MINI : BEYOND THE CAR

 

Pas de salon Maison & Objet, cette année, pour cause de coronavirus. La Paris Design Week assure de facto l'intérim. Même si ces deux évènements n'ont pas du tout le même objectif. MINI succède à Citroën, comme sponsor et comme la firme aux chevrons, il a posé ses quartiers à la Galerie Joseph.

L'an dernier, Citroën avait profité de la Paris Design Week pour dévoiler l'e-Mehari Design by Courrèges. MINI, de son côté, n'expose aucune voiture. Il n'y a même pas une silhouette de MINI à l'intérieur de la galerie !

Une MINI est garée juste en face des lieux, mais elle ne fait pas parti de l'exposition.

Le discours de MINI, c'est qu'ils vont "beyond the car". Il s'agit de "réfléchir à une conciliation du design et de l'humain."

Ils veulent prendre beaucoup de recul par rapport à l'automobile. Y compris par rapport aux constructeurs qui veulent devenir fournisseurs de "solutions de mobilité".

L'un des exemples de réalisation, c'est MINI Living, un espace de coworking, à Shanghai, dans une ancienne usine de peinture. Si j'avais à citer des choses qui pouvaient s'articuler autour de l'univers MINI, "espace de coworking" ne serait pas ma première réponse. Ni ma dixième.

Voyons le bon côté des choses. Jusqu'ici, la Chine gérait mal son patrimoine architectural. Dans la plupart des cas, il n'y a aucune réflexion : c'est vieux, donc ça doit être rasé, point. Chaque édifice rasé est marqué d'un "拆" (déconstruire.) Des parcelles de la taille d'une ville française moyenne sont ainsi complètement balayés. Du coup, les Chinois habitants en périphérie des villes ne font aucun effort pour mettre en valeur leur quartier. Pas de ravalement ou de réfection ; de toute façon, tout sera rasé tôt ou tard. Et si un site trouve grâce aux yeux des autorités, ils en expulsent les habitants et décrètent que c'est désormais un musée à ciel ouvert.

Que MINI veuillent introduire une notion de valorisation et de reconversion de l'existant, on ne peut qu’applaudir.

La Paris Design Week, c'est avant tout des designers qui exposent leurs créations.

Visiblement, la tendance 2020, c'est le retour à des matériaux bruts, à des formes simples, sans fanfreluches.

Parfois, on aurait l'impression que l'installation n'est encore pas terminée...

Je pense que c'est à la croisée de deux nouvelles tendances.

D'une part, il y a un aspect économique. Avant, c'était l'ultra-consumérisme. Acheter des produits sur Amazon ou Ali Express, parce qu'on a été envouté par le Blue Monday, le Black Friday ou je-ne-sais-quelle journée de promotions exceptionnelles. On se sert à peine du produit. De toute façon, il est vite cassé, car c'est du made in China. Mais ce n'est pas grave car dans 3 mois, il y a un nouveau gadget à la mode. Et une nouvelle promotion.
Ce modèle était valable lorsque votre salaire est un acquis. Depuis, il y a eu une crise économique, accompagnée de chômage partiel, voire de chômage tout court. Vous y réfléchissez donc à deux fois avant de sortir votre Carte Bleu ! Et lorsque vous le faites, c'est pour obtenir un produit durable, quitte à le payer plus cher. Et le milieu de gamme, ce n'est pas le rayon des usines du Delta des Perles...

Le second, c'est l'aspect patriotique. Depuis un demi-siècle, le contrat social, c'est qu'il fallait accepter la perte de moyens de production (notamment dans l'informatique, la téléphonie, l'électronique grand public, le textile...) au profit des pays low-cost. Ces pays seraient capable de produire à des coûts moindres et en mutualisant les besoins occidentaux, ils pourraient développer la recherche. Grâce à cela, vous avez des TV à écran plasma pour 150€. C'est un marché gagnant-gagnant.
Mais lors de la crise du coronavirus, les occidentaux ont réalisé que même la production de masques, de blouses ou de doses de tests était désormais dépendante du bon vouloir de la Chine. Et que les pays occidentaux en étaient à s'écharper sur le tarmac des aéroports pour pouvoir équiper leurs concitoyens ! Non seulement le roi est nu, mais ses sujets le sont aussi !
Le discours de la mondialisation heureuse est donc caduc. Il existait déjà une mise en avant de l'origine française dans l'agro-alimentaire. Aujourd'hui, dans les publicités, on voit désormais également cette mise en avant dans le secteur hygiène-santé. Cette aspiration pourrait s'étendre à d'autres secteurs.

Les objets de la Paris Design Week, conçu en France, fabriqué en France et plus durables (dans le sens de la solidité) sont en plein dans la cible.

Après, pour produire français, il faut de quoi remplir les usines. On a besoin d'agronomes, de tourneur-fraiseurs, de tôliers, de soudeurs, d'ébénistes, de mécaniciens, d'électroniciens, de projeteurs CATIA, de codeurs, de laborantins, de chercheurs, etc. Bref, de talents avec des profils techniques.
C'est vrai que l'industrie, ce n'est pas très sexy. Taiichi Ohno évoquait déjà, il y a un demi-siècle, comment la jeune génération boudait ces postes. Il parlait de job 3K : 汚い, sale, きつい, pénible et 危険, dangereux. D'ailleurs, 汚い comprend l'idée d'avilissant. Personnellement, je peux en témoigner, lorsqu'en 3e, j'annonçais que je m'orientais vers un lycée technique, j'étais déconsidéré. Et jusqu'à la fin de ma scolarité, j'ai subit cette condescendance.
Mais ce sont aussi des métiers avec davantage de passion. Votre produit, il prend vie devant vous. Après coup, les techniciens vous reparlent de telle affaire, de telle réalisation. Même une fois la blouse troquée pour un costume-cravate, ils ne peuvent s'empêcher de toucher les produits et de les détailler. Alors que dans le tertiaire, j'ai davantage l'impression qu'on vit au jour, le jour.

Alors si vous ou vos enfants se questionnent sur leur orientation et songent à des filières techniques, n'hésitez pas ! On ne fait pas un choix de vie juste pour faire plaisir à ses camarades de classe !

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