Rétromobile 2019 : 21. McLaren

Comme l'an dernier, l'horloger Richard Mille expose des McLaren. Il a opté pour des F1 moins connues, mais pas forcément moins intéressantes...

La visite commence par cette M7C (et non M7A, comme indiqué) avec laquelle Bruce McLaren termina 3e des Grands Prix d'Allemagne et de Grande-Bretagne 1969... Mais dont le "4" correspond à sa 5e place à Monaco (à l'époque, le dossard changeait à chaque épreuve.)
A l'époque, l'écurie montait en puissance. La M5A de 1967 fut la première vraie F1 de l'équipe. En 1968, McLaren pu aligner une seconde voiture, pour son compatriote Denny Hulme (champion en titre avec Brabham.) Le duo remporta trois victoires avec la M7A. Les M7B et M7C de 1969 n'étaient que des évolutions du châssis 1968. Hulme s'imposa tout de même au Mexique. Néanmoins, McLaren avait compris qu'il fallait une nouvelle voiture...

Visez les frêles ailerons, montés sur les non moins frêles suspensions...
La M14 fut cette remplaçante. Robin Herd devenu le "H" de March, c'est Gordon Coppuck qui signa la voiture. La CSI avait banni les ailerons suspendus, trop dangereux. Hulme termina 2e en Afrique du Sud, McLaren, 2e en Espagne et Hulme, 4e à Monaco. Les deux Néo-zélandais semblaient alors sans doute confiant pour la suite de la saison.
Hulme parti à Indianapolis. Les essais libres avaient déjà commencé depuis une semaine. En pleine ligne droite, sa McLaren prit feu. Le Néo-zélandais sauta en marche. Les combinaisons en coton ne protégeaient guère et "the bear" fut grièvement brûlé.
Quelques jours plus tard, Bruce McLaren testait une Can-Am, à Goodwood. A haute vitesse, le capot s'envolait. La voiture devenait incontrôlable et McLaren heurtait de plein fouet un bunker, servant de cahute aux commissaires de piste. Il avait 32 ans.
McLaren mort et Hulme blessé, l'équipe n'eut pas le temps de trouver des pilotes pour la Belgique. A Zandvoort, Dan Gurney et Peter Gethin les remplacèrent. A Charade, malgré ses brûlures et la perte d'un ami de longue date, Hulme repris le volant. Il enchaina les podiums, terminant 4e du championnat.
Chez McLaren, les années comptaient double, voire triple. A la mort de McLaren, Teddy Mayer prit les commandes de l'équipe. Hulme, lui, se sentait marginalisé. La trentaine bien engagée, il faisait figure de "vieux". Ce qui ne l'empêchait pas de décrocher une victoire par an.
La M23 apparu en 1973. Hulme la fit triompher en Suède. Peter Revson, l'héritier de Revlon, gagna en Grande-Bretagne et au Canada.
Pour 1974, Mayer fit LE mercato. Il convainquit "Rouge et Blanc" de le sponsoriser, succédant à BRM et Iso. Puis il persuada Emerson Fittipaldi (champion 1972 et vice-champion 1973) de signer avec McLaren. Texaco, sponsor personnel du Brésilien, était plus qu'heureux de mettre son logo sur une voiture déjà rouge et blanche...
Aux essais d'Afrique du Sud, Hulme assista à la sortie de route mortelle de Revson, passé chez Shadow. Il annonça sa retraite, à l'issue de la saison. En course, il était 2e, derrière Fittipaldi. Le Brésilien  actionna le coupe-circuit, en vue de l'arrivée et Hulme gagna. "Emmo" se rattrapa en s'imposant au Brésil, en Belgique et au Canada. Malgré un Clay Reggazzoni (Ferrari) très constant, il décrocha un second titre en F1.

Ce fut le premier titre pilote de McLaren. Hulme, en roues libres, termina tout de même 2e en Autriche. Il offrit le titre constructeur à l'équipe, avant de raccrocher.
Teddy Mayer n'a pas "vu" les turbo ou les voitures à effet de sol. Les McLaren dégringolèrent au classement. "Rouge et blanc" alla chercher l'ambitieux Ron Dennis et son équipe Project Four. L'homme d'affaire Mansour Ojjeh, héritier de TAG, accepta de suivre Dennis (alors qu'il sponsorisait jusqu'ici Williams.) Ainsi, il y eu une révolution de palais, chez McLaren, avec la bienveillance du cigarettier...
John Barnard avait dessiné la Chaparral-Chevrolet 2K, première Indycar à effet de sol. Dennis le recruta pour 1980. Barnard eu alors une idée : un châssis entièrement en carbone. Le sous-traitant de l'aéronautique Hercules fabriqua le châssis, d'après les plans du Sud-Africain. La MP4 fut d'emblée compétitive. En 1983, gros mercato avec le recrutement de Niki Lauda. L'Autrichien voulait revenir, mais il exigeait un salaire astronomique (pour l'époque.) Suite à une grève de la CGT, Renault ne pu faire le chèque. Dennis, lui, dégaina la carte bleue : hello Niki !
Pour la MP4/2 de 1984, Barnard eu une nouvelle idée : des disques de freins en carbone. Il savait que Carbone Industrie (aujourd'hui Messier Bugatti) en préparait pour l'Airbus A310. Alors il vint les voir. Mais il manquait encore un turbo à McLaren... En vue de 1984, TAG et Ojjeh Jr financèrent le développement d'un V6 turbo par Porsche ! A l'automne 1983, Alain Prost se disait frustré. Nelson Piquet avait remporté le titre avec une Brabham fonctionnant avec un carburant synthétique et Renault n'avait que très mollement protesté. Dennis n'eu pas beaucoup d'effort à faire pour obtenir la signature du Français...

10 ans après le titre de la M23, McLaren disposait de moyens largement supérieurs à la concurrence. Prost et Landa firent une OPA sur les podiums. Les turbo n'étaient guère fiables. Pas grave : lorsque l'un abandonnait, l'autre triomphait ! Lauda décrocha le titre avec un demi-point d'avance sur le Français. Il en profita pour aller narguer son ex-rival James Hunt (champion 1976 avec McLaren, d'ailleurs), réduit à un rôle de commentateur TV, après une tentative ratée de retour chez Williams.
En 1985, ce fut au tour de Prost de s'imposer. 1986 et 1987 vit les Williams, équipées d'un Honda turbo, dominer la F1... Mais le Français gagna un second titre en 1986, en profitant des luttes fratricides entre Nelson Piquet et Nigel Mansell.
Comme d'habitude, Ron Dennis alla débaucher les meilleurs éléments de la concurrence. A savoir le V6 turbo de Honda. Stefan Johansson manquait d'envergure pour viser la victoire. Dennis le remplaça par un Ayrton Senna qui se sentait à l'étroit dans une Lotus en pleine dérive.

La FIA annonça qu'en 1989, les turbos seraient bannis. Benetton et Williams choisirent de patienter. Quant à Ferrari, c'était un bateau ivre. La mort du Commendatore acheva l'édifice. McLaren avait une autoroute. Les doublés des MP4/4 se succédèrent. A Monza, Ferrari réalisa un incroyable doublé et les tifosi y virent un signe d'Enzo Ferrari, de là-haut. Prost marqua le plus de points, mais avec le décompte alors en vigueur, Senna fut titré !
De 1984 à 1991, McLaren domina la F1. C'était la première fois qu'une écurie décrocha autant de titres pilotes et constructeurs en aussi peu de temps. Puis ce fut l'ère des Williams-Renault.

A l'été 1996, le motoriste au losange annonça son retrait pour fin 1997. Williams devait patienter avec un Mécachrome (un Renault dégriffé), en attendant l'arrivée du bloc BMW pour 1997 1998 un jour. Deux équipes voulurent succéder à Williams, au palmarès. D'un côté, Jean Todt et Michael Schumacher construisirent patiemment une nouvelle Scuderia Ferrari. De l'autre, McLaren profitait des ressources quasi-illimités de son partenaire Mercedes-Benz. Une vraie pluie de Deutsch Mark ! Signe des temps le cigarettier allemand "Ouest" avait succédé à "Rouge et Blanc" comme sponsor. Les voitures furent peintes dans un gris argent évoquant les Mercedes-Benz de Grand Prix des années 30 et 50. Manfred von Brauchitsch et Karl Kling étaient d'ailleurs invités aux présentations...

Cette MP4/13 ne porta pas malheur à l'écurie de Woking. Les "gris" prirent rapidement le dessus. Alors qu'on attendait David Coulthard, fort de son passage chez Williams, c'est le discret Mika Häkkinen qui prit les commandes du championnat. Schumacher fit néanmoins une fin de saison éclatante et le Finlandais s'imposa lors de l'ultime épreuve. Les premiers titres (pilote et constructeur) de McLaren depuis 1991.
Häkkinen récidiva en 1999. Mais ce n'était pas le début d'une nouvelle ère. Car dès 2000, Ferrari reprit la main et de nouveau, McLaren joua les spectateurs.
Fin 2005, l'équipe annonça le recrutement de Fernando Alonso pour 2007. Les observateurs y virent un moyen pour l'Espagnol de lever son majeur à l'intention de Renault. C'était aussi un moyen pour McLaren de mettre ses pilotes, Kimi Raikkonen et Juan Pablo Montoya sous pression. Quelque part, ça a réussi : Gros Pablo explosa à mi-saison et Iceman claqua la porte à l'automne. D'où l'arrivée un peu précipitée de Lewis Hamilton.
2007 fut une drôle de saison. Comme Prost avec Williams, en 1986, Raikkonen profita de la guéguerre entre Alonso et Hamilton pour s'imposer. Et puis, il y eu l'affaire du "stepneygate".
En 2008, Lewis Hamilton s'imposa d'un fil. Le Grand Prix du Brésil fut intense. Felipe Massa (Ferrari) s'imposa. Dans les derniers hectomètres, Timo Glock (Toyota) renonça. Hamilton fut promu 5e, ce qui lui permit d'être titré face au Brésilien !
2009 vit l'apparition du KERS et de nouveaux ailerons. Brawn GP domina la saison. Hamilton, favori, était incapable de les doubler à la régulière. En prime, sa voiture manquait de fiabilité.

Cette McLaren MP4-25 date de 2010. Les "gris" avaient enfin digéré le nouveau règlement. Martin Whitmarsh a succédé à Ron Dennis, personna non grata en F1, après le stepneygate. Comme Dennis en son temps, il recruta le champion en titre, Jenson Button, en faisant fumer la carte bleue...
Ce que personne n'avait prévu, c'était l'éclosion de Sebastian Vettel (Red Bull.) Le pilote Allemand domina la saison. Et la suivante. Et la suivante. Et la suivante...
Pour finir, la MP4/31 de 2016. Entre 1994 et 1996, McLaren n'avait remporté aucune victoire. Cela semblait être une éternité ! Aujourd'hui, il faut remonter à 2012 (Button, au Brésil) pour voir l'équipe de Woking sur la plus haute du podium. Et depuis le double-podium (Kevin Magnussen 2e, Button 3e), en 2014, en Australie, McLaren n'est plus monté sur l'estrade !

Depuis 2014, McLaren se cherche visiblement. L'équipe est marqué par un fort turnover. Mercedes-Benz parti fin 2015. Peu après, Ron Dennis, revenu en 2014, fit ses valises. Avec Honda, Woking devait revenir aux belles années. Il n'en fut rien. Côté pilotes, Sergio Perez remplaça Hamilton. Puis ce fut Magnussen. Tandis qu'Alonso revint en 2015.

Il n'y eu pas de miracles en 2016. Alonso parvint tout juste à arracher deux 5e places, tandis que Button termina 6e. Le Britannique annonça sa retraite sportive en fin de saison. Pour le remplacer, McLaren promu Stoffel Vandoorne, pur produit McLaren.
Dennis n'avait plus qu'un rôle symbolique chez McLaren. Il tenta deux putsch. En vain. Ojjeh finit par l'expédier officiellement à la retraite. Du coup, les châssis des McLaren ne sont désormais plus désignées par "MP4" (McLaren-Project Four, l'écurie de F2 de Denis), mais par "MCL".

Depuis, McLaren et Honda ont divorcé, Alonso a pris sa retraite et Vandoorne a été dégagé. Pour 2019, Carlos Sainz Jr et Lando Norris seront les écuyers de l'équipe, motorisée par Renault. Norris le surdoué sait qu'il joue gros. Le minimum pour garantir son avenir, ce sera de dominer un Sainz n'ayant pas fait grand chose jusqu'ici...

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