Carros nacionais : Gurgel BR 800 1989

Encore un véhicule extrait de la collection Carros Nacionais ! En l'occurrence, une très obscure -donc très intéressante- Gurgel BR 800 de 1989. Les Gurgel miniatures étant très rares, y compris au Brésil. Celle-ci reproduit assez bien l'aspect patchwork de l'original, sans oublier les jantes et les graphique latéraux, typique des 80s...

L'attrait de cette collection Carros Nacionais réside dans son exotisme et sa rareté. Des miniatures à peu près au 1/40e, reproduisant la production Brésilienne, des années 50 aux années 90. C'est à dire des modèles souvent spécifiques, inconnus par chez nous.

La Gurgel BR 800 est la douzième sur laquelle j'ai mis la main. Soit la moitié de la série. La seconde moitié semble épuisée (y compris le Fiat Doblo !) Mais déjà, la dernière fois, je pensais que c'était la fin. Alors qui sait, peut-être qu'à l'avenir, je pourrais mettre la main sur un ou deux autres modèles...

En 1953, le président Getùlio Vargas décida de surtaxer toutes les voitures importées. Un certain nombre d'ateliers d'assemblage fleurirent ainsi au Brésil. 

Au fil des ans, la production cru. Le pays se dota alors d'une véritable industrie automobile. Les "usines tournevis" laissèrent place à de vraies sites de production. Des équipementiers s'installèrent et il y eu ainsi davantage d'éléments produits sur place. Certains constructeurs ouvrirent des bureaux d'études. Des designers et ingénieurs indépendants, comme Genaro Malzoni, émergèrent et proposèrent leurs services. Ainsi, les voitures Brésiliennes furent davantage adaptées au marché local.

Dans les années 60, le Brésil disposait ainsi d'une main d’œuvre compétente et d'un tissus industriel. Toutes les conditions étaient réunies pour passer à l'étape suivante : des marques Brésiliennes.

Il y eu d'abord des constructeur artisanaux de voitures de sport, comme Puma, Miura ou Santa Matilde. João do Amaral Gurgel voulu lui concurrencer à termes les marques venues d'occident, comme Fiat et Volkswagen. 

En 1969, il lança la Gurgel Ipanema, un buggy sauce Brésilienne. Puis il y eu la Xavante, en 1973. Sur ce second buggy, João Gurgel introduisit la carrosserie en Plasteel. Un dérivé de fibre de verre, qui devint la marque de fabrique de la marque. João Gurgel était une espèce de Géo Trouvetou Brésilien. Il multipliait les expérimentations. Tel le van électrique Itaipu (1974), le monocorps tout-chemin X-15/G-15 (1975), le coupé de poche XEF (1981) ou le SUV Carajàs (1984.) Il développa même sa propre mécanique, le 4 cylindres Boxer Enertron (proche du katrapla VW, mais refroidit par eau.)
Les affaires sont plutôt bonnes pour Gurgel, qui devint le spécialiste Brésilien du tout-chemin. Il faut dire que la concurrence locale se limitait à un avatar de Jeep CJ-3 (produit par Ford !) et à un Land Cruiser J40 équipé d'un moteur de camion Mercedes-Benz ! Et lorsqu'il prit le pouvoir en 1975, Ernesto Geisel rajouta un tour de vis sur la surtaxe des importations...


Au milieu des années 80, João Gurgel avait conscience que les temps allaient changer. José Sarney, premier président du retour à la démocratie, amorça un virage libéral. Le protectionnisme Brésilien allait disparaitre. 

Pour survivre, Gurgel devait produire plus et mieux. Le fondateur obtint une ligne de crédit pour développer sa "Carro Econômico NAcional" (CENA.) La XEF servit de brouillon. Le Brésil offrait une TVA réduite sur les moteurs de moins d'un litre. La CENA fut ainsi conçu avec des moteurs Enerton 650cm3 26ch et 800cm3 32ch. La carrosserie était bien sûr en Plasteel. Dévoilée en 1987, elle entra en production avec le seul moteur 800cm3. D'où le nom de BR 800.

En 1990, Fernando Collor succéda à José Sarney et il accéléra les réformes. Les surtaxes sur les importations disparurent. En prime, la TVA réduite sur les petites cylindrées fut étendues à l'ensemble des motorisations. Chère et maladroite, la BR 800 avait du mal à convaincre. Et désormais, les Brésiliens avaient le choix...
L'URSS agonisante solda ses Niva au Brésil, un coup dur pour le Carajàs. En 1992, le constructeur tenta de rectifier le tir, avec la Supermini, une BR 800 reliftée, plus puissante (36ch) et surtout plus aboutie. Mais le constructeur ne se remit pas de la mévente du Carajàs, qui était jusqu'ici son best-seller. Il fit faillite, puis se traina jusqu'en 1994. João Gurgel contracta alors la maladie d'Alzheimer et il mourut en 2009.

L'industrie Brésilienne fut ensuite envahi par les importations. Les grands constructeurs souhaitèrent harmoniser leurs gammes. Seuls Fiat et dans une moindre mesure, Volkswagen, continuèrent de développer des modèles spécifiques pour le Brésil. Quant aux marques locales, elles furent complètement submergées. Les tentatives ultérieures (Grancar, Emme, Lobini...), mal-ficelées, firent long feu. Les crises économiques récurrentes, depuis les années 90, n'encourageant guère l'investissement dans l'industrie automobile, au Brésil.
Le savoir-faire accumulé durant près de 40 ans fut dilapidé. D'ailleurs, le succès de la collection Carros Nacionais (et ses nombreuses rééditions) s'explique sans doute par la nostalgie des Brésiliens envers leur industrie automobile.

João Gurgel est aujourd'hui un personnage controversé.
Les fans parlent d'un "Henry Ford Brésilien". Un patriote qui voulait motoriser le pays, en utilisant le savoir-faire local. Malheureusement, il fut sacrifié sur l'autel de la mondialisation.
Pour ses détracteurs, c'était un amateur qui surfacturait des voitures en cochonium. Tout en profitant des largesses de José Sarney (un président plusieurs fois suspecté de corruption, bien que jamais mis en examen.)
La réalité est sans doute entre le deux. João Gurgel était à la fois le PDG, le directeur technique, le directeur financier, le responsable de la production et le responsable du design. Cette envie de tout décider, tout concevoir lui-même fut sans doute le principal point noir de Gurgel.

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