Vacances méridionales : 4. La prospection du pétrole Algérien dans le Vaucluse !
L'ami avec qui j'étais n'avait pas mis à jour son GPS. Ce fut particulièrement problématique lors du retour du mont Ventoux. Or, apparemment, ces dernières années, les villages du Vaucluse se sont couverts de rond-points ! Mais ne vous inquiétez pas, R-Link connaissait un itinéraire bis pour revenir dans le droit chemin (au sens propre du terme.) Au moins, ça a permit de visiter les chemins vicinaux...
C'est dans un de ces chemins que j'ai vu, au loin, une Jeep aux voies étroites. "Tiens, une Dallas !" Dans la région, j'avais croisé pas mal de Mehari et de Moke, alors pourquoi pas une Dallas ? Sauf qu'en s'approchant, c'était plutôt une Willys Jeep CJ3B... Plutôt rare par chez nous. Puis je pu distinguer, sur la calandre "Hotchkiss-Willys". Là, ça méritait un arrêt et des photos !
Pendant la Deuxième Guerre Mondiale, Henry J. Ainsworth, qui dirigeait Hotchkiss, s'installa aux Etats-Unis. Il y rencontra Marcel Müller, attaché de l'ambassade de France. Müller épousa la secrétaire d'Ainsworth, puis après la guerre, devint responsable de Willys-Overland. De quoi créer des liens solides entre les deux hommes...
A la libération, la France négocia l'achat de 8 000 Willys Jeep MB auprès de l'armée US. Elle en récupéra 10 000, que les GIs avaient abandonné en Europe.
Delahaye collabora avec Willys. Puis il développa son propre tout-terrain militaire, le VLR. Ce fût un cauchemar pour l'armée française. Couteux et inaboutis, les VLR tombaient souvent en panne. Delahaye en fit une version 2.0, puis 3.0, avant qu'on ne lui dise stop.
Pendant ce temps, comme le déploiement des VLR s'éternisait, les Willys reprirent du service. Grâce aux liens avec Hotchkiss, le constructeur obtint les droits exclusifs d'en fabriquer des pièces détachées.
En 1955, après l'échec définitif du VLR, l'armée demanda à Hotchkiss de lui fabriquer des Willys. Le constructeur Français avait les plans et le savoir-faire. Il se contenta de demander un outillage pour plier des toles aux Américains.
Du coup, il arrêta de produire des voitures (la Grégoire, moderne mais chère ayant achevé sa ruine) pour se focaliser sur ces Jeep.
Entre temps, Willys avait arrêté la MB, au profit de la M606 et sa version civile, la CJ3B. C'est donc un outillage de M606/CJ3B que Willys reçu. Cette version possédait un moteur "Hurricane", plus puissant et plus imposant (d'où le capot haut.)
Néanmoins, à travers les pièces détachées, Hotchkiss avait produit les bon-vieux "Go-Devil". Comme le constructeur était avare, il ne demanda pas l'outillage de l'Hurricane. Du coup, les premières Hotchkiss-Willys étaient équipées du poussif Go-Devil !
Hotchkiss produisit des Jeep pendant une quinzaine d'années. Ce fut notamment le véhicule fétiche du Tour de France. En 1966, Thomson racheta la marque. Cette même année, le contrat de l'armée s'arrêtait : l'armée misait sur le programme paneuropéen Europa-Jeep. Lorsque ce programme se cassa la figure, Thomson liquida Hotchkiss.
Les Jeep, elles, restèrent longtemps en service. Au-delà du look "D-day", c'était une punition pour les militaires : trop lent et trop archaïque. L'arrivée du Peugeot P4 fut une délivrance...
Pendant que je prenais mes photos, le propriétaire est arrivé. Très gentil, il m'a expliqué l'historique de sa voiture.
Il s'agit d'une JH-101 civile, qui servit à la prospection pétrolière, dans le Sahara Algérien.
On se doutait que sous le sable Algérien, il existait du pétrole et du gaz. En 1946, la SN Repal effectua les premiers vrais travaux de prospection, sans succès notable.
En 1954, Shell découvrit du pétrole dans le Grand Erg Occidental. Enfin un champ digne de ce nom ! A Paris, on imaginait déjà des flots de pétro-dollars. Au point que le nouveau paradigme de l'Elysée, c'était de garder coute que coute l'Algérie ! Ce fut la ruée sur le désert. Berliet tenta de fourguer son T100 et Citroën créa la 2cv Sahara.
Parmi les compagnies qui passèrent le désert au tamis, la CREPS (Compagnie de Recherche et d'Exploitation du Pétrole au Sahara) fut la plus active. Le père du propriétaire de l'Hotchkiss-Willys fut ainsi expédié en Algérie. Au préalable, la voiture fut repeinte : le vert d'origine était trop "militaire". En 1957, une unité de l'ALN avait pris à parti les Jeep de prospecteurs, les prenant peut-être pour une colonne de l'armée. D'où ce vert plus sombre.
Le pétrole algérien fut un mirage. En 1956, compte tenu du nombre de prospecteurs fraichement débarqués, nombre de puits furent découverts. Mais la plupart étaient secs. Il fallu attendre 1967 pour enfin tomber sur un gisement viable.
Ce manque de perspectives économiques fut sans doute l'une des raisons du revirement du général de Gaulle, qui signa les accords d'Evian.
Après avoir joué à Tintin au pays de l'or noir, nos prospecteurs du CREPS rentrèrent en France. L'un d'eux garda l'Hotchkiss-Willys. Son fils en hérita. Il conserva la peinture verte "civile", avec son aspect hâtif.
C'est dans un de ces chemins que j'ai vu, au loin, une Jeep aux voies étroites. "Tiens, une Dallas !" Dans la région, j'avais croisé pas mal de Mehari et de Moke, alors pourquoi pas une Dallas ? Sauf qu'en s'approchant, c'était plutôt une Willys Jeep CJ3B... Plutôt rare par chez nous. Puis je pu distinguer, sur la calandre "Hotchkiss-Willys". Là, ça méritait un arrêt et des photos !
Pendant la Deuxième Guerre Mondiale, Henry J. Ainsworth, qui dirigeait Hotchkiss, s'installa aux Etats-Unis. Il y rencontra Marcel Müller, attaché de l'ambassade de France. Müller épousa la secrétaire d'Ainsworth, puis après la guerre, devint responsable de Willys-Overland. De quoi créer des liens solides entre les deux hommes...
A la libération, la France négocia l'achat de 8 000 Willys Jeep MB auprès de l'armée US. Elle en récupéra 10 000, que les GIs avaient abandonné en Europe.
Delahaye collabora avec Willys. Puis il développa son propre tout-terrain militaire, le VLR. Ce fût un cauchemar pour l'armée française. Couteux et inaboutis, les VLR tombaient souvent en panne. Delahaye en fit une version 2.0, puis 3.0, avant qu'on ne lui dise stop.
Pendant ce temps, comme le déploiement des VLR s'éternisait, les Willys reprirent du service. Grâce aux liens avec Hotchkiss, le constructeur obtint les droits exclusifs d'en fabriquer des pièces détachées.
En 1955, après l'échec définitif du VLR, l'armée demanda à Hotchkiss de lui fabriquer des Willys. Le constructeur Français avait les plans et le savoir-faire. Il se contenta de demander un outillage pour plier des toles aux Américains.
Du coup, il arrêta de produire des voitures (la Grégoire, moderne mais chère ayant achevé sa ruine) pour se focaliser sur ces Jeep.
Entre temps, Willys avait arrêté la MB, au profit de la M606 et sa version civile, la CJ3B. C'est donc un outillage de M606/CJ3B que Willys reçu. Cette version possédait un moteur "Hurricane", plus puissant et plus imposant (d'où le capot haut.)
Néanmoins, à travers les pièces détachées, Hotchkiss avait produit les bon-vieux "Go-Devil". Comme le constructeur était avare, il ne demanda pas l'outillage de l'Hurricane. Du coup, les premières Hotchkiss-Willys étaient équipées du poussif Go-Devil !
Hotchkiss produisit des Jeep pendant une quinzaine d'années. Ce fut notamment le véhicule fétiche du Tour de France. En 1966, Thomson racheta la marque. Cette même année, le contrat de l'armée s'arrêtait : l'armée misait sur le programme paneuropéen Europa-Jeep. Lorsque ce programme se cassa la figure, Thomson liquida Hotchkiss.
Les Jeep, elles, restèrent longtemps en service. Au-delà du look "D-day", c'était une punition pour les militaires : trop lent et trop archaïque. L'arrivée du Peugeot P4 fut une délivrance...
Pendant que je prenais mes photos, le propriétaire est arrivé. Très gentil, il m'a expliqué l'historique de sa voiture.
Il s'agit d'une JH-101 civile, qui servit à la prospection pétrolière, dans le Sahara Algérien.
On se doutait que sous le sable Algérien, il existait du pétrole et du gaz. En 1946, la SN Repal effectua les premiers vrais travaux de prospection, sans succès notable.
En 1954, Shell découvrit du pétrole dans le Grand Erg Occidental. Enfin un champ digne de ce nom ! A Paris, on imaginait déjà des flots de pétro-dollars. Au point que le nouveau paradigme de l'Elysée, c'était de garder coute que coute l'Algérie ! Ce fut la ruée sur le désert. Berliet tenta de fourguer son T100 et Citroën créa la 2cv Sahara.
Parmi les compagnies qui passèrent le désert au tamis, la CREPS (Compagnie de Recherche et d'Exploitation du Pétrole au Sahara) fut la plus active. Le père du propriétaire de l'Hotchkiss-Willys fut ainsi expédié en Algérie. Au préalable, la voiture fut repeinte : le vert d'origine était trop "militaire". En 1957, une unité de l'ALN avait pris à parti les Jeep de prospecteurs, les prenant peut-être pour une colonne de l'armée. D'où ce vert plus sombre.
Le pétrole algérien fut un mirage. En 1956, compte tenu du nombre de prospecteurs fraichement débarqués, nombre de puits furent découverts. Mais la plupart étaient secs. Il fallu attendre 1967 pour enfin tomber sur un gisement viable.
Ce manque de perspectives économiques fut sans doute l'une des raisons du revirement du général de Gaulle, qui signa les accords d'Evian.
Après avoir joué à Tintin au pays de l'or noir, nos prospecteurs du CREPS rentrèrent en France. L'un d'eux garda l'Hotchkiss-Willys. Son fils en hérita. Il conserva la peinture verte "civile", avec son aspect hâtif.
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