Dealerships : sic gloria transit Autolib

D'Autolib, il reste des bornes, ici et là, en région Parisienne. Il y a aussi ces images de Bolloré Bluecar entassées qui sur le parvis de l'ex-usine Matra, qui sur un terrain vague près de Romorantin. Mais en plein Paris, le show-room du service est toujours là. Et depuis trois ans, le local cherche un acquéreur...

D'emblée, j'avais été dubitatif face à Autolib. Plus j'ai creusé, plus j'ai été dubitatif.

En 2008, Bertrand Delanoé était le candidat PS à sa propre succession à la Mairie de Paris. L'une des mesures phares de sa campagne, c'était Autolib : des voitures électriques en libre-service. En fait, l'idée existait depuis les années 90, avec Tulip de PSA (1995.) En 1997, Praxitele proposait des Clio électrique en auto-partage à Saint-Quentin-en-Yvelines. L'opération fit long feu.
Une fois réélu, Bertrand Delanoé s'empressa de mettre en pratique son idée. En 2009, un RFI est lancée. En 2010, ce fut la RFQ. Les candidats étaient Véolia Transport, RATP-SNCF-Avis-Vinci Park (qui tenteront ensuite leur propre service d'autopartage) et Bolloré.

L'avantage de Bolloré, c'était de proposer un service et des véhicules... Sauf qu'il ne possédait aucune expérience dans les deux domaines. En 2001, Bolloré se lançait dans les accumulateurs au lithium, avec Batscap. Bolloré descendit d'un premier cran avec une solution d'électrification pour automobile, en 2005, baptisée Blue Solution. La première BlueCar, créée par Philippe Guédon et Matra Automotive (désormais dans l'orbite de Pininfarina) était un démonstrateur. Un an plus tard, la Pininfarina B0 était une voiture beaucoup plus aboutie. Faute de client, Bolloré voulait s'improviser constructeur. Et avec Autolib, il s'assurait de garnir son carnet de commande.
Sauf qu'en 2008, Pininfarina connu un grave tempête. Matra Automotive fut revendu à Segula. Et pour la production, Bolloré du s'appuyer sur un second couteau, Cecomp, qui a racheté l'un ds sites de Pininfarina. La BlueCar définitive ne fut dévoilée qu'au Mondial de Paris 2010. C'est-à-dire que Bolloré a remporté l'appel d'offres final avec un voiture n'existant que sur papier ! Pourtant, la Mairie de Paris lui commanda 3 000 voitures, soit 2 000 dès 2012 et 1 000 supplémentaires d'ici 2015.

Parmi les points qui n'allaient pas, il y a incontestablement l'appel d'offres. La Mairie de Paris avait déjà connu un fiasco avec Vélib (2007) et il y en eu un autre avec Streeteo (2018.) A chaque fois, le partenaire n'était pas à la hauteur, la prestation n'était pas conforme et c'est au contribuable d'éponger les éventuelles dettes. Sans oublier des clauses de sortie du contrat digne d'un footballeur...
En tant qu'acheteur et chef de projet, après la RFI de début 2010, j'aurais cherché à temporiser. L'objectif premier d'Autolib, c'était d'offrir un service de qualité aux Parisiens, pas d'assurer d'emblée la rentabilité du prestataire ! Face aux nombreuses inconnues, il aurait fallu démarrer petit, comme Praxitele et élargir par phases.
Et puis, le profil de Bolloré, avec ses batteries solides dont personne ne voulait n'inspirait pas confiance. Il n'y avait aucune garantie sur la pérennité. Enfin, légalement, en tant que quasi-unique client de Bolloré/Blue Solutions/Bluecar, la Mairie de Paris et le syndicat Autolib se retrouvaient avec de nombreux devoirs vis-à-vis du prestataire. Ce qui est normalement un cas d'exclusion de la RFQ.
En définitive, j'ai trouvé cet appel d'offres et son attribution à Bolloré pour le moins étonnant.
La Mairie de Paris a-t-elle voulu avancer à pleine vapeur afin de déployer Autolib avant les municipales de 2014 ? Possible, après son suicide politique, Bertrand Delanoé s'est comporté en régent. Son dernier combat, c'était de faire élire Anne Hidalgo.
Possible aussi que le dossier ait été suivi par des gens avec des diplômes en sociologie. J'ai été approché par l'équipe achats du Grand Paris Express et j'ai été sidéré par leur manque de technicité. Si le syndicat Autolib possédait autant de "cerveaux", nul doute qu'ils se sont fait balader par les enchérisseurs...
Le troisième point, c'est le lobbying. Vincent Bolloré ne se cache pas qu'en Afrique, il décroche des marchés via des conflits d'intérêt et des collusions. En France, Bolloré aime employé Alain Minc comme conseiller. Un Alain Minc que l'on retrouvera aux côtés de Bertrand Delanoé dans le comité de soutien d'Emmanuel Macron. Ceci explique-t-il cela ?



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