Va des rétros !

Voici une Renault 5 Alpine. Je ne savais pas qu'elle avait été proposée en rouge. De plus, il manque les graphiques frontaux et latéraux. Par contre, le bouclier avant et les jantes spécifiques sont là. Tout comme le monogramme, à l'arrière...

Dans le coin, ils salent déjà les routes et la DDE a visiblement la main lourde sur le sel...
L'historique des Renault sportives est un peu compliqué. La firme au losange s'est longtemps cherchée.

Pour succéder à la R12 Gordini, la logique aurait voulu que Renault crée une R14 sportive. La R18, qui remplaçait la R12, eu effectivement une version turbo. Mais elle n'avait pas du tout le même positionnement que la R12 Gordini. La vraie Renault sportive fut ainsi basée sur la R5. Et suite aux succès de l'A110 en rallye, cette version sportive fut baptisée "Alpine".
La production de l'A110 s'arrêtait et en ces temps d'autophobie, Renault voulait assurer une activité au site de Dieppe...

La R5 Alpine apparu en 1976, deux ans après la fin de production de la R12 Gord'. Elle était équipée du "Cléon fonte" réalésé à 1,4l, développant ainsi 93ch. De quoi emmener la R5 Alpine à 175km/h. En prime, elle recevait la boite à 5 rapports de la R16 TX.
Outre-manche, Rootes (puis PSA) était propriétaire du nom "Alpine". Du coup, la R5 Alpine fut vendue sous le nom de "Gordini". Sachez qu'en Argentine, pour remplacer la R12 Gordini, il y eu une R12 Alpine, équipée du 1,4l 93ch de la R5 éponyme ! Avec ses graphiques dorés, son bossage sur le capot et son aileron "chasse-neige" à l'avant, elle était bien kitsch !
La R5 Alpine est apparue en même temps que la Golf GTI. L'Allemande disposait d'un 1600 110ch et d'une meilleure habitabilité. Tout cela pour 700frs de plus (38 490frs vs 37 700frs.) Le seul point fort de la Française, c'était sa boite 5.
Au niveau hexagonal, en revanche, c'est le désert. La Peugeot 104 Z S était positionnée plus bas. Quant à la Matra MS15/S80, ce fut un projet vite avorté. 

Renault prit son temps pour riposter à la Golf GTI. Dans un premier temps, les évolutions furent surtout cosmétiques (rétroviseurs obus, volant, jantes...) En 1982, la R5 Alpine reçut un turbo et développait désormais 115ch.
En 1983, la Peugeot 205 déboula et elle n'eu pas tout de suite de version GTI. Alors que les ventes de R5 fondaient comme neige au soleil, l'Alpine Turbo fut l'une des rares exécutions à poursuivre, via la série Lauréate.
En mars 1985, la Supercinq GT Turbo apparut et elle lui succéda sur la chaine de Dieppe. L'utilisation d'Alpine comme blason sportif n'aura donc duré que le temps de la R5...
Pour les fans d'Alpine, la marque se limite peu ou prou à l'A110. L'A310, la V6 et l'A610 sont tolérés, mais ne leur parlez pas de la R5 Alpine !
La R5 Alpine trahissait la prise de contrôle de Renault. C'était le début de la fin de la marque Alpine. A la même époque, l'A500 de F1 évoluait en RE 01. Pour la firme au losange, Dieppe était une usine spécialisée dans les petits volumes, point. L'Alpine A105 (alias projet NGA) fut sacrifiée au profit de la R5 Turbo 2. Dieppe fabriqua les R9/R11 Turbo et même des Espace 1 !

Mais après tout, les autres n'ont pas fait mieux. En Italie, Fiat revendit les activités "châssis" d'Abarth à Lucchini et son service "moteur" fut absorbé par Fiat. Abarth devint synonyme d'Autobianchi, puis de Fiat sportives. Avec la Uno Turbo, le nom Abarth n'était plus cité (bien que le scorpion apparaisse ici et là.) Puis le nom fut ressorti sur le kit carrosserie de la Seicento. Imaginez une Twingo 1 avec un kit Alpine... Vous voyez, ça aurait pu être pire !
En Grande-Bretagne, MG fut une excroissance de Morris, puis d'Austin. La berline Magnette (1953) n'avait pas grand chose à voir avec les petites sportives frappées de l'octogone. Mais au moins, elle possédait une certaine classe... Du moins jusqu'à la Mark III (1959.) Puis il y eu les MG 1100/1300, dont la différence avec les Austin et Morris se limitait à la calandre ! En 1980, BL décida de fermer l'usine historique d'Abingdon. La marque fut néanmoins ressuscitée peu après pour des Austin, puis des Rover sportives. Et désormais, depuis une douzaine d'année, les Chinois produisent à Nanjing et Shanghai des véhicules de milieu de gamme ayant un lien ténu avec les A et B...
Renault n'a pas lancé l'A105. Néanmoins, à la fin des années 70, la Matra Murena et la Triumph TR7 furent les seuls lancement européens en matière de petits coupés sportifs. La conjoncture ne semblait guère favorable et le losange a fait preuve de prudence.
Renault a été courageux de relancer Alpine. Le naufrage du retour de Gordini aurait pu l'en dissuader. Le divorce avec Caterham, le départ de Carlos Tavares et le redesign de l'A110 furent autant de gros obstacles, qui en auraient arrêté plus d'un.

Après, je n'ai jamais cru aux 5 000 ventes par an. Lotus est à 2 000, 2 500 ventes annuelles, malgré une légitimité et un réseau mondial.
Sur les 10 premiers mois, il s'est écoulé 3 779 A110... Dont 2 608 en France. Renault a dépensé beaucoup d'argent pour remettre en selle la marque de Dieppe. Dans un but d'économies, les projets de réseaux US et Chinois ont été envoyés aux orties. Beaucoup d'investissement pour peu de retour à court, moyen terme. La Grande-Bretagne serait un terrain favorable, mais Renault UK ne joue pas le jeu ; ils se contentent à peine de traduire les communiqués français.
Alpine est donc une marque très franco-française. Lors du lancement de l'A110, les orphelins de l'A610 se sont jetés dessus. Il y a eu aussi un peu de spéculatif. Désormais les fans sont équipés (à chaque fois que je vais sur un circuit, il y a au moins une A110 sur le parking) et il ne reste plus qu'une demande résiduelle.

En plus, la situation est grave chez la maison-mère. Lorsque je travaillais au Technocentre, j'assistais à la mise en place d'un organigramme post-Carlos Ghosn. Comme Louis Schweitzer en son temps, Ghosn avait non seulement désigné son successeur, mais aussi tout le futur comité de direction. Tout ceci a implosé et un par un, les "ex-futurs" démissionnent.
Dans ce contexte, la question du développement d'Alpine passe un peu au second plan. Il faudra attendre que la tempête se calme pour que Renault ait une stratégie claire. La bonne nouvelle, c'est que le SUV (qui faisait parti de l'accord avec Caterham !) a été bazardé. J'espère que le roadster, lui, restera.

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