Pirelli 150 years

Pirelli fête ses 150 ans au Piccolo Teatro de Milan. Un évènement "à la Pirelli" : un peu arty, un peu pipole... Et en tout cas, complètement inédit.

Compte à rebours
Pirelli s'est offert un teaser dans quatre grandes villes. C'est d'abord à Rio de Janeiro qu'on fleurit les publicités Pirelli. Un Brésilien nous dit quelques mots.

A la fin de son speech, le Carioca jette sa casquette et magie du montage, c'est une Shanghaïaise qui la rattrape. Simple envie d'être "international" ? Ou bien un clin d’œil discret à ChemChina, premier actionnaire de Pirelli ?

Ce sera l'unique référence à la Chine de la journée.

Puis elle passe la casquette à une New-Yorkaise. Cette fois-ci, c'est une référence au logo de Pirelli (on y reviendra.)

Puis l'on finit ce tour du monde express à Milan, fief du manufacturier.

The celebration logo
La présentation débute... Par du théâtre ! En l'occurrence, une interprétation de l'origine du logo Pirelli.

Depuis sa fondation, le fabricant frappait ses produit d'une étoile. Le logo se contentait d'un "Pirelli & Co Milano", voire des lettres P, C et M autour d'une étoile.
En 1905, Pirelli fournissait des pneus à l'Itala de Scipione Borghese, pour le Paris-Pékin. Le prince remporta la course. Piero et Alberto Pirelli, cogérants de l'entreprise éponyme, voulu le faire savoir. A New-York, il fit peindre une énorme publicité. Le peintre dessina le nom de l'entreprise avec un "P" recouvrant les autres lettres. Les frères Pirelli aurait adoré : le P leur rappelait l'élasticité du caoutchouc. Désormais, ça sera le logo de la firme.

Pirelli aime raconter cette histoire. Giovanni Battista Pirelli (fondateur de l'entreprise et père des deux frères) signait avec un "P" recouvrant les autres lettres. Est-ce cela qui a inspiré le peintre ? Voire, est-ce que les frères auraient soufflé l'idée au peintre ? Chacun se fera son opinion...

L'histoire
Pirelli retrace ses 150 ans via un clip baptisé "roman graphique".

Fils de boulanger, Giovanni Battista Pirelli laissa tomber le lycée pour se battre aux côtés de Giuseppe Garibaldi. A l'indépendance Italienne, il retourna sur les bancs, devint ingénieur et se passionna pour le caoutchouc.

Le 28 janvier 1872, à 23 ans, il fonda une fabrique d'objets divers en caoutchouc, à Milan : vêtements, bouillottes, poires de lavement... Et surtout, des câbles. Grâce aux câbles télégraphiques sous-marin, l'entreprise se développa.

Élu local, Giovanni Battista Pirelli voulu se lancer dans la politique nationale. En 1904, il passa le témoins à ses deux fils, Piero et Alberto. Pirelli était alors dans une logique d'univers et l'entreprise fabriqua des pneus de vélos, puis de voitures.

Dans les années 50, les voitures Italiennes connurent leur apogée. Or, elles étaient souvent chaussées en Pirelli. L'ambitieux Leopoldo Pirelli, fils d'Alberto, prit les commandes en 1956.

L'entreprise était florissante. Elle pu s'offrir les services de Juan Manuel Fangio, pour une publicité tournée sur l'anneau de Monza. En 1972, le manufacturier racheta son compatriote CEAT. Alberto Bruni Tedeschi (le père de Carla Bruni), son héritier, était mal à l'aise avec les finances. Qui plus est, il avait peur d'être la cible des Brigades Rouges.

Le manufacturier n'hésite pas à évoquer ses échecs. Le commentaire parle "d'internationalisation ratée". Un euphémisme pour l'aventurisme industriel du manufacturier. 

Il y eu d'abord le flop de la fusion avec le Britannique Dunlop. Un autre conglomérat familial devenu un géant national. Constamment en difficulté, Pirelli provoqua l'implosion de Dunlop.
Puis il y eu une tentative d'OPA sur Continental, qui n’aboutit pas.

Marginalisé, Leopoldo Pirelli céda son poste à Marco Tronchetti Provera.

Second fiasco : la fibre et le mirage d'internet.

En 2000, Marco Tronchetti Provera -présenté comme un génie par l'entreprise- vendit une société du groupe, afin de lever du cash pour prendre le contrôle de Telecom Italia (avec l'aide de la famille Benetton.) A l'heure d'internet, cela représentait un prolongement de l'activité de câblerie de Pirelli. En parallèle, avec la marque Alice (wouh-ouh), il tenta de conquérir l'Europe sur le marché naissant de l'ADSL.

En 2005, Telecom Italia afficha un dette abyssale. Impliqué dans plusieurs scandales, Marco Tronchtti Provera dut démissionner de la société de téléphonie.

Après cela, Pirelli revendit ses filiales. L'entreprise se concentra sur les pneus. Plus exactement, sur les pneus du secteur premium et du luxe.

Tables rondes
Marco Tronchetti Provera reste président de Pirelli. Il ouvre les tables rondes. 

Son beau-frère Alberto Pirelli, qui siège au conseil d'administration, fait une apparition. Leopoldo (junior) Pirelli, grand frère d'Alberto, est présent en duplex pour évoquer Leopoldo Pirelli (senior.)

Gros chapitre sport auto. Alberto Pirelli fut pilote de rallye. Mais la star du jour, c'est Stefano Domenicali. Le responsable de la F1 tresse des louanges de Pirelli.

Depuis 2011, Pirelli fournit les pneus des F1. Les F2 et les F3 suivirent.

Les pneus Michelin et Bridgestone utilisés jusque là étaient jugés "trop solides", au point de tuer le spectacle. La FIA demanda ainsi aux Italiens des pneus se dégradant rapidement. Depuis 2011, les polémiques se sont multipliés. Les seules fois où Pirelli est évoqué en F1, c'est de manière négative. Pourtant, il poursuit.

Culture, communication, image
Par le passé, les aristocrates aimaient jouer les mécènes. Avec la révolution industrielle, on vit des capitaines d'industrie en nouveaux aristocrates. Et ils devinrent donc des protecteurs des arts.

Pirelli n'y échappe pas. De 1948 à 1972, il édita Rivista Pirelli, une revue où Umberto Eco fit ses premières armes.

Alberto Pirelli avait fait ériger un gratte-ciel dans Milan, la Torra Pirelli, en 1956. 

Dans les années 80, son fils Leopoldo fit fermer la principale usine de pneus, à Milan. Renzo Piano fut charger de convertir la Biccoca en siège social. Le bâtiment principal est une espèce de cloche autour de la cheminée de l'ancienne usine.
L'architecte revient dessus, en duplex.

Sur le site, l'un des autres bâtiments abrite un espace culturel. Il a accueilli des hommages à John Cage et à Luchino Visconti.

Pour ses rapports financiers, la marque fait appel à des artistes pour illustrer les thématiques !

Lorsque le manufacturier présente le "Cal" comme faisant parti de sa politique culturel, il charrie.

Déjà, c'était un initiative de la filiale Britannique et non de la famille Pirelli. Une polissonnerie  Britannique de la vieille école, façon Page 3 du Sun.
Le calendrier réapparut dans les années 80. Milan était alors une capitale de la mode. Photographes, modèles et couturiers se baladaient à un jet de pierre du siège de l'entreprise. La provocation était un outil typique de la communication Italienne des années 80 (cf. les pubs Benetton d'Oliviero Toscani ou celles de Diesel.) Pour une entreprise en permanence en difficulté, le calendrier offrait une très belle exposition pour un coup ridicule par rapport à un campagne de pub mondiale.
Et à la limite, le Cal s'est perdu dans les années 2010, lorsqu'il a voulu devenir woke...

Power 15 n0thing without control
Pour ses 150 ans, Pirelli va réaliser un livre, des timbres et surtout, une nouvelle campagne de pub. Le chiffre "150" étant intégré au slogan "sans maitrise, la puissance n'est rien".

C'était compliqué de résumer l'histoire d'un conglomérat existant depuis un siècle et demi. Le manufacturier a su évoquer tous les aspects de son histoire et de son univers. Avec une certaine franchise. Et l'utilisation d'un décor de théâtre, pour prendre du recul est très original.

Globalement, il n'y a quasiment rien à redire. Cet anniversaire était un objet très rare. En espérant que cela donne envie à d'autres entreprises d'oser...

(Captures d'écran de Pirelli.)

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