Les Ferrailleurs
Après Deadly Driver, un autre roman sur les sports mécaniques. Dans Les Ferrailleurs, William Camus revient sur son passé de pilote de stock-car. C'est Jours de tonnerre version 1953 !
La chronique "Vécu" de Rétroviseur était un témoignage de première main. Dans le N°124 d'octobre 1998, un pilote évoquait la grande époque du stock-car.
Né à Joinville, au Québec, en 1923, William Camus grandit dans le Yukon. Au début des années 50, il se lança dans le stock-car.
Petite parenthèse. A la fin des années 20, des casseurs Californien s'amusèrent à organiser des courses entre leurs épaves. De fil en aiguille, ils roulèrent sur de vrais circuits -en terre battue-. Il y a des notions de compétitions et de vitesse, mais il faut aussi éliminer les adversaires. Le sport se développe dans les états du nord et au Canada. La sécurité y était minimale. William Camus perdit le contrôle et il faucha trois spectateurs. Il se jura alors de ne plus toucher un volant...
De petits boulots en petits boulots, le voilà mécanicien à Indianapolis. En 1953, en marge de la fête foraine annuelle, il y a une course de midgets, les Hoosier One Hundred, avec une course de stock-car en prologue. Notre homme replonge... Peu après, un promoteur voulait organiser une tournée en Europe. Bilingue, français-anglais, William Camus fut du lot. Les primes furent plus basses que prévues et beaucoup retournèrent en Amérique. William Camus, lui, resta, sympathisant avec les pilotes Français. Notamment Serge Pozzoli (futur cheville-ouvrière de l'ancienne !) ou
Colette Duval (ex-résistante, ex-mannequin et ex-parachutiste !) En faisant croire qu'il était né à Joinville-le-Pont (94), il pu obtenir une licence française.
William Camus et les pilotes de stock-car furent de vrais stars. Il rencontra Pelé ou Juan Manuel Fangio. Ce dernier le convainquit de passer aux voitures "normales". Pour les 1000km de Buenos Aires 1956, Tony Lago possédait un budget misérable. Il fit appel à des pilotes de stock-car pour son unique T26C. Lors des essais libres, William Camus perdit le contrôle et fut éjecté. Grièvement blessé, il failli perdre la vue. Ce fut la fin de sa carrière.
Quelques années plus tôt, Bill France avait créé son propre championnat de stock-car. Ici, pas question d'envoyer son adversaire dans le décor ! D'abord limitée au quart sud-est des Etats-Unis, la NASCAR franchit la ligne Mason-Dixon et il absorba son homonyme.
Dans les années 80, Coluche (avec le soutien de Lada France !) tenta de faire revivre le stock-car. Le comique venait d'organiser une manche à Montlhéry lorsqu'il eu son accident mortel et hélas, l'élan ne lui survécut pas.
Sur Google, si vous tapez "William Camus", vous trouverez un auteur de livre. Oui, c'est bien le même homme !
Dans les années 70, William Camus s'est lancé dans la littérature pour adolescents. A l'époque, point de smartphones. Surtout, dans la plupart des villages-vacances, gites ruraux, colonies de vacances et même les hôtels de milieu de gamme, il n'y avait pas de télévision ! Alors, pour s'occuper, on lisait...
Pour son premier livre, William Camus puisa dans ses souvenirs. Dans Les Ferrailleurs, il était Willy Ress, Gil Landstrom (le patron du garage d'Indianapolis, également pilote) devint Gil Dulac et Andrew Jefferson Dixon (le promoteur de la tournée Européenne), Andrew Jefferson Dicson. L'histoire raconte la fameuse course en prologue des Hoosier One Hundred 1953. Le livre fut publié en 1976. Il enchaina avec Mémoires d'un sauvage, consacré à son enfance dans le Yukon, parmi les Iroquois. Puis il enchaina avec des romans, souvent militants, consacré aux Amérindiens.
Il y a une polémique, car William Camus reconnaissait lui-même avoir enjolivé la réalité. La tournée Européenne fut largement couverte à l'époque. Donc les preuves abondent, confirmant les dires de l'auteur. Par contre, il n'y a jamais eu de course en prologue des Hoosier One Hundred 1953. Et pour le palmarès Américain et Canadien, la seule source, c'est souvent William Camus lui-même...
Quoi qu'il en soit, Willy Ress, Gil Dulac et Tim Cassidy vivaient à l'ombre du Speedway d'Indianapolis. Non pas l'anneau des "500", mais le plus modeste Indiana State Fairground, un ovale en terre battue.
L'auteur évoque cette ambiance très particulière du monde du sport auto. Le danger était omniprésent en stock-car, mais c'était justement une source d'excitation. Les pilotes étaient également des mécaniciens. Ils ne quittaient l'habitacle que pour se mettre sous le capot. William Camus décrit avec exactitude la respiration des courses. Ainsi que cette ambivalence des rapports : sitôt le damier passé, ls rivalités disparaissaient et on allait boire un coup ensemble. Des hommes obnubilés par la course et la mécanique. Du coup, ils étaient un peu gauche dès qu'ils sortaient de leur cercle d'amis (cf. le personnage de John Travolta dans Trading Paint.)
Dans le livre de William Camus, il n'y a pas de "gentil" ou de "méchant". Cela sent bon le cambouis et la terre battue
Pour un premier livre, il y a quelques faiblesses (par exemple : la copine de Tim s'appelle Shirley, puis Gladys.) Les rebondissements sont archi-téléphonés. Et certaines tournures étaient déjà désuètes en 1976 (encore un manuscrit sans doute resté des années dans un tiroir avant d'être publié...)
Malgré tout, c'est ma recommandation. Les 148 pages se lisent d'un trait. Les Ferrailleurs n'est plus disponible en librairie, mais on le trouve facilement sur internet.
William Camus (nom civil: Louis-André-Georges Camus) est né à Joinville-le-Pont (Val-de-Marne) le 8 juillet 1923. Ses prétendues origines iroquoises sont le fruit de son imagination. Ses parents sont Français. Il immigre vers l'Amérique du Sud (Brésil) en 1953. Il revient en France dans les années 1970. Il est décédé à Créteil le 8 août 2001.
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