poème qu'on apprenait autrefois au collège et surtout, c'était complètement hors sujet par rapport au fil de son propos. A ce train-là, dans vingt ans, quiconque citera du Aya Nakamura passera pour un intellectuel !

La DS fut dévoilée en octobre 1955, au salon de Paris. Citroën était venu avec des carnets de commande. Néanmoins, la firme du quai de Javel s'était montrée optimiste. L'outil industriel de l'époque n'était pas du tout flexible. Il fallait quasiment remplacer toutes les machines-outils et ça ne se construisait pas du jour au lendemain. Sans oublier que la DS inaugurait des technologies (direction assistée, assistance au freinage, etc.) et les équipementiers n'avaient souvent pas les moyens de produire d'emblée en volume.
Aussi, au quai de Javel, seule la 15cv-Six H (qui inaugurait
les suspensions hydropneumatiques) avait été sacrifiée pour produire la nouvelle DS19. Les 11cv Normale,
Longue et Légère poursuivirent leur route jusqu'en 1957. La 11cv Légère venait d'ailleurs de recevoir une ultime évolution.
Avec tout cela, la production ne suivait pas la demande. Au Grand Palais, Citroën se vantait d'avoir enregistré 12 000 commandes. Mais seules 69 DS19 furent livrées en 1955, puis 10 859 en 1956 et 28 592 en 1957. En 1958, toutes les versions de la 11cv étaient abandonnées et la chaine tournait enfin à plein régime. Comme souvent, les flottes et les VD furent livrées en premier. Beaucoup de DS de la période 1955-1957 sont directement parti à la casse après utilisation.
Cette DS19 de 1957 possède une teinte jonquille avec sellerie Hélanca. Une livrée typique de l'époque, mais qui a mal vieillie (euphémisme.) Oui, mais comme les DS19 pré-1958 sont rares, le marteau est tombé à 47 552€.
Dans les années 60, il y eu explosion des compétitions tout-terrain. Sur deux et quatre roues. Puis il y eu scission. D'un côté, une envie de grands espaces, d'aventure humaine (NDLA : David Castera, pose ce feu de camp !) où le chrono serait secondaire. De l'autre, une course roues contre roues, sur des terrains défoncés, dans une ambiance bon enfant. La première aboutira au Paris-Dakar, en 1978. La seconde, à l'essor du motocross et du rallycross (avec le premier championnat de France, en 1977.)
Chez Citroën, Jacques Wolgensinger sentait que quelque chose se passait. Directeur de la communication, écrivain-voyageur et deuchiste, il avait mis en place
les raids 2cv.
En 1972, sur une ancienne carrière d'Argenton sur Creuse, les 2cv roulèrent durant 24 heures. L'évènement était a priori à l'initiative du Club 2cv d'Orléans. En 1973, retour à Argenton-sur-Creuse avec le Pop Cross. Cette fois-ci, Citroën était le sponsor officiel. Pour 1974, la firme aux chevrons mettait en place un championnat de France. Les voitures perdaient phares, intérieurs et portes arrière. Un unique baquet, ceinturé par un arceau occupait l'espace. Total et la BNP complétaient le tour de table.
José Dula possédait deux voitures. Il pilota lui-même la voiture zébrée, restée dans son jus. La peinture réalisée à la bombe et les tôles déformées témoignent de l'esprit ludique du 2cv Cross.
La voiture jaune a davantage été refaite.
Malgré une mise à prix de 3 000€, personne n'a voulu de ces deux voitures.
Chez José Dula, presque toutes les voitures sont assez rares. L'une de ces pièces, c'est une
Kégresse P17E de 1934.
Les autochenilles étaient assemblées à la main, à l'Atelier des Chenilles de Courbevoie. Elles étaient trop complexes et trop exclusives pour convaincre. Il n'y eu pas de Kégresse sur base "Rosalie" ou Traction Avant. La P17E était l'ultime évolution d'un modèle créé sur base C4 -autant dire une antiquité, en 1934-. A la faillite de Citroën, Michelin solda l'entité et ses quelques contrats publics à Unic. La firme de Puteaux profita alors du réarmement de la France.
La voiture du jour fut vendue à l'armée, en 1934. Les Kégresse furent en première ligne lors de la drôle de guerre. A l'armistice de 1940, l'armée nazie récupéra les survivantes et les expédia sur le front Russe - où il manquait cruellement de véhicules -. Les Soviétiques capturèrent des autochenilles, que l'on peut admirer dans les musées militaires. Celle-ci échappa miraculeusement à ces tourments de l'histoire. Elle a été repeinte dans un jaune sable évoquant les voitures de
la Croisière Jaune.
Elle est partie pour 29 076€. C'est le prix moyen. Après tout, cela reste un utilitaire de l'Entre-Deux Guerres : la demande est faible. Le souci, c'est que l'offre aussi, est faible ! C'est la première autochenille jamais vendue par Aguttes. ArtCurial vendit une P17B en 2006, lors de la liquidation d'un musée. Bonhams vendit une autochenille civile (mais peinte en kaki !) en 2009 et une P17E en 2023.
Personnellement, je rêverai d'en posséder une. Faute de mieux, je ferais peut-être une voiture façon Cloche Tibétaine : une C4, des chenilles de pelle chenillée, des marchepieds remplacés par des boites en contreplaqué et c'est marre !
Après les DS et les 2cv, voici les 203 ! Outre la Ferrari 330 GT 2+2 sus-citée, "monsieur A" possédait des Peugeot 203 très spéciales.
Certes, le 1,3l des 203 disposait d'une culasse hémisphérique, mais il ne développait que 44ch. De quoi emmener une 203 à 120 km/h en descente. Rien de très sportif, direz-vous. Oui, mais ce moteur acceptait le gonflage. Surtout, sur pressions de l'état Français, les premières nouveautés furent des petites cylindrées (4cv, Dyna X, 2cv...) La firme au lion dévoila des teasers avant la lettre au salon de Paris 1947. L'année suivante, la Sochalienne fut dévoilée en public et les commandes furent ouvertes. C'était la première nouvelle voiture de moyenne cylindrée de l'après-guerre. Entre les voitures lilliputiennes et les grosses cylindrées beaucoup trop confidentielles, la 203 était la seule à occuper le terrain. Un statut qu'elle conserva jusqu'en 1953, avec l'apparition de la Simca Aronde. D'où son engouement auprès des gentlemen-drivers, un peu incongru. D'autant plus que Peugeot haïssait la compétition.

Commençons par le "tank" Barbier de 1954. Son style rappelle
les DB contemporaines. Impression renforcée par cette robe bleue.
Le descriptif du catalogue était fantaisiste.
Eugène Barbier était fabricant de calèche. Son fils Paul reprit l'affaire. Menuisier de formation, il adapta le travail du bois à l'automobile. Paul Barbier s'essaya à la compétition dès les années 20, remportant le rallye d'Aix-les-Bains sur une Peugeot 172. Dans les années 30, il monta un concessionnaire Berliet. Il s'improvisa mécanicien durant l'Occupation et il prit un panneau Peugeot à la Libération.
Avec la 203, cet Isérois se lança vraiment dans le sport auto. Le rallye Lyon-Charbonnières, le Neige & Glace et les courses de côte. En 1950, il prépara un coupé 203, qu'il réalésa à 1500cm3 (5 ans avant Peugeot.) Paul Barbier avait conscience de ses limites comme préparateur. Pour sa seconde "spéciale", il se tourna vers Roger Tunesi, un carrossier et designer Isérois. Ainsi naquit un coupé à la carrosserie complètement inédite.
La voiture du jour est au moins la troisième. Toujours plus ambitieux, Paul Barbier voulait faire du circuit. Il disputa le Bol d'or 1956 avec cette barquette. Fait de gloire : des victoires aux courses de cote de Serrières et Gineste, face à Jean Guichet et sa Ferrari 2 litres.
Eugène Barbier rêvait de disputer les 24 heures du Mans 1957. André Chambas finança l'aventure. Châssis Nardi, moteur préparé chez Conrero, on est loin du coupé 203 de 1950 ! Malheureusement, le concessionnaire Peugeot ne la verra jamais finie. Au printemps 1956, il effectue une démonstration de la nouvelle 403 avec un client. Le rallyman roula un peu vite, la voiture sortie et Eugène Barbier mourut.
Le "tank" parti pour 119 620€, bien qu'il possédait la carte grise du coupé 203 "1500" de 1950 (qui existe toujours !)
Quittons l'Isère pour les Landes avec Jacques Calès, concessionnaire Peugeot à Dax !
Mes archives personnelles sont muettes sur cette voiture. Rien non plus du côté de Google. Il faudra donc croire Aguttes sur paroles !
En 1954, Jacques Calès se fit construire cette spéciale. Le châssis était tubulaire et le moteur avait été réalésé à 1500 cm3 (par Eugène Barbier ?) Le Landais avait fait le tour des préparateurs : carburateur Solex, admission Constantin et échappement Darl'Mat. La carrosserie avait été dessinée par Henri Rignault (inconnu au bataillon.) L'inspiration transalpine était évidente ; le rouge renforçant cela. C'était typique de l'époque (cf.
la Bouvot-Caron ou
la DKW-Lundgren.) On reconnait des optiques avant et arrière de 403.
La voiture fut restaurée dans les années 60.
Mise à prix 70 000€, la Calès n'a pas trouvé preneur.



Grand Prix de Suisse 1950. Lors de la vague de ravitaillement, Eugène Martin se retrouve 5e, derrière l'autre Talbot-Lago de Philippe Etancelin. Puis c'est la sortie de route. Le Francilien était projeté hors de sa voiture. Mais lors de cette envolée, sa jambe s'accrocha au volant et lorsque la voiture de Grand Prix bascula, le gros volant lui brisa le fémur.
Pendant deux années, Eugène Martin ne pouvait plus piloter. Alors il s'est souvenu qu'il était gadz'art. Il acheta une 203 et la transforma complètement. La voiture perdit ses portes arrières et elle reçut un top' chop'. Le moteur eu droit à une nouvelle culasse et elle disposait d'un double-corps.
Eugène Martin en construisit une seconde identique, puis une troisième, etc. Cette "Martin Spéciale" fut construite en 1953. Il y en eu cinq. J'ai tout de même l'impression que cette voiture est basée sur une
203 Coupé, sauf à croire qu'Eugène Martin ait complètement cassé le "dos rond". Après avoir tenté de ressusciter l'éphémère constructeur de F2 Jicey, Eugène Martin proposa son idée à Salmson. La 2300 S reprit nombre d'idées des Martin Spéciale. Hélas, le bureau d'étude de Salmson voyait d'un mauvais œil cet "intrus". La 2300 S arriva sans doute trop tard pour sauver le constructeur, mais les ingénieurs firent tout pour qu'elle ne réussisse pas.
Eugène Martin tenta un retour en Grand Prix avec Gordini. Mais il se blessa à Pau. Il fit ensuite brièvement parti de
la mésaventure DB Grand Prix. On retrouva sa trace aux 24 Heures du Mans 1958 (abandon avec une Maserati.) Lui qui était de tous les fronts, de toutes les aventures, disparut complètement des écrans de radar jusqu'à son décès en 2006.
Là aussi, pas de succès pour la Martin Spéciale.
Emile Darl'Mat eu un rôle central dans l'histoire de Peugeot. Il commandita les 402 et 601 Eclipse. Plus tard, sous l'impulsion de Charles de Cortanze, il fit engager des
402 très spéciales aux 24 heures du Mans.
Après guerre, il proposa des 203 métamorphosées. Surbaissées, avec un toit rabaissé et des chromes, puis un compresseur Constantin. Les premières 203 Darl'Mat arrivèrent en 1950, en même temps que le modèle de série. Le plus surprenant et qu'elles reprenaient les codes des hot-rods contemporains. Or, les hot-rods n'étaient alors qu'une mode embryonnaire de Los Angeles. Hot Rod Magazine n'était publié que depuis 1948. Le roman pour ados Hot Rod d'Henry Gregor Felsen, qui lança le phénomène commençait tout juste à être édité. Alors, est-ce un pur hasard ? Ou bien est-ce qu'Emile Darl'Mat était au courant des hot-rod ?
Darl'Mat en aurait construit 135 unités (dont deux était au
centenaire de Vauban.) Le chiffre inclus quelques coupés et cabriolets. Sachant qu'il y a eu des modèles avec ou sans compresseur, certain équipés de moteur de 403, d'autres avec des spads ou des arrêtes centrales sur la malle... Comme d'habitude, donc, chaque 203 Darl'Mat est un peu unique.
En plus, celle-ci à appartenu à Hervé Charbonneaux. Le fils d'André Charbonneaux fut un élément moteur du milieu français de l'ancienne des années 80-90. En 1989, il revendit la voiture à André de Cortanze, fils de Charles. Malgré ces deux anciens propriétaires prestigieux, cette belle 203 Darl'Mat fut boudée par les acheteurs.
Revenons à Citroën et à José Dula, avec cette MEP X27.
Maurice Emile Pezous était un ingénieur aéronautique Albigeois. A la libération, il devint concessionnaire PL, avec Fargo (appartenant alors à Chrysler.) Il passa aux VL avec Citroën, dans les années 50. Mais pas question d'être un simple vendeur de voitures !
En 1951, il construisit un coupé à châssis tubulaire, avec un moteur de 11cv. Notez qu'elle disposait de freins à disques maison. Maurice Emile Pezous dévoila sa "Daphné VII" en 1953. Maurice Emile Pezous se voyait artisan. Profitant du Grand Prix d'Albi pour convaincre des gentlemen-drivers, il produisit six autres MEP, dont un cabriolet. Citroën n'avait jamais montré le moindre intérêt et en 1956, les jours des 11cv étaient comptés. Ce fut la fin du premier chapitre.
Une dizaine d'années plus tard, il songea à une petite monoplace. Le premier championnat de France de F3 eu lieu en 1964. Il fallait un cran juste en-dessous, pour les pilotes débutants. La MEP X1 disposait d'un moteur d'
Ami 6. Maurice Trintignant joua les pilotes de développement. Il jugea le 602cm3 26ch trop juste pour une monoplace. Citroën venait d'absorber Panhard, alors Maurice Emile Pezous créa la MEP X2, équipée du bicylindre Tigre 50ch des PL24. Citroën et BP se montrèrent intéressés. En mars 1967, la MEP X2 fut dévoilée en grande pompe à l'ACF. Une première course eu lieu en marge du Grand Prix d'Albi 1967.
Un championnat de France, la Formule Bleue, démarra en 1968. Signalons que Total avait succédé à BP comme sponsor-titre. Entre temps, la FFSA avait également lancé la Formule France - sous le patronage de Renault -. Mais là où le châssis était libre en Formule France, il n'y avait que des MEP X2 en Formule Bleue. Le calendrier, très chargé, comportait 34 épreuves : 17 circuits et 17 courses de cotes. Alain Couderc, champion 1970, restera la principale révélation de la Formule Bleue. On le vit ensuite en F3, puis il fit parti de l'aventure WM.
Entre temps, Panhard avait disparu corps et bien. A court terme, le bicylindre Tigre était condamné. Citroën convolait alors avec NSU. Maurice Emile Pezous créa une MEP X7 autour du 1200 de la TTS. Mais mi-1968, Volkswagen absorbait NSU. De mémoire, il y eu également une MEP birotor (du Spider Wankel ou de la GS éponyme ?)
Finalement, il opta pour le 4 cylindres à plat 1,2l de la GS. La MEP X27 de 1972 fut l'apogée de la Formule Bleue avec 200 km/h en pointe. Hélas, en 1974, Peugeot prenait les commandes de Citroën. La Formule Bleue fut sacrifiée fin 1975, au nom de la réduction des coûts. Notez qu'il y eu une MEP à moteur V6 de SM (inachevée ?) Maurice Emile Pezous songea alors à une Daphné VII moderne. Il prit sa retraite en 1981 et décéda en 1990.
Aujourd'hui, le club MEP est
très actif dans les réunions d'anciennes. Cette MEP X27 pourrait rejoindre le peloton. Mais d'ici là, il faudrait enlever son pare-brise apocryphe et lui monter un vrai moteur de compétition. Elle a été vendue pour 16 000€.
Derrière la MEP, on devine une Pygmée F2.
Marius Dal Bo était un plombier-chauffagiste, venu d'Italie. Son fils Patrick était persuadé d'être un pilote. A la fin des années 50, on traitait les premiers châssis tubulaires de "tuyauterie". Maris Dal Bo se dit qu'en tant que plombier, les tubes, ça le connaissait ! Alors il allait construire une voiture de course pour son fils. Marius Dal Bo arriva à Monza, en 1960, avec des collègues. Il surnomma sa minuscule monoplace, la Pygmée. Son 1,1l Simca étouffait, suite à un défaut de préparation. La voiture serra. Quelques mois plus tard, Patrick Dal Bo la détruisit, alors qu'il la conduisait sur route.
En 1964, pour le premier championnat de France de F3, Marius Dal Bo acheta une Brabham à son fils. Faute de résultats, Dal Bo se décida à redevenir constructeur. Il embaucha un vrai chef-mécanicien, Sal Incandela. Dal Bo junior obtint une 2e place à Monza. Il avait surtout tendance à surconduire. En 1967, il connu une grave sortie de route.
En 1968, les sponsors commençaient à arriver. De nombreux pilotes valeureux voyaient leur carrière végéter, faute de contrat avec l'omniprésent Matra. Certains approchèrent Pygmée et l'équipe aligna ainsi plusieurs voitures. Eric Offenstadt fut l'un des premiers pilotes Pygmée hors du cercle familiale. L'année suivante, Pygmée voulu se lancer en F2, avec l'ex-motard et Dal Bo Junior. Le malentendu, c'est que Marius Dal Bo continuait de voir son équipe comme une structure familiale et quasi-amateur. Avec Eric Offenstadt, ça se termina aux mains. En 1970, Jean-Pierre Jabouille, Patrick Depailler et Jean-Pierre Beltoise (qui ne pouvait pas marquer de points, car "gradé" F1) rejoignirent Patrick Dal Bo. Notez qu'en parallèle, Jean Lachaud pilota une Pygmée F2 en course de cote.
Pour 1971, Pygmée fit concevoir sa MDB 16 F2 par le Suisse Jean-Louis Burgnard (futur créateur de Griffon.) La voiture était particulièrement soignée et la rumeur disait que Pygmée visait la F1 à l'horizon 1972. Patrick Dal Bo, Helmut Marko (!) et Jimmy Mieusset se relayèrent sur la voiture à vendre chez Aguttes. A Rouen, Jean-Pierre Beltoise termina 3e de la course 1 (il fut trahit par sa pompe à essence lors de la finale.) Signalons que Jimmy Mieusset fut champion de France de course de cote avec une Pygmée F2 de l'année précédente.
Pygmée avait sans doute vu trop grand en 1971. La F2 1972 n'était qu'une évolution de celle de 1971. Fâché avec les pilotes valeureux, les Dal Bo durent se rabattre sur Jean-Louis Lafosse. Les Brésiliens Carlos Pace et Lian Duarté louèrent des voitures. A Thruxton, Patrick Dal Bo termina 4e de la finale ; le plus beau résultat de Pygmée en F2. Marius Dal Bo rendit son tablier en fin de saison. Patrick Dal Bo joua les patrons, mais il confia l'engagement au Team Meubles Arnold. La MDB 18 de 1973 n'était qu'une MDB 17 (donc une MDB 16) avec une nouvelle carrosserie aussi moche qu'inefficace. Ce fut la fin de l'histoire.
Même si les voitures se ressemblaient, il s'agissait bien de châssis différents. Cette MDB 16 n'a donc disputé que le championnat de F2 1971. C'était donc la voiture de Patrick Dal Bo, Helmut Marko et Jimmy Mieusset, mais peinte aux couleurs de celle de Jean-Pierre Beltoise. Malgré un prix raisonnable, elle n'a pas convaincue les acheteurs.
Adler est un constructeur oublié. Il fabriquait en parallèle des voitures, des motos et des machine à écrire à Francfort. En 1932, il lança la très innovante Trumpf, une traction avant à carrosserie tout acier.
L'Amilcar Compound de 1936 s'en inspirait clairement. Peu après, Rosengart acquit une licence officielle et créa
la Supertraction.
Du côté de Francfort, Adler dériva une version "miniature" de la Trumpf, la Trumpf Junior. Elle était équipée d'un 1l 25ch. En 1935, la Trumpf Junior joua les sportives avec ce roadster Sport. Il conservait néanmoins le moteur d'origine.
Il n'y eu que 250 Trumpf Junior Sport. Datée de 1935, elle franchit le Rhin en 1946. Elle n'eu pas de succès, Porte de Champerret.
Donald Healey connu une vie longue et bien remplie !
Aviateur durant la Première Guerre Mondiale, il se découvrit une passion pour le rallye. Pilote triomphe, il reprit la structure compétition et engagea les voitures sous ses couleurs. Immédiatement après la Seconde Guerre Mondiale, il se lança comme artisan. Avec
l'Healey Silverstone (1949), les ventes décollèrent et la notoriété de Donald Healey cru. Néanmoins, son moteur Riley était un peu juste. Comme Allard, Donald Healey voulait un V8 Cadillac. Il embarqua pour les Etats-Unis, afin de supplier GM. Sur le transatlantique, il rencontra le PDG de Nash-Kelvinator.
Faute de contrat avec GM, Donald Healey se rabattit sur Nash. Le constructeur US y voyait un moyen de dépoussiérer son image. La Nash-Healey était grosso modo une Silverstone équipée du V8 3,8l Jetfire de Nash. Len Hodges, le designer maison, créa une carrosserie assez quelconque. Un prototype fut dévoilé au salon de Paris 1950 et la production suivit dans la foulée.
Très vite, Nash voulu revoir sa copie. Farina (pas encore "Pinin") fut chargé du travail. Il s'agissait notamment que les Nash-Healey ressemblent aux berlines "Airflyte". Le designer italien n'a pu s'empêcher de recycler les traits inauguré sur
la Cisitalia 202. Les Nash-Healey étaient des habitués des 24 heures du Mans. En 1950, Tony Rolt et Duncan Hamilton avaient frôlé le podium. Leslie Johnson et Tommy Wisdom décrochèrent le bronze en 1952. Farina créa un coupé Nash-Healey et il fut ainsi nommé Le Mans.
La ligne des Nash-Healey version Farina était tourmentée. Surtout par rapport à la pureté de la nouvelle
Chevrolet Corvette. L'un des défauts, c'était la chaine logistique. Nash expédiait des V8 en Grande-Bretagne. Healey les accouplait sur les châssis. Puis ils partaient pour l'Italie, où Farina leur apposait une carrosserie. De là, elles repartaient pour les USA. Nash-Kelvinator jouait la synergie. Les cargos quittaient les Etats-Unis avec des frigos Kelvinator, à destination de l'Europe et ils revenaient avec des Nash-Healey. Malgré tout, le coût logistique plombait les Nash-Healey. C'était également l'un des soucis des Chrysler Ghia Spécial ou plus tard, des Cadillac Brougham.
En parallèle, Donald Healey avait fait installer un moteur d'Austin A90 sur un châssis de Nash-Healey. Il fit carrosser l'ensemble par Tickford. L'Healey 100 débuta au salon de Londres 1952. BNC admira l'ensemble et accepta de fournir des moteurs. L'Austin-Healey 100 débuta ainsi en 1953. Ce fut un succès et elle captait l'essentiel des moyens de production d'Healey. Nash, lui, absorbait Hudson pour former Rambler. Le nom de Nash disparu en 1955. La Nash-Healey n'avait jamais été un carton et personne ne remarqua sa disparition. En 1956, Pininfarina créa la Rambler Palm Beach, une réflexion à voix haute sur un nouveau coupé sportif. Mais elle n'alla pas plus loin.
Voiture mal-aimée, cette Nash-Healey Le Mans de 1953 s'est tout de même vendue 60 020€.



Au début des années 20, le marché des utilitaires était balbutiant. On commençait tout juste à entrevoir ses possibilités d'utilisation. Le principal débouché, c'était la logistique du dernier kilomètre. Principalement venir chercher des marchandises dans les gares de triage ou les déposer chez son client. Vous trouvez que le métier de chauffeur-livreur est difficile ? Sachez que les quais de chargement,
les chariots-élevateur et autres transpalettes ne se diffusèrent que dans les années 50. Durant la Seconde Guerre Mondiale, les Américains avaient cherché à optimiser au maximum les opérations de stockage et de manutention. Auparavant, donc, il fallait hisser les marchandises sur le plateau. Il n'y avait ni palettes, ni film ; vous chargiez tout plus ou moins en vrac.
En tout cas, le marché des utilitaires était en pleine croissance. Citroën voulu sa part du gâteau. D'où
la C4 (bien connue des amateurs de Solido au 1/43e), puis la C6, capable de charger jusqu'à 2 tonnes.
Cette exemplaire appartenait bien sûr à José Dula. C'était un camion de pompier du canton de Vaud. Il le transforma en plateau, dans l'esprit de l'époque. Appréciez le plateau, en bois massif. 17 752€ sous le marteau d'Aguttes. A comparer aux 20 400€ de
la C6 d'Osenat, nettement moins respectueuse de la présentation d'origine.

José Dula possédait bien sûr des Traction Avant, notamment cette 7C de 1935. Les Traction Avant d'avant-guerre sont très rares. 90% des
Traction Avant que l'on croise sont des 11cv de la période 50-55. Dans les années 30, la nouvelle Citroën était loin de faire l'unanimité... Y compris chez le propriétaire, Michelin, qui tenta de pousser la plus traditionnelle
Rosalie.
Au salon de Paris 1934, Citroën dévoilait les Traction 7cv et 22cv.
Le développement de la 22cv s'éternisa et le budget, sans cesse dépassé. Michelin décida d'arrêter les frais. Les mulets à moteur Matford furent détruits. La voiture vue dans certaines concentrations n'est qu'une réplique.
La 7cv, elle, était déjà connue. Elle avait été présentée en avril 1934 et produite dans la foulée. André Citroën espérait encore pouvoir sauver son entreprise. Le 1,3l 32ch était jugé trop juste. Dès l'été 1934, elle évoluait en 7B à moteur 1,5l 35ch - et surtout, davantage de couple -. Conséquence : la "7cv" avait désormais 9 chevaux fiscaux ! Puis ce fut la 7C, avec son moteur 1,6l 34ch. Il existait également une 7S, équipée d'un 1,9l 46ch. Il s'agissait de la future 11cv, raccrochée un temps à 7, pour des raisons commerciales. En 1935, la gamme 11cv se déployait et désormais, c'était la 7C qui faisait figure d'émanation de la 11cv Légère.
La 7cv ne fut pas reconduite après-guerre. Notez au passage la robe bicolore, typique du Citroën des années 30. Les Michelin n'avaient pas encore imposé le noir comme teinte unique.
Malgré sa rareté, cette 7C n'a été adjugée qu'à 17 108€, alors que l'estimation haute était à 25 000€. Aguttes avait d'ailleurs vendu une 7B de 1934 à 24 700€, en 2019.
La Franche-Comté possède une tradition de la mécanique. Elle remonte au XVIIIe siècle, lorsque des horlogers suisse s'installèrent à Besançon. L'hiver, les paysans de la région fabriquaient des montres et des horloges, afin d'avoir un complément de revenu. La région prit naturellement le virage de la révolution industrielle. En 1856, Charles Millot racheta une fonderie de Gray. En 1892, ses deux fils commencèrent à fabriquer des moteurs à explosion. Ils tentèrent même de construire des voitures.
Le véhicule exposé porte de Champerret n'est pas une voiture, mais une auto-scie. A savoir un moteur destiné à faire fonctionner une scie à ruban. Elle est datée d'à peu près 1900. A l'heure où l'agriculture se mécanisait, Millot proposait des moteurs pour faire fonctionner des batteuses, faucheuses, etc. Pour les déplacer de la ferme au champ, ces véhicules utilisaient leur moteur comme mode de propulsion.
Vendu pour 5 188€.
Une Citroën qui n'appartenait pas à José Dula !
Au lendemain de la guerre, la capitaine Castor récupéra la 11 BL 1937 de sa belle-mère. Puis il fut affecté à Ravensbourg.
A l'époque, les Français occupaient le sud-ouest de l'Allemagne. A Ravensbourg, l'état-major avait réquisitionné le domicile de Josef Eiwanger. Ce dernier possédait la carrosserie Spohn, du nom de son défunt associé, Hermann Spohn. Spohn était l'un des carrossiers attitrés de Maybach, dont le fief de Friedrichshafen était voisin de Ravensbourg. Désormais, le carrossier devait maintenir les véhicules militaires de l'état-major.
Le capitaine Castor confia sa Citroën à Spohn. Le résultat, très Américanisant, rappelle les réalisations contemporaines de LM, Emile Tonneline ou A. Marchand. La Traction Avant étant une monocoque, impossible de toucher à la cellule centrale. Les carrossiers devaient se contenter de remplacer les ailes et la calandre. Celle de Spohn était en plus découvrable.
En 1947, le Centre de Réparation Auto Sud (CRAS) de l'armée Française déménageait à Friedrichshafen. Spohn put reprendre ses activités de carrossiers. Le jeune designer Louis Lepoix, basé au CRAS, lui fit réaliser le prototype de la Bugatti 101 (alias Type 100), d'après ses plans. Puis ce furent les Américains qui demandèrent les services de Spohn. Ravensbourg étant proche du secteur Américain. Les créations s'inspiraient des dream-car du Motorama. L'une des plus célèbres étant une Buick 1947 à l'avant calqué sur celui de la Le Sabre et baptisée d'un douteux "Revenge of the Third Reich". En 1955, "Joe" Eiwanger accepta un post d'encadrement chez Mercedes-Benz et il ferma Spohn.
Cette Traction 11 BL Spohn est une voiture connue. On l'aperçoit dans le Traction Avant d'Olivier de Serres (2010), ainsi qu'à l'Epoq'Auto 2019. Force est de constater que cela fait longtemps qu'elle a été laissée à l'abandon. Le précédent propriétaire s'était attaqué au moteur, mais il a visiblement baissé les bras face à la charge - et au coût - du travail.
Cet état de fatigue avancé, c'est sans doute ce qui a rebuté les acheteurs, de manière éliminatoire.
Pour finir, une Alpine A110. Face aux innombrables voitures boursoufflées "façon Groupe 4", l'A110 1100 offre une ligne plus menue, plus pure. A côté du feu arrière droit, on note un discret "FASA".
L'Espagne Franquiste était sous embargo. En représailles, elle surtaxa les importations. Plusieurs constructeurs Européens ouvrirent des chaines d'assemblage en Espagne. En 1951, Renault créa ainsi une joint-venture baptisée FASA (Fabricación de Automóviles Sociedad Anónima.) A l'origine, FASA assemblait des 4cv. Puis il y eu des Dauphine, des R8, etc. Renault acquis l'image de "constructeur Espagnol". Jean Rédélé avait la fibre commerciale. Contrairement à DB ou Matra, il chercha à développer significativement Alpine hors de l'hexagone. Et Renault lui servait de tremplin.
Puisque FASA construisait la R8 -y compris en version Gordini-, dont l'A110 reprenait nombre d'éléments, il passa un accord les Espagnols. La production d'A110 1100 débuta en 1966, alors que la 1300 était déjà apparue. FASA conservait une certaine autonomie vis-à-vis de Boulogne-Billancourt. Ainsi, les R8 Gordini Espagnole avait des tambours à l'arrière. Et ce fut donc le cas des A110. En France, l'A110 1100 disparut en 1968, alors que la berlinette montait en gamme. Mais de l'autre côté des Pyrénées, elle se maintint quelques temps. Ainsi, la voiture d'Aguttes était datée de 1971. Notez qu'en Espagne, l'A110 poursuivit sa carrière jusqu'en 1978, deux ans après la France.
L'A310 ne franchit pas les Pyrénées. Franco mort, l'ostracisation de l'Espagne s'estompa. Renault prit le contrôle total de FASA et il en fit une usine de production.
Les A110 n'ont jamais vraiment connu de purgatoire. Dieppe en avait arrêté la production non pas faute de demande, mais pour ne pas gêner l'A310 ! La côte a toujours été élevée. Au moment de la renaissance d'Alpine, les prix se sont envolés. Il n'était pas rare de voir des exemplaires adjugés 100 000€, voire 200 000€ pour les anciennes voitures de compétition. Les maisons ont usé et abusé du filon. Les A310 et V6 GT étant écoulées à des prix délirants, y compris des exemplaires pas vraiment d'origine. Pour autant, même au plus fort de la vague, l'engouement concernait les 1300 et 1600. Les 1100 étaient nettement en retrait.
Aujourd'hui, le soufflet semble un peu retombé. Alors on jette le bébé avec l'eau du bain et cette A110 FASA de rester à quai.
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