Spyshots Live : MG eHS [mis à jour]

 

Vous avez des photographes spécialisés dans les photo-espions. Ils peuvent passer des journées à traquer les prototypes. Des heures à patienter avec son téléobjectif, dans les forêts Finlandaises ou la Valée de la Mort. Il faut entretenir son réseau d'informateurs, flirter avec les lois sur la protection de la vie privée et parfois, se battre avec les essayeurs... Et puis, vous avez moi, qui croise des prototypes en pleine journée, sans le faire exprès !

Voici donc, mesdames et messieurs, un MG eHS, surpris à une borne Autolib. Et comme je possède un nouveau téléphone, j'ai pu en prendre des photos HD floues sous tous les angles !

Pour ceux qui auraient manquer les derniers épisodes, MG est devenu Chinois, il y a une dizaine d'années. Terminées, les roadsters et les voitures sportives. Désormais, il construit des berlines et des SUV access premium.
En 2006, NAC avait mis la main sur MG, mais il était bien incapable de savoir quoi faire de cette prise. Après le naufrage de MG-Rover, il fallait tout rebâtir (gamme, exportations, image, etc.), or NAC n'avait pas un sou vaillant. Lorsque SAIC racheta NAC, il avait davantage une vision de la marque et la possibilité de mettre des moyens. Pour autant, les Chinois ont beaucoup pataugé. Lorsque la berline MG6 débarqua en Grande-Bretagne, elle se vendit au rythme d'une demi-douzaine d'unités par mois ! Les premiers projets en Australie ou au Brésil furent des flops.

Aujourd'hui, MG, c'est un résultat en trompe l’œil. Au premier semestre, la maison-mère SAIC a accusé un recul des bénéfices de 39%. Le groupe fut grandement affecté par le COVID. Sur les 7 premiers mois de 2020, SAIC a vendu 324 248 unités (MG+Roewe+Maxus, sans compter les coentreprises et Wuling) en Chine contre 407 203 sur la même période en 2019. Dans ces "324 248", il y a 117 607 MG. Ce qu'il faut voir, c'est surtout que MG possède désormais un ancrage à l'international. Sur les 7 premiers mois de 2020, la marque à l'octogone à écoulé 13 214 unités en Thaïlande (le 8e rang local), 10 851 unités en Inde (10e rang local), 9 558 unités en Grande-Bretagne, 6 857 unités en Australie. Ainsi, un gros quart des MG sont vendues hors de Chine, avec une dynamique de croissance.
 

Et depuis cet été, MG est de retour en Europe continentale, avec l'objectif de dupliquer ce succès. Dans l'hexagone, il ne dispose pour l'instant que de 6 points et d'un unique modèle, la version électrique du ZS. Avec son moteur 105kW (140ch), il possède une autonomie de 263km (cycle WLTP) et il se recharge en 40 minutes.
MG a toujours eu une politique très agressive en terme de prix. Le ZS EV est vendu 29 990€ (à comparer au 37 850€ d'une Peugeot e-2008), auquel il faut déduire 7 000€ de bonus écologique et éventuellement 5 000€ de prime à la conversion. Soit un tarif de 17 990€.

Au début, je l'avais pris pour une version faceliftée du ZS. Premier coup de théâtre : de retour chez moi, les phares et la calandre ne correspondent pas ! Ce serait donc un ZS "normal" ! Second coup de théâtre : c'est en fait un eHS ! Et finalement, c'est donc un scoop ! Il faut dire que MG pousse très loin l'idée de "signature visuelle", au point où tout leurs SUV se ressemblent...

Le HS étant le petit-frère du ZS, lancé en 2018, qui remplace de facto le GS. Et même un eHS. "e", car le bon vieux 1,5l turbo GDI 162ch est associé à un moteur électrique 90kW (122ch.) C'est donc un hybride et même un hybride rechargeable, avec 70km d'autonomie en mode électrique pur. Ne vous fiez pas à son look : c'est un SUV traction.

Ainsi, outre le ZS, MG compte rapidement proposer un second modèle : le HS. Cet eHS est attendu pour la fin de l'année en Grande-Bretagne et il pourrait apparaitre simultanément de l'autre côté de la Manche.

L'exemplaire du jour est immatriculé au Luxembourg, siège Européen de SAIC.

Au delà de cela, les marques Chinois veulent envahir l'Europe. Il y a 15 ans, on nous annonçait une invasion, avec des ultra-low-cost. Les Chinois ont réalisé que ce n'était pas possible. D'une part, les normes de pollution et de sécurité imposaient de couteux redesign. Donc l'avantage prix disparaissait. D'autre part, les distributeurs établis boudèrent ces marques. Les Chinois firent appel à des amateurs et personne n'a envie d'acheter une voiture d'une marque inconnue, dans un garage qui n'était pas là la veille... Et ceux qui achetèrent des Jonway en Allemagne ou des Landwind aux Pays-Bas s'en mordirent les doigts, lorsque les apprentis-distributeurs se volatilisèrent...

Ensuite, il y a eu une phase d'observation. Byd a déjà posé un orteil en Europe. Après les taxis, les autobus et les camions électrique, il commercialise un SUV électrique en Norvège. MG, lui, souhaite s'appuyer sur le retex de la Grande-Bretagne. A Paris, on croise souvent les taxis électriques LEV (ex-LTI, ex-LTC...) de Caocao ; LEV appartenant à Geely (par ailleurs propriétaire de Volvo.)
L'électrique est un bon cheval de Troie : il y a moins de mise aux normes à effectuer. Et pourquoi s'entêter sur du thermique, s'ils sont bannis à moyen-terme ? En tout cas, on n'est ni sur de l'ultra-low-cost, ni sur une invasion. GAC est également en embuscade. Le marché Européen est déjà saturé. Il faudra investir beaucoup et longtemps, pour se frayer un passage. Mais la fenêtre de tir est réduite, car il n'y aura pas de place pour 10 ou 20 marques Chinoises. Les autres étant alors condamnés...

Lorsque l'on considère l'industrie Chinoise, on ne peut évacuer le président de l'équation. Xi Jinping ne peut pas pousser ses ouailles en concessions et il n'intervient pas dans les bureaux d'études. On n'est plus à l'époque où le congrès du Parti décidait d'implanter telle usine dans telle ville.
Tout est beaucoup plus subtil. D'une part, l'état a le dernier mot sur les gros projets d'investissement. Il contrôle l'accès aux crédits : l'obtention ou le refus est complètement déconnecté du sérieux du dossier. Mieux vaut donc être en bonnes relations avec le Prince... Enfin, Xi Jinping aime bien exprimer des "souhaits", des secteurs où il voudrait que les entreprises Chinoises (publiques ou privées) investissent. Pour les meilleures élèves, comme Li Shu Fu (Geely), toutes les portes s'ouvrent. Mais pour un Jia Yueting (Faraday Future, Lucid Motors...), la disgrâce peut être aussi soudaine que violente...

Le Parti a tenté plusieurs fois de sonner la fin du COVID sur son sol. Mais à chaque fois, de nouveaux clusters sont ensuite apparus. Et à chaque foyer de contamination, on impose un confinement total et sur une vaste zone géographique. Les acteurs économiques Chinois ont déjà tiré un trait sur 2020 et ils ne bougeront plus.
En 2021, le PCC fêtera un siècle d'existence. Il voudra marquer le coup, a fortiori pour marquer la rupture avec une année marquée par le COVID. Il y aura des mouvements dans le secteur automobile Chinois. Et l'on ne parle pas d'une prise de participation minoritaire (cf. Geely chez Daimler) ou du rachat d'un constructeur moribond (cf. Rover-MG, Hummer, Saab...)
Sachant qu'en 2022, ce sera la présidentielle : Xi Jinping devra convaincre le collège du PCC de lui accorder un inédit troisième mandat. Ce n'est pas gagné et il pourrait y avoir un nouveau Prince. Entre le nouvel an et la dite élection (à l'automne), ce sera de nouveau un gel des investissements.

Donc, depuis des mois, les constructeurs bâtissent des dossiers, en attendant un hypothétique feu vert, en 2021.

L'état n'a ni les moyens, ni l'envie de valider tous les projets. Il sera intéressant de voir qui seront les heureux élus. L'état va-t-il continuer à tenir à bout de bras des constructeurs étatiques comme BAIC, DongFeng ou FAW ? Ou bien va-t-il miser sur ceux qui sont déjà en pleine expansion, quitte à favoriser des entreprises privées ? 



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