Le sport automobile du futur, entre virtuel et réel
L'excentrique marquis Jules-Albert de Dion s'était passionné pour les machines à vapeur. Un jour de 1881, ses pas le menèrent passage Léon, à Paris. Il s'arrêta devant une locomotive à vapeur (fonctionnelle) pour enfant. C'était l'un des "jouets scientifiques" de Georges Bouton et Charles Trépardoux. De Dion proposa aux deux beaux-frères d'en construire une seconde. Ou même mieux : d'en créer un vraie !
Ainsi naquis le constructeur De Dion, Bouton et Trépardoux. En 1883, ils construisirent une première voiture à vapeur. Puis il y eu le "tracteur à vapeur" La Marquise. En 1887, le magazine Le Vélocipède Illustré organisait une course : aller du Pont de Neuilly au bois de Boulogne. La Marquise fut l'unique concurrent. En 1889, De Dion, Bouton et Trépardoux lança la production de ses tricycles à vapeur.
Le constructeur était au départ du Paris-Rouen 1894, toute première vraie course. De Dion avait fait atteler un calèche à son tricycle. Il était assis, tandis qu'un chauffeur anonyme conduisait (et qu'un trosième homme surveillait la chaudière.) Ils arrivèrent premier, mais furent disqualifiés. De rage, le marquis organisa sa propre course, le Paris-Bordeaux-Paris, en 1895. Puis il fonda l'Automobile Club de France, dans la foulée et créa le salon de l'auto de Paris.
Entre temps, conscient de la fin de la vapeur, de Dion fit étudier un tricycle à essence. Trépardoux, partisan de la vapeur, démissionna. L'entreprise devint De Dion-Bouton et le train arrière conçu peu avant par Trépardoux, un pont De Dion !
En 1900, De Dion-Bouton passa aux quatre roues avec cette vis-à-vis. Les passagers faisaient face au conducteur (assis plus haut.)
C'était l'époque où l'automobile se cherchait, techniquement, esthétiquement et industriellement. Panhard avait imposé le moteur avant. Mais ce n'est qu'en 1902, avec la Mercedes Simplex, que les automobiles adoptèrent une silhouette plus classique.
C'était aussi l'apogée de De Dion-Bouton, premier constructeur mondial. La chaine de montage restait à inventer et à la place, des dizaines d'ouvriers assemblaient les voitures sur des îlots. Faute de modèle industriel, la tentative de filiale Américaine fut un flop.
Aussi, le marquis de Dion, anti-dreyfusard acharné, se passionna pour la politique. Fâché avec le journal Le Vélo, proche des dreyfusards, il commandita L'auto (ancêtre de L'équipe), qui se fit connaitre avec le Tour de France. Élu député en 1902, il devint sénateur en 1923. Apparenté à l'extrême-droite, il s'abstint, lors du vote de confiance de Pétain. Et à 85 ans, il appela à la résistance, avant de démissionner. Il mourut en 1846, à 90 ans.
Tout ceci se fit au détriment de De Dion-Bouton. Quinquagénaire en 1900, Georges Bouton ne put tenir le constructeur. Louis Renault, ancien propriétaire de De Dion-Bouton, était le nouveau meneur. Puis Henry Ford émergeait... Le constructeur était présent au Paris-Pékin de 1907 et au New York-Paris de 1908. Sans succès. De Dion-Bouton inventa le V8, en 1910, mais ça ne lui évita pas la marginalisation. La marque disparue dans l'anonymat, en 1932.
L'autre objet exposé, c'est un simulateur des Gran Turismo World Series 2023 ! Et pour cause : l'exposition est sponsorisée par Gran Turismo 7.
Je n'ai trouvé aucun chiffre de vente récent de Gran Turismo 7. Ça n'a tout de même pas l'air d'être folichon. La preuve, c'est que la dernière "Vision" remonte à février dernier et elle était signée Italdesign. Alors qu'au temps de Gran Turismo 6, c'était la bousculade... D'ailleurs, les mises à jour ne sont guère excitantes : Corolla GR Morizo, Super Formula, Toyota Alphard (?), 911 Carrera RS... Et beaucoup, beaucoup d'annonces de correction de bugs. Et si Polyphony doit communiquer dessus, on peut en déduire qu'il y a BEAUCOUP de bugs. On parle quand même d'un jeu sorti avec 18 mois de retard ! D'ailleurs, pour les Motosport Games 2022, la FIA avait préféré adouber Assetto Corsa Competizione. Rompant au passage un juteux contrat de partenariat avec Sony. Pour 2023, tout rentrera dans l'ordre, mais le mal est fait.
Globalement, le marché des jeux vidéo avait explosé en 2020 et 2021. Durant le covid, les gens étaient restés chez eux. Alors que l'industrie comptait dépasser les 200 milliards d'euros en 2022, elle s'est prise un -9%. Je n'ai pas trouvé de chiffres fiables sur 2023.
Il faut débourser 449€ pour une PS5 et 75€ pour Gran Turismo 7. Et encore, les prix ont baissé ! L'industrie du jeu vidéo n'a t-elle pas trop tirée sur la corde ? Il y a eu les pré-commandes quasi-obligatoires. Tout ça souvent pour un jeu bâclé, sans rapport avec ce qui en avait été montré au CES. Puis le pay-to-win... Et encore, les "loot boxes" n'étaient pas forcément utiles (donc, il fallait en racheter d'autres.) Il y avait aussi la tendance "woke" avec ses héroïnes moches et ses scenarii "progressistes". Et globalement, la tendance à la surconsommation, avec un nouveau jeu "incontournable", tous les mois. Le Gamergate a aussi révélé les liens incestueux entre éditeurs et médias spécialisés... Ainsi que l'intransigeance des gamers radicaux, prompts à trainer tout le monde dans la boue. Avec au milieu, des joueurs lambda, qui veulent juste s'amuser et ne se retrouvent dans aucun camp.
Est-ce la fin de l'hégémonie du jeu vidéo ?
Faute de pouvoir utiliser ce simulateur, vous pouviez jouer avec cette borne Gran Turismo 7.
En fait, tout ceci est dans le cadre de la promotion du film Gran Turismo. Film vaguement inspiré par la carrière de Jann Mardenborough.
Vers 2005, Sony Playstation voulait mettre le paquet sur Gran Turismo. Il sponsorisa Sébastien Loeb en WRC, au Mans et il discuta même de F1 avec Toro Rosso ! Darren Cox, de Nissan Motorsport, n'y resta pas insensible. Après un premier concours avec un tour de manège en 350Z à gagner, Nissan Motorsport et Sony Playstation mirent en place la Gran Turismo Academy. Le premier vainqueur, en 2008, fut Lucas Ordòñez. Âgé de 24 ans, il était un peu vieux pour faire carrière, puis il fut éclipsé par Jann Mardenborough. Il fit tout de même une saison de F3 Japonaise (3 podiums) et plus tard, on le vit chez Bentley. Lauréat 2010, Jordan Tresson eu apparemment des rapports compliqués avec Nissan Motorsport. Ensuite, on le vit régulièrement aux 24 heures du Nürburgring. Signalons que Nicolas Hammann, vainqueur 2014, fit quelques apparitions en Nascar. Deux anciens finalistes, Abhinay Bikkani et Thanaroj Thanasitnitikate, se retrouvèrent dans la Coupe Nissan Micra Canada 2015. Respectivement 4e et 2e, ce fut a priori leurs seuls compétition pro.
Mais il y eu surtout Jann Mardenborough, vainqueur 2011... Comme les autres "Jann tha Mann" débuta aux 24 heures de Dubaï. En 2012, Nissan Motorsport le plaça en British GT, avec des sorties en Blancpain. Visiblement, Darren Cox l'aimait bien. Au point de lui financer un budget pour la monoplace ! On le vit en Toyota Racing Series, puis dans un British F3 en pleine déconfiture (1 podium.) Son résultat le plus significatif fut une 7e place en F3 Européenne. Il démarra 2014 avec la Toyota Racing Series où il joua le titre jusqu'au bout, obtenant ses trois premiers succès en solo. Il passa au GP3 et s'imposa (en grille inversée à Hockenheim.) Incontestablement, c'était la révélation Britannique de 2014. Les médias se passionnaient pour ce fils d'un footballeur méconnu, très charismatique. En tant que métisse Britannique, difficile de ne pas le comparer à Lewis Hamilton... Red Bull lui offrait ses infrastructures. Jann tha Mann avait alors 23 ans ; ce n'était pas trop tard pour la monoplace... Hélas, en 2015, il fut incapable de confirmer en GP3 et ses sorties en F2 furent anonymes. Il payait sans doute ses débuts en course trop tardifs. En 2016, il prit la F3 Japonaise de Lucas Ordòñez. Leader du classement, il dût s'incliner face à Kenta Yamashita, auteur d'un triplé lors de la finale. Là encore, Mardenborough avait atteint son plafond de verre et en 2017, il fit une saison très moyenne en Super Formula. Entre temps, Nissan Motorsport s'était ridiculisé avec son clone de Deltawing, en 2014 et le bide de la Nissan GT-R WEC. Sony Playstation avait également réduit la voilure. Le pilote Britannique était presque livré à lui-même. Il tenta un comeback Européen avec la Formule E. Mais ses tests avec Nissan eDAMS furent décevants. Que l'équipe lui ait préféré Sacha Fenestraz, pour 2023, est un aveux d'échec.
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