Nouvelle collection Porsche-BOSS


En ce mois d'octobre, Porsche s'invite à la boutique Hugo Boss des Champs Elysées. Il s'agit de mettre en valeur la nouvelle collection automne-hiver Porsche-BOSS.


Hugo Boss fut la première grande marque de prêt-à-porter à s'engager en sport auto. Comme beaucoup de pilotes de sa génération, Niki Lauda démarchait lui-même de grandes entreprises. C'est ainsi qu'en 1984, le logo Hugo Boss débarqua sur la manche de sa combinaison.
En 1984, la F1 avait une image très jean-baskets, à mille lieu des costumes de la marque. L'intelligence d'Hugo Boss, c'était d'avoir compris que le marché du prêt-à-porter devenait mondial. Terminées, les petites boutiques, place aux centres commerciaux géants qui poussaient en occident ! Pierre Cardin avait ouvert la voie (sous les quolibets de la couture française.) Hugo Boss montait dans le train avec Giorgio Armani, Gianni Versace, Calvin Klein, etc. En 1984, la notoriété de la maison était nulle. Au mieux, on se rappelait qu'elle avait confectionné les uniformes nazis.
En 1985, Jochen et Uwe Holy, les petits-fils du fondateur, sponsorisèrent l'ensemble de l'écurie McLaren. Le logo était minuscule, mais il était placé stratégiquement sur le col des combinaisons et derrière le cockpit, sous le nom du pilote. Ainsi, il apparaissait sur tous les gros plans. Ce fut le jackpot pour Hugo Boss, bientôt côté à la bourse de Francfort, avant d'être vendue au controversé Akira Akagi.
La marque changea ensuite souvent de mains. Côté sponsoring, elle resta fidèle à McLaren... Mais elle suivit Lewis Hamilton chez Mercedes-Benz GP. Et maintenant, elle sponsorise également Porsche.

Au centre du magasin, bien en évidence, il y a la Taycan. Une berline 4 portes électrique chez Porsche ? Le constructeur a fait le pari du cynisme vers 2005. Le client Porsche est un start-uper de la Silicone Valley ou un nouveau riche des BRICS : il se fiche de la tradition Porsche comme d'une guigne. Ce qu'il veut, c'est un véhicule bien voyant, avec un gros logo. Une "保時捷", "Пóрше","بورشه"... Qu'importe s'il écorche le nom, pourvu qu'il fasse un chèque !

La clientèle souhaitait une Tesla Modèle S, mais en Porsche. Le constructeur de Zuffenhausen s'est donc exécuté. Il changea les lignes de la Panamera et créa ainsi la Taycan. Et avec 4 500 ventes au premier semestre, c'est un pari plutôt gagné.


Hugo Boss et Porsche n'ont pas posé leur tente sur les Champs Elysées par hasard. La plus belle avenue du monde vise ouvertement cette classe moyenne à la peau cuivrée. J’allais écrire "nouvelle classe moyenne", néanmoins elle n’est plus si nouvelle que cela. Cela fait d’ailleurs déjà plusieurs années que les Chinois emploient le terme 富二代 (littéralement "riche, deux[ième] génération.") Bientôt, ils vont devoir parler de "富三代" ! 

De toute façon, ces touristes aux poches pleines, avides de produits de luxe, elle reste chez elle, pour cause de Covid. L’ambiance sur les Champs Elysées est lugubre. Le magasin Hugo Boss est vide. L’avenue est vide. Le McDonald’s est d’ordinaire une représentation permanente digne d’un film de Frederico Fellini… Des enfants qui trépignent. Des adultes qui se plaignent (euphémisme) que ce qui est dans leur plateau ne correspond pas à ce qu’ils ont commandé. De jeunes élégantes qui n’ont pas trouvé de meilleur endroit pour tourner une "story". Sauf que ce soir, même le McDonald’s est désert. 

Les Champs Elysées payent cash leur hyper-spécialisation dans le tourisme de luxe. Ce spectacle est désolant.


Plus généralement, c’est tout Paris qui subit les conséquences de ses orientations. 

Paris a toujours été une ville de loisirs. Pierre-Auguste Renoir et Édouard Manet ont peint les loisirs dominicaux des ouvriers. Et que dire du Paris est une fête, le livre au titre évocateur d’Ernest Hemingway ?
Ce qui était nouveau, c’était l’intensification : la vie parisienne n’était plus qu’une célébration permanente. On se retrouvait à papoter, dans un lieu branché, une flute à la main, sans plus trop savoir pourquoi.
Néanmoins, cette socialisation à outrance, dans des espaces clos, est par essence désormais proscrite.

Les vaccins, nous dit-on, ne seront pas prêts avant l’été prochain. Et encore, il faudra ensuite vacciner 70 millions d’âmes… Certains évènements prévus en 2021 sont déjà annulés. Je ne crois pas qu’un beau matin, on sifflera la fin de la partie, on jettera nos masques et l’on s’en ira fêter je-ne-sais-quoi dans une fabrique transformée en lieu éphémère…
Non, car 18 mois de fêtes en pointillés, c’est long. Long pour les propriétaires de lieux et les organisateurs d’évènements, bien sûr. Partout, l’on voit des alignements de rideaux de fer définitivement baissés. Y compris sur les Champs Elysées où naguère, on convoitait le moindre pas de porte. La clientèle tire également la langue. Les temps sont durs. Les particuliers sacrifient les sorties, tandis que les professionnels taillent à la hache dans le budget évènementiel/communication. Ce qui revient peu ou prou au même. Enfin, en 18 mois, de nouvelles habitudes sont apparues. Chez les particuliers, c’est le retour en force du cocooning. Faute d’aller au restaurant, au bar ou au cinéma, on fait tout venir chez soi. Et plus le confinement partiel dure, plus le changement s’enracinera.

 


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