Si on excepte le cas particulier du championnat 1950, pendant longtemps, une seule équipe avait gagné son tout premier Grand Prix : Wolf, avec Jody Scheckter au Grand Prix d'Argentine 1977. Le Sud-Africain récidiva à Monaco et au Canada. Mais Niki Lauda obtint le titre pilote et faute de seconde voiture, Wolf ne put jouer le titre constructeur. L'écurie ne se remit jamais du départ de Patrick Head et Frank Williams. Notez que Wolf avait pour designer Harvey Postlethwaite, qui avait déjà excellé chez
Hesketh.
On note aussi que Jackie Stewart place un March tombée de chandelle en pole du Grand Prix d'Afrique du Sud 1970.
En 1999, il se murmurait que BAR voulait remporter son premier Grand Prix. 20 ans et deux changement d'enseignes plus tard, l'écurie de Brackley réalisait un exploit inédit. Cet épisode fut d'autant plus marquant que ce fut la première et dernière saison de Brawn GP.
Le livre a été écrit par David Tremayne, journaliste Britannique et vieux routier de la F1. Accessoirement, c'est un proche de Ross Brawn. Il a écrit une cinquantaine de livre, mais c'est le premier pour Porter Press.
Décembre 2008, cela faisait un mois que le drapeau était tombé sur le Grand Prix du Brésil (et
le titre de incroyable Lewis Hamilton.) Les employés sédentaires s'apprêtaient à prendre leurs congés.
C'est alors que la nouvelle tomba : Honda quittait la F1.
Durant plusieurs chapitres, le livre nous expose les différents points de vue. D'abord, du côté de Ross Brawn et Pat Fry, du côté de Honda F1 et enfin, du côté des pilotes.
Après cette annonce, les jours comptaient double, à Brackley. Ross Brawn avait assez de budget pour achever la voiture et la faire rouler en essais privés. Et ensuite ? Les cadres de l'équipe restèrent à bord, alors que l'avenir était incertain.
Pendant ce temps, la FIA ne pouvait se résoudre à voir disparaître Honda F1. On apprend que Ferrari était près à lui donner un moteur.
On suit ce long hiver, entre coups de téléphones, réunions et rumeurs ébruitées sur le net.
Reprendre Honda F1, d'accord, mais pourquoi faire ? Soi-disant, la Honda RA 109 qui devait courir en 2009 était une fusée. David Tremayne était alors très sceptique. Les voitures d'intersaison ultra-rapides, c'est un attrape-nigaud. A fortiori dans une écurie en difficulté...
Le chapitre revient sur les vicissitudes de BAR/Honda. En 2004, BAR -très régulier- termina vice-champion avec une médaille de bronze pour Jenson Button. Hélas, ce fut une performance sans lendemain. En 2006, Honda racheta BAR et
Button décrocha une victoire chanceuse en Hongrie. Mais la perte de BAT, en fin de saison, fut un coup dur financier. Profitant d'une pluie battante, Rubens Barrichello avait décroché un podium chanceux au Grand Prix de Grande-Bretagne 2008. Mais le reste du temps, l'équipe Anglo-Japonaise roulait dans le second tiers du peloton.
Surtout, c'était un défilé permanent de cadres : Craig Pollock, Adrian Reynard, Barry Green, Geoff Willis, David Richards, Shuhei Nakamoto, Gil de Ferran... L'organigramme était régulièrement remanié. Pourquoi est-ce que Nick Fry (venu dans les bagages de David Richards), Ross Brawn (tout juste arrivé de Ferrari) et Loïc Bigeois (ex-Prost GP !) feraient mieux que les autres ?
Finalement, Ross Brawn trouve un repreneur pour Honda F1 : lui-même ! A l'époque, j'avais été complètement surpris. Pour moi, Ross Brawn était avant tout un "N°2". Il n'avait pas l'aventurisme de ses anciens patrons Tom Walkinshaw et Flavio Briatore. Or, posséder une écurie de F1 privée, ce serait comme se jeter d'un pont sans être sûr d'avoir un élastique aux pieds...
Un nouveau marathon débute pour le néo-patron : il doit faire accepter son équipe par la FOTA, trouver un moteur, des sponsors, etc.
En page 80, la BGP 001 apparait enfin !
Jenson Button, son ingénieur et quelques mécanos se joignent à Ross Brawn pour raconter les premiers tours de roue. Dès le shakedown, sur le tracé "école" de Silverstone, la BGP 001 s'avérait très rapide. Elle confirma à Barcelone et Jerez, avant d'être envoyé en Australie, 3 semaines après le déverminage. Le moral de l'équipe s'améliore crescendo.
Ensuite, on suit la saison 2009 de Brawn GP, course après course. Nous voilà plongé dans le stand Brawn GP, avec la joie, puis les doutes de Jenson Button, les états d'âmes de Rubens Barrichello, les ingénieurs qui s'arrachaient les cheveux, les évolutions de la voiture...
Jenson Button et Brawn GP remportèrent cinq des six premières courses. Mais la saison 2009 fut digne d'un film d'action, avec ses coups durs. Ferrari accusa l'écurie de disposer d'un élément illégal : un double-diffuseur. Brawn GP fut convoquée place de la Concorde.
L'accusateur (au classeur rouge), c'est Rory Byrne. Designer en pré-retraite, il avait côtoyé de près Ross Brawn de TWR-Jaguar à Ferrari, en passant par Benetton. Soit près de vingt années ensemble. Sympa, l'ami !
Et en bonus, on a le Powerpoint utilisé par Brawn GP, pour sa défense ! C'est un exemple de la qualité du travail de documentation et aussi du niveau de détail. Et aussi du désir d'exhaustivité.
Malgré les embuches, Jenson Button géra son avance. En terminant 5e du Grand Prix du Brésil, il se garantit le titre, à une manche de la fin.
Notez la place de dauphin de
Sebastian Vettel, très incisif sur le dernier tiers de la saison. Pour sa première saison chez Red Bull, l'Allemand annonçait ses futurs titres...
On remarque aussi la performance très contrastée de Lewis Hamilton, champion en titre. On avait les prémices de son divorce avec McLaren.
Le livre nous offre ensuite un focus sur chacun des deux pilotes. Jenson Button raconte sa saison, depuis ce fameux long hiver, jusqu'au titre... Et au titre de "Membre de l'Empire Britannique" décerné par la reine. C'est aussi l'occasion d'évoquer les week-ends de Grand Prix d'un pilote, au-delà des moments où il est en piste.
On notera que Jessica Michibata, sa future femme, apparait à peine dans le livre (contrairement à l'épouse de Rubens Barrichello.) Le couple a divorcé en 2015. Surtout, l'ex-modèle fut ensuite impliquée dans une affaire de trafic d'ecstasy et nul doute que "JB" voulait s'en distancer...
L'auteur interroge ensuite Rubens Barrichello.
Fin 2008, non seulement, le Brésilien subissait les incertitudes de Brackley, mais même en cas de sauvetage, il n'était pas sûr de rempiler ! En effet, Ross Brawn songeait à le remplacer par Bruno Senna (alors pilote d'essai d'Honda F1.) Au dernier moment, "Rubinho" obtint son baquet pour Brawn GP.
Jenson Button ne parle que de l'équipe et lui. Rubens Barrichello, lui, évoque son rapport avec Jenson Button et Brawn GP. Il est tour à tour complice, rival, jaloux, dédaigneux, fier, etc. On n'est pas dans un schéma binaire.
Fin 2009, peu après Abu Dhabi, Brawn GP devenait officiellement Mercedes GP. Le chapitre 29 revient sur les tractations. Car en plus de la gestion de la saison 2009 de Brawn GP et du dossier de l'affaire du double-diffuseur, Ross Brawn préparait 2010 !
En filigrane, Ross Brawn avait racheté Honda F1 avec l'idée de se donner du temps pour trouver un vrai repreneur. Mercedes-Benz devait lui fournir des moteurs sur plusieurs saisons. Mais le motoriste avait placé une clause de sortie, si le nouveau propriétaire ne lui plaisait pas. Parmi les acheteurs sérieux, il y avait Tony Fernandes (quelques mois avant le début de l'aventure Lotus Racing/
Caterham.) Curieusement, c'est Petronas qui fit capoter les négociations, poussant Ross Brawn dans les bras de Mercedes-Benz !
David Tremayne s'en tient à l'explication officielle. La firme à l'étoile aurait vu d'un mauvais œil la diversification de McLaren dans les GT. Le stepneygate n'est pas évoqué. Pourtant, nul doute que cette affaire a ternis l'image de Mercedes-Benz en F1. Aussi, le rival BMW venait d'annoncer son retrait en fin de saison. Pour justifier son maintien, l'étoile avait besoin d'un nouveau challenge.
On passe au shooting photo "studio" de la BGP 001, dans ses moindres détails.
Porter Press effectue un nouveau sans-faute. Un livre exhaustif, sans concession, bâti autour de témoignages de première main et truffé d'informations inédites. L'auteur est un proche de Ross Brawn, mais il évoque les sujets qui fâchent.
Un ouvrage avec plusieurs niveaux de lecture, même s'il faut posséder un certain degré de connaissance de la F1, pour le comprendre. Et bien sûr, il faut maîtriser l'anglais.
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