D'un Andretti, l'autre

Ce week-end, on fêtait à Phoenix les 25 ans de la victoire de Mario Andretti ; sa dernière en Indycar.

C'était l'apogée d'un trio que tout séparait : Paul Newman, Carl Haas et Mario Andretti.
Le moins connu des trois, c'était Carl Haas. Pilote amateur de GT, il ouvra Carl Haas Automotive Import, au début des années 60. Il fut d'abord l'importateur US d'Elva et des boites Hewland, avant d'obtenir des cartes comme Lola et beaucoup plus tard, Oreca et Sadev. Haas raccrocha discrètement le volant, mais il resta présent comme patron d'écurie. Quelle meilleure démonstration de ses produits que de les faire courir ? Il aligna ainsi des Elva, puis des Lola en endurance. A la fin des années 70, Haas dominait la Can-Am, grâce à des pilotes comme Jacky Ickx ou Patrick Tambay. Mais la Can-Am battait de l'aile et à l'instar de Chaparral, Haas songeait à une reconversion vers le CART...
Faut-il présenter Mario Andretti ? Né dans une Dalmatie encore Italienne, il passa son enfance dans un camp de refugié, avant que sa famille ne parte aux Etats-Unis. Il se fit un nom sur les pistes de terre battue, puis en Nascar et enfin, en Formule Indy. Vainqueur des 500 miles d'Indianapolis 1969, il voulu s'offrir un nouveau défi : la F1. Italien de cœur, il aurait voulu être titré avec Ferrari. Il décrocha la timbale avec Lotus, en 1978. Ensuite, il connu un flottement, avec Alfa Romeo. D'ultimes piges avec Williams et Lotus le convainquirent qu'il avait passé son quart d'heure de gloire. "Mario" revint ainsi à Indy, devenu CART. Mais entre les frères Unser, AJ Foyt ou Johnny Rutherford, le CART ne manquait pas de stars et Mario du se refaire sa place au forceps...
Paul Newman, lui, était un acteur Hollywoodien. James Dean tenta de le draguer. Après la mort de ce dernier, Newman récupéra des rôles qui lui était destiné. Peut-être que dans un univers parallèle, James Dean a tourné Exodus ou Butch Cassidy et le Kid... En 1969, il apparu dans Virages où il jouait un pilote de course. Mario Andretti fut appelé par Ford pour le doubler sur les scènes de course. Néanmoins, Newman eu droit à un cours de pilotage. Newman eu envie d'être pilote de course. Ca tombait bien, car dans les années 70, les rôles se raréfièrent. Hollywood cherchait des "gueules", des acteurs pour des films où il n'y avait plus de "gentils" et de "méchants". Il était trop beau pour cela ! Tandis que Steve McQueen cherchait à tourner malgré tout (qui a faire des séries B avec Chuck Norris), Newman lui, joua la rareté. Datsun cherchait des pilotes pour la SCCA et Newman sauta le pas. Il démontra qu'il n'était pas juste "une star" et il acquit le respect du paddock. Aux 24 heures du Mans, il pilota une Kremer K3 et termina 2e. Il racontait qu'à chaque relais, il était mitraillé par les photographes. En parallèle, il cofonda une écurie de Can-Am, avec Bill Freeman. L'occasion de croiser Carl Haas.
En 1983, Haas voulait faire de l'Indycar avec un pilote tout juste retraité de la F1 : Mario Andretti. Il avait un sponsor, l'entreprise d'agroalimentaire Beatrice. Il lui fallait un nom bien ronflant et il contacta Newman... Qui dit d'emblée oui. L'Indycar était alors presque une coupe monotype March. Newman-Haas alignait l'unique Lola du plateau. Ce qui n'empêcha pas Mario Andretti de s'imposer en 1984 et de frôler une victoire aux 500 miles d'Indianapolis 1985. Grâce à cela, d'autres équipes voulurent des Lola (qu'ils achetaient donc à Carl Haas Automotive Import.) En 1989, l'équipe pu grandir avec une deuxième voiture, pour Michael Andretti. Le fils de Mario s'imposa en 1991. Mais pour son père, ce n'était pas assez : il fallait s'imposer aussi en F1. Andretti Jr effectua ainsi un passage pitoyable chez McLaren, en 1993. Pour le remplacer, Haas s'offrit Nigel Mansell, tout juste champion de F1 ! En 1993, le Britannique offrit un troisième titre à Newman-Haas. "Mario" raccrocha fin 1994. On parlait d'une mésentente avec Mansell. Mais Foyt, Rutherford et les frères Unser avaient raccrochés. Andretti Sr se sentait peut-être un peu trop vieux et on dit que physiquement, il avait de plus en plus de mal...
Mansell retourné -brièvement- en F1, Newman-Haas repris Michael Andretti et elle embaucha Paul Tracy -vite débauché par Penske-. Andretti, bouffi et démoralisé, n'était plus le golden boy de la fin des années 80. Lola s'est perdu dans un projet F1 et Carl Haas tenta l'aventure Swift. Paul Newman ne voulait pas de l'IRL, avec son côté "red neck". Sauf qu'en CART, Newman-Haas était débordé par des équipes comme Penske, Chip Ganassi, Rahal ou Green. Après tout, à l'instar de Newman-Haas, elles misaient sur des pilotes en mal de F1 et un lien étroit avec un constructeur de châssis ou de moteur. En 2002, Newman-Haas s'imposa de nouveau, avec Christano da Matta et grâce à Toyota... Qui embarqua le pilote en F1, dans la foulée ! Paul Newman se battit pour avoir Sébastien Bourdais (pas facile de faire venir un Français au USA, en pleine francophobie pré-invasion de l'Iraq...) Le Français décrocha quatre titres, mais l'opposition était limitée. Penske et Ganassi étaient partis en Indycar (ex-IRL.) Michael Andretti raccrocha le casque pour devenir coactionnaire puis patron de Green (qui devint alors Andretti), qui enchaina les titres en Indycar... Ce fut l'heure de Marco Andretti. Le fils de Michael -et petit-fils de Mario- effectua un début de carrière tonitruant. Honda lui offrit même un test en F1.
En 2008, contrainte et forcée, l'écurie Newman-Haas du passer à l'Indycar. Bourdais parti en F1, l'équipe fit confiance à Justin Wilson, puis à James Hinchcliffe, mais les budgets étaient toujours plus difficiles à boucler. L'équipe ferma ses portes fin 2011. En 2012, l'équipe failli effectuer un baroud d'honneur, avec Jean Alesi. Mais Carl Haas jugeait qu'il manquait de temps pour bien préparer "Indy".

Et donc, à Phoenix, Marco voulait rendre hommage à son grand-père. Paul Newman est mort d'un cancer en 2008. Carl Haas est mort en 2016 de la maladie d’Alzheimer. K-Mart, LE sponsor de Newman-Haas, est cliniquement mort. Quant à Marco Andretti, l'ex-futur pilote de F1, il n'a jamais confirmé. Sans papa Andretti, nul doute qu'il aurait disparu des paddocks depuis longtemps... Qualifié 20e, il termina 12e, à un tour, sans jamais s'être mêlé aux hommes de tête. Un triste hommage, donc...

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