World Premiere: BUGATTI Bolide

Il y a quelques mois, Max Lask créait la Bugatti Vision Le Mans. Une hypercar Bugatti taillée pour les Hunaudières. Le constructeur jurait qu'il ne reviendra pas à la compétition.
Il y a un mois, ce qui semblait n'être qu'un rêve de jeune designer faisait le buzz. Bugatti préparerait son retour au Mans.

Et voici, sans crier gare, que le constructeur dévoile la Bolide. C'est à peine si elle fut surprise, la veille de la présentation, sur le circuit Paul Ricard.

C'était Ferdinand Piëch qui avait tenu à reprendre Bugatti.
Un consortium Italien l'avait sorti de sa torpeur, à la fin des années 80. Il avait produit une supercar, l'EB110. La faillite et l'implosion de Bugatti SpA fut tout aussi spectaculaire. Nul doute que Piëch voulait montrer que, lui, il pouvait transformer Bugatti en société viable !
Après, quel espace pour Bugatti dans un groupe qui comprenait déjà Lamborghini, Bentley et bientôt Porsche ? Ça, c'était à l'intendance, d'y répondre !

Avec Bugatti, on est dans l'exclusivité absolue. Des joyaux quasi-inutilisables sur route, produits à l'unité et vendu à huis clos. A côté de cela, Ferrari fait de la production en grande série !
La Chiron, à droite, ne sera produite qu'à 200 unités. C'est encore trop pour vous ? Bugatti a été plus loin avec la Divo. Construite à 20 unités, elle ne peut être immatriculée. Alors que les premières livraison de Divo débutent, le constructeur dévoile sa nouvelle folie : la Bolide.

What if ?
C'est une e-présentation au pas de course : 13'42. En ouverture, comme Maserati avec la MC20, Bugatti nous fait le coup du mur avec des images de voitures de différentes époques et des logo.

Le bleu rappelle à la fois la couleur fétiche de la marque et les plans bleus. Il y a peu de photos sur ce mur, davantage des crayonnés. Ils me font penser à ceux de François Chevalier, pour Rétroviseur. Le crayon pour reproduire des scènes. Car autrefois, il n'y avait pas toujours un appareil-photo pour immortaliser les instants historiques...

Les plus attentifs auront noté qu'il n'y a que des modèles de compétition, sur le mur. Et que chaque image est annotée d'un mystérieux "what if... ?"

Bonjour mesdames, messieurs
Par une habile transition, on est accueilli -en français- par Stephan Winkelmann.

Pour piloter Bugatti, il fallait un personnage improbable. Berlinois de naissance, Winkelmann passa sa jeunesse à Rome. Un diplôme de sciences politiques en poche, il s'engagea dans la Bundeswehr, comme parachutiste. Rendu à la vie civile, il passa brièvement dans la finance, avant de faire carrière chez Fiat Auto. En 2005, Volkswagen le débaucha et le plaça à la tête de Lamborghini. Allemand, mais de culture Italienne, c'était un trait d'union idéal. Il était encore PDG de Lamborghini, lorsque je le croisais, en 2016. Le dieselgate provoqua plusieurs révolutions de palais, chez Volkswagen. Voilà Winkelmann placardisé chez Audi Sport, avant de se voir confier Bugatti.
De ses séjours fréquents en Italie, il a gardé un accent italien dans son anglais et surtout, un goût pour les costumes et le brushing impeccable.

Les amateurs auront reconnu le château Saint-Jean de Dorilsheim, siège historique de la marque.

Notre premier hôte évoque la Chiron, puis ses évolutions : Super Sport, Centodieci, La Voiture Noire, Divo... Puis le "what if ?" : et si la marque allait encore plus loin ? Et s'ils faisaient plus puissant, plus rapide, plus léger ? C'est de cette recherche de l'ultime qu'est née la Bolide.

L'univers de Bugatti, c'est aussi une nostalgie du passé. "La Voiture Noire" était déjà un nom un peu désuet. Ils en rajoutent une couche avec "Bolide". Un bolide, c'est un corps extraterrestre s’enflammant à son entrée dans l'atmosphère. D'où une trainée et surtout, une vitesse d'entrée phénoménale. C'est sans doute par analogie que l'on nomma ainsi les premières voitures de course. Le terme était déjà vieillot lorsque j'étais petit. Alors aujourd'hui...

Winkelmann nous présente notre second hôte : Andy Wallace.

Il y a très longtemps, le Britannique affrontait Ayrton Senna en FF1600. Passé en FF2000, puis en F3, il décroche le titre en 1986. Avec le Grand Prix de Macao en prime. Wallace semblait programmé pour la F1, mais son passage en F3000 fut catastrophique. Le sauveur s'appela Jaguar, qui revenait en endurance. Il s'imposa pour sa première participation aux 24 Heures du Mans, en 1988. Il fut un fidèle de TWR-Jaguar jusqu'au bout. Après un passage chez Eagle-Toyota, en IMSA, il pilota la McLaren F1 "Harrod's" en BPR. Wallace fit ensuite parti des programmes Panoz, Cadillac et MG.
A l'approche de la cinquantaine, il raccrocha le casque. Embauché pour la promotion de la Jaguar XJR, il décrocha un record de vitesse avec la Chiron Super Sport.

Le monde est petit. Le team Harrod's était une initiative de Thomas Bscher, futur premier patron de Bugatti à l'ère VW. Et l'homme du record avec la Veyron n'était autre que Pierre-Henri Raphanel, son équipier lorsque Bscher et Ray Bellm fusionnèrent leurs équipes !

La Bolide
D'ordinaire, les e-présentations sont plus ou moins en direct. Bugatti, lui, profite des possibilités de la télédiffusion. Nous voici donc transporté chez Bugatti Engineering, à Wolfsburg. Stefan Ellrott, en charge de la R&D, fait le tour du propriétaire.

Notez la Bugatti "Grand Prix", en arrière plan.

Le ton est donné : peu d'informations, peu d'images. Ellrott s'attarde sur la légèreté d'un élément de suspension en titane, pour mieux éviter d'évoquer les caractéristiques techniques de la Bolide. Dallara serait l'auteur du châssis carbone.

Quant aux vues d'ensemble, elles sont très brèves. Une vraie galère pour les captures d'écran...

Puis la présentation est entrecoupée de cartes, tel un film muet.

Trêve de plaisanterie, les chiffres sont tout simplement d'un autre monde. Dire que lorsque j'étais petit, les 478ch et 323km/h de la Ferrari F40 faisaient figure d'Everest...

Au volant
Ensuite, nous voilà téléporté au Circuit Paul Ricard. A 5'45, on voit enfin la Bolide munie de sa carrosserie... Mais camouflée.

Wallace nous glisse que les 1 850ch sont obtenus avec un "carburant course" avec un taux d'octane de 110. C'est-à-dire le bon vieux Avgas 110.
Dès les années 30, on a songé à l'employer en course. Mais ce carburant était bien plus inflammable que le super plombé. Les Miller-Gulf d'Indianapolis sont presque toutes littéralement parties en fumée. Gulf "oublia" cette aventure, pour ne retenir que les GT40 et 917 ultérieures... Dans les années 60, il était interdit sur les circuits français. Mais comme c'était Ray Charles et Stevie Wonder à l'inspection technique, les équipes faisaient le plein à l'aérodrome voisin. Aérodrome qui surcommandait des bidons en prévision des épreuves...

On a droit à quelques secondes de la Bolide sur circuit. L'occasion de constater que non, elle ne fait pas appel à l'hybridation ! Le W16 à quatre turbos est 100% thermique.

De toute façon, à ce niveau de prix, le client n'a que faire du super-malus...

La ligne
A 8'00, on peut enfin voir les traits de la Bolide. 

Cette fois-ci, c'est Achim Anscheidt, responsable du design, qui nous présente son œuvre.

Et encore une fois, on a une "Grand Prix" en arrière-plan...


La philosophie est radicale : ne garder que le moteur de la Chiron, placer le conducteur au ras-du-sol et créer une carrosserie taillée pour la vitesse.

Il y eu un gros travail autour de l'aérodynamique. Il s'agit à la fois de n'offrir quasiment aucune résistance et de refroidir les composants mécaniques.


Quel est l'objet de la Bolide ? Combien d'exemplaires serot produits et quand ? Bugatti élude les questions. Avec la Divo, le constructeur dispose déjà d'une "track car" radicale. Peu de gentlemen-drivers possèdent un cou assez solide pour encaisser les "G" d'une Bolide. Et l'on imagine que pour la faire rouler, il faut une équipe technique conséquente...

Bugatti annonce qu'en simulation, la Bolide a parcouru le Nürburgring en 5'23"1 (à comparer aux 5'19"546 de la Porsche 919 Hybrid Evo.) Le 'ring étant le mètre-étalon classique.
Plus surprenant, le constructeur s'est fendu d'une simulation du circuit des 24 Heures du Mans, en 3'07"1 (cette année, la Toyota a décroché la pole en 3'15"267.) Faut-il en déduire que la Bolide se destine à la future catégorie hypercar des 24 Heures du Mans ?

La Bugatti 57G, victorieuse des 24 heures du Mans 1937 et 1939, apparait brièvement sur l'écran derrière la voiture. Après l'e-présentation, la Bolide pose avec la 57G et l'EB110S "Hommell" (dernière Bugatti à avoir foulé la Sarthe, en 1994.)

Wallace -qui habite Le Mans- souligne ici et là qu'il adore les 24 Heures. On n'en saura pas plus. Anscheidt préférant dire que le "X" présent sur la carrosserie est un hommage au Bell X1 de Chuck Yeager, premier avion à franchir le mur du son. Les quatre sorties d'échappements accolées sont également un hommage au X1 (aux quatre tuyères accolées.)

Conclusion
Wallace et Winkelmann se retrouvent chez Bugatti Engineering. 13 minutes, beaucoup de questions et très, très peu de réponses. C'est cela aussi, Bugatti. Une marque au-dessus de la mêlée, qui n'a de comptes à rendre à personne. La curiosité et le mystère permettant d'entretenir le mythe.

Captures d'écrans de la présentation Bugatti

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