Traversée de Paris 2022

L'an dernier, j'avais assisté à l'arrivée de la Traversée de Paris. Cette année, j'ai donc voulu voir son départ ! Et comme à chaque fois, c'était une grande fête de l'automobile...

Bois de Vincennes. La petite aiguille n'était pas encore sur le "8", mais l'on s'activait. A l'approche du château, la proportion d'anciennes augmentait sans cesse. Avec notamment cette Simca Vedette.

Les abords étaient aussi le rendez-vous des plateaux. Certains n'avaient pas forcément envie de se coltiner n kilomètres à bord d'une voiture pas du tout adaptée à la circulation moderne (telle cette Autobianchi A112 Abarth préparée VHC.)
Certains étaient suivi par leur plateau, qui s'est garé dans la forêt à côté de l'observatoire de Meudon. D'autres retournèrent au Château de Vincennes.

Vous n'aviez pas d'anciennes ? Vous pouviez voyager en passager d'un bus ancien.

Voyager sur la plateforme d'un Renault TN4H ou TN6, d'accord, mais sinon... Se trainer toute une matinée dans un sauna, avec le vacarme d'un vieux diesel, les sièges de 1cm² de surface en skaï qui collent (mon conseil : évitez les shorts) et l'odeur de transpiration...

Puis l'on débouchait sur l'esplanade du Château.

Et ce n'est qu'un début, car dans les rues adjacentes, des files ininterrompues d'anciennes se formaient. Les occupants des véhicules prenaient ça avec humour, posant devant les photographes ou faisant sonner leurs klaxons vintage... Les bus de la RATP (NDLA : ceux d'aujourd'hui, pas les bus sus-cités) n'hésitaient pas à prendre la route à contre-sens, afin d'ajouter au chaos...

En théorie, les participants devaient arriver par un point de l'esplanade, se garer le temps de prendre leur plaque et repartir par un autre point. En pratique, compte tenu du nombres de voitures et de pannes de cerveau chez certains conducteurs, les bénévoles avaient du mal à organiser le flux.

Car en plus des participants, il y avait énormément de visiteurs. Oui, des centaines de gens qui se sont levé tôt, un dimanche d'août. Avec beaucoup d'enfants aux yeux grands comme des soucoupes devant les vieilles carrosseries. La relève est assurée. Il y avait aussi des femmes trainées là par leur mari. Quasi-somnambules, elles pensaient : "Je pourrais être dans mon lit... Si on divorce, un jour, je mettrai cette matinée parmi les causes !"

Entre les personnes en train de diffuser leur photo sur Instagram, les promeneurs absolument inattentif, les cyclistes qui DOIVENT passer et les gens en train de jouer à chat-statue en solitaire, difficile de garer une Pontiac GTO sans en écraser deux ou trois...

"Hep, hep, hep ! La Singer, pas par là ! Monsieur à la Singer ? Pas par là !"

Soit le conducteur ignorait le bénévole car sa "Singer" était en fait une Morris Eight. Soit il n'en avait rien à fiche.

Parmi les voitures, quelques voitures vues à Vincennes. Comme cette Ford Anglia "Monte-Carlo", qui cède le passage à une Renault Fregate.

Mais aussi des voitures vues ailleurs, comme la DB HBR5 surbaissée, invitée d'honneur des 3H du Garac 2022.

La De Dion-Bouton qui portait le dossard N°1 au Rallye d'Aumale 2022. C'était l'une des doyennes de la Traversée.

La Citroën 11cv conduite par François Allain au Tour Auto 2019. Elle appartient au Conservatoire Citroën, qui l'a ressortie.

Plus surprenante : l'Ultima GTR que j'avais croisé un matin. Les GTR sont apparues en 1999. Or, la Traversée était réservée aux véhicules de plus de 30 ans (donc avant 1992), mais la règle est à la tête du client...

Parlons maintenant de celles jamais vues... 

Quelques voitures de l'Est, dont cette Trabant aux couleurs de l'album Achtung baby de U2. Le quatuor Irlandais avait eu un succès certain au milieu des années 80. Ils s'inspiraient de plus en plus du blues et du rock des années 50, ce qui plaisait de moins en moins. Comment aborder la nouvelle décennie ? Daniel Lanois et Brian Eno expédièrent U2 à Berlin, pour y capter l'ambiance "chute du Mur". Cela donna un album plus pop, en 1992.
Le rapport avec les Trabant ? A l'époque, on pouvait en acheter pour trois francs, six sous. Anton Corbijn filma et photographia U2 avec des nombreuses Trabant. Certaines furent taggées. L'une d'elle, taggée, fut jetée d'un point haut (l'image de la Trabant s'écrasant au sol étant utilisée dans plusieurs vidéos.) Certaines furent même utilisées comme décor pour la tournée de l'album !

Accessoirement, c'était le second CD qu'on m'ait offert !

On passe à la Roumanie, avec un Aro 10 Trapeurs (sic.)

L'histoire d'Aro (Auto Romania, nom le plus original du monde) débuta avec des Gaz-69 sous licence. Au début des années 70, Nicolae Ceaucescu leur demanda une limousine tout-terrain. Sur un châssis de Gaz-69, les designers d'Aro créèrent une voiture au design bien carré, avec un moteur de 204 diesel. Elle servit de base à l'Aro 42. Au tournant des années 80, ils lancèrent un 4x4 plus compact, le 10.
La Roumanie des années 80 avait cruellement besoin de devises. D'où une volonté d'exporter. En France, les Aro 10 avaient un succès certain. L'importateur vantait les "moteurs Renault". Une demi-vérité, vu qu'il s'agissait de blocs de Dacia 1300 (donc de R12.) En Grande-Bretagne, Dacia avait un demi-orteil et l'Aro 10 y fut rebadgé "Dacia Duster" (il servit plus tard d'alibi au Duster que l'on connait.)
Tout-terrain honnête, vendu à un prix "Roumain", l'Aro 10 ne pouvait cacher ses rides, à la fin des années 80. Sans parler de la situation politique de la Roumanie... Voilà pourquoi l'importateur créa la série limitée "Trapeurs" avec jantes alliages et graphiques. L'engin idéal pour braconner de la galinette cendrée...

Une Zastava 750. L'un des nombreux avatars de la Fiat 600. En 1969, Fiat arrêtait la production de la 600. Beaucoup d'alliés de Fiat trouvèrent que c'était prématuré. Le Yougoslave Zastava décida carrément de faire évoluer la 600, avec un moteur de Fiat 850 ! La version locale du 850 Familiare étant déjà appellé "Zastava 850", le constructeur opta pour le patronyme "750".

Il reste encore pas mal de 750 dans les Républiques d'ex-Yougoslavie. Si vous vous abonnez, peut-être que je vous raconterais comment j'ai failli en acheter une, à Belgrade...

La voiture rouge en "une", c'est une Panther Kallista. Les Panther sont devenus bien rares et à cette Traversée de Paris, il y en avait deux !

Robert Jankel avait flairé la mode du néo-rétro. En 1972, il créa une réplique de la Jaguar-SS 100, avec une carrosserie en fibre de verre et un moteur de XJ. La Panther J72. La Lima de 1976 était une évolution de la J72, avec une ligne plus personnelle et des mécaniques Vauxhall. La Kallista de 1982 reprenait les lignes de la Lima, mais avec une carrosserie en aluminium et une meilleure finition. Elle fut importée en France.
En parallèle, Robert Jankel développait des projets aussi fous que ruineux. En 1983, le Coréen Ssangyong (jusqu'ici présent dans le BTP et la sidérurgie) racheta Panther. Le jeune et naïf fils du fondateur du chaebol fut chargé de piloter la branche auto. Robert Jankel lui dévoila son nouveau bébé : la Solo, un coupé sportif à rendre jaloux Lotus ! March fut chargé du développement. Le premier prototype était banal. Retour à la planche à dessin. Le second prototype était déjà démodé. Panther coulait.
Entre temps, Ssangyong avait racheté un constructeur Coréen de 4x4. La production de la Kallista fut délocalisé en Corée du Sud. Ssangyong dévoila aussi plusieurs concepts de coupés baptisés Solo. Avec la crise financière et la ruine de Ssangyong, la Kallista disparu pour de bon.

Restons en Asie avec ces quelques Japonaises...

Les Cadillac étaient présentes en force, au Château de Vincennes...

Celle-ci n'est pas une Cadillac, mais une Lincoln Versailles. Apparemment, Ford avait conservé l'usufruit du nom "Versailles", lors du lancement de la gamme Vedette 1955, juste avant le rachat par Simca. Elle avait été lancée en 1977, comme "petite Lincoln". C'était une Ford Granada/Mercury Monarch (mal) maquillée à coup de chromes. La Cadillac Seville n'en fit qu'une bouchée.

Avec son gros autocollant "C4 C6 Historique Club", cette Ford T brouillait les pistes ! Sachant que déjà, les ultimes Ford T étaient très différentes des premières, les plus connues.

Longtemps considérés comme des bêtes de somme, les 4x4 des années 70, 80 acquièrent enfin un statut "collection".

La Traversée de Paris, c'est aussi les deux-roues. Cette année, les petites cylindrées (scooters, mobylettes, 125...) tenaient le haut du pavé, comme cette Zundapp. Produite sous licence par Famel, les Zundapp ont longtemps pétaradé dans les campagnes Portugaises... Aujourd'hui, des petits malins ont bien compris l'intérêt de ces vieilles brèles. On les retrouve sur les sites d'annonces de collection à des prix "ArtCurial".

Lorsque le départ fut donné, les véhicules s'élancèrent vers l'observatoire de Meudon, par les chemins des écoliers. Notamment cette Estafette "Banania" ex-Tour de France et cette Juvaquatre ex-charcuterie. Deux véhicules politiquement incorrects...

Si vous n'aimez pas que l'on prenne en photo votre voitures, il ne fallait pas venir ! A la sortie de l'esplanade, une dizaine de photographes amateurs "shootaient" les voitures en partance.

La classe, c'était cette Delage CO : carrosserie entièrement en simili et malle arrière créée sur-mesure par Louis Vuitton !

Une bonne heure plus tard, la place commençait à se vider. Reste les retardataires. Sur cette Volkswagen Coccinelle, les grosses taches de rouille sont factices. Par contre, les difficultés de réveil du katrapla sont bien réelles...

Et quelques décamètres plus loin, certains avaient déjà des pépins, comme cette Alpine A310 V6. Notez la Peugeot 203 "L'Equipe" ex-Tour de France devant. Dingo l'avait photographiée pour Rétroviseur, il y a quelques décennies...

La route jusqu'à l'arrivée s'annonçait longue...

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