COLLECTION GERALD BUGNON, 9 ALFA ROMEO D'EXCEPTION
Une vente un peu particulière, chez Osenat, à Fontainebleau. La collection d'Alfa Romeo de Gerald Bugnon.
Gerald Bugnon est devenu alfiste par accident. N'étant plus capable de s'occuper de ses voitures, il revend ses Alfa Romeo "historiques".
Neuf voitures, ce n'est pas beaucoup. Osenat a décidé de meubler avec quelques unes des voitures qui seront vendues à Paris, la semaine prochaine. Ainsi que des anciennes sorties d'un peu nul part.
L'entrée fait très "négociant d'anciennes générique".
On commence par une Austin-Healey 3000. L'alliance des moyens d'un grand constructeur -Austin- et du grand de folie d'un ingénieur indépendant -Donald Healey-. Avec Jensen également présent autour du berceau.
Une voiture géniale. L'AC Ace, mais en mieux ! Par contre, ce n'est pas hyper original. Et en blanc, elle perd de sa superbe.
Une VW-Porsche 914 2.0. Depuis la fin de la production de la 356, Porsche songeait à une "petite Porsche". Volkswagen, lui, souhaitait remplacer la vieillissante Karmann-Ghia. J'ai déjà évoqué cette fausse bonne idée.
La 914 fut longtemps une Porsche maudite. Elle sort lentement des limbes. Ici, on a un exemplaire customisé, avec des autocollants. Je suis également dubitatif sur les jantes Fuchs (n'étaient-elles pas réservées aux 914/6 ?) Le propriétaire a voulu créer "sa" 914. C'est le genre de voitures qui trainaient dans les annonces d'Auto-Rétro, il y a une quinzaine d'années.
Une MG Midget Mk III, reconnaissable à sa calandre. Parmi les "Spridget", en terme de look, je préfère la "Frogeye" et la Mk IV. Pourtant, la Mk III est la plus aboutie de la lignée.
Au début des années 70, BL se décidait enfin à abandonner l'idée de proposer une même voiture sous plusieurs badges... Les Américains continuèrent jusque dans les années 2000. Oui, mais les trois grands possédaient plusieurs réseaux de vente. Alors que BL avait une politique de réseau unique ! Austin-Healey, qui n'était qu'une excroissance d'Austin, fut sacrifiée au profit de MG. De toute façon, la Midget devait désormais supporter la concurrence interne de la Triumph Spitfire...
Voici la voiture par laquelle tout a commencé. Gerald Bugnon s'est fait doubler par une Giulietta TI, ça l'a tellement impressionné qu'il voulu en savoir plus sur Alfa Romeo. Et il finit par acheter des Alfa Romeo. Dont cette Giulietta TI, de 1958.
La diffusion d'Alfa Romeo était alors très confidentielle. Cela poussa la marque Milanaise à se rapprocher de Renault. De l'accord, on se souvient surtout des Ondine/Dauphine produites à Milan. Mais il y eu d'autres modèles qui franchirent les Alpes... Surtout, en contrepartie, Renault devait distribuer les Alfa Romeo en France. Ce qui ne se fit jamais, a priori. D'où l'abandon de l'accord.
Il y en a une seconde à vendre... Au 1/12e. Pour une miniature ancienne, elle est extrêmement détaillée. On est au niveau des miniatures des années 2000. Compte tenu des processus industriel des années 50, produire une telle miniature coûtait une fortune.
Juste avant la seconde guerre mondiale, la firme milanaise avait entamé la transition vers la moyenne série avec la 6C 2500. L'IRI voulu accélérer le mouvement, avec la 1900, puis avec une compacte. La 1900 avait été dévoilé au salon de Paris 1950. Un invité aurait lancé une boutade : "Vous êtes Alfa Romeo, où est votre Juliette ?" Les cadres auraient trouvé que "Giulietta" (Juliette) sonnait très bien. La TI fut la première monocoque de la marque et le premier modèle produit en très grande série.
Chez Alfa Romeo, les années 50 furent celles de la monoculture Giulietta. A l'instar de ses compatriotes Fiat et Lancia, la firme de Milan sous-traitait ses dérivés coupés et cabriolets (alias "Sprint".) Chacun des sous-traitants s'occupants à la fois du dessin et de la production. Bertone hérita du coupé et [Pinin]Farina, du spider. Voilà pourquoi elles partagent si peu d'éléments d'aspects commun (au grand dam des restaurateurs.)
La plupart des généralistes des années 50-60 travaillaient étroitement avec des artisans. Les Français restaient tout de même très sage. Les Italiens, eux, n'hésitaient pas à distribuer les créations de tiers dans leur réseau. Alfa Romeo y voyait sans doute un moyen d'étendre sa gamme vers le haut, faute d'arriver à écouler ses modèles 6 cylindres.
Franco Scaglione, déjà auteur de la Giulietta Sprint (coupé) et de la série B.A.T., dessina cette Giulietta Sprint Special, en 1957. C'était un véritable concept-car produit en petite série !
En parallèle, il y eu une recherche de performance. Zagato se procura une Giulia Sprint accidentée. Il la recarrossa dans un style effilé. La Sprint Veloce Zagato (1956.) Elle évolua en 1960 en Sprint Zagato (SZ), alias "Conda Tonda". C'était avant tout une voiture de compétition-client.
L'exemplaire d'Osenat couru un peu en rallye, à sa sortie d'usine. Elle fut surtout utilisée en VHC, au début des années 80.
Une seconde SZ. Celle-ci est "Conda Tronca" et il suffit de regarder l'arrière pour le comprendre. Le style effilé, c'est bien, mais dans les enchainements de virages, l'arrière vous embarque. D'où l'idée d'un découpage net... Sauf que paradoxalement, cette Conda Tronca possède davantage de porte-à-faux.
La voiture date de 1963 et c'était l'une des ultimes Giulietta.
Avec l'arrivé de la Giulia, Zagato changea de braquet. La filiation esthétique entre la SZ et la TZ saute aux yeux. Mais techniquement, ce sont deux voitures différentes. "TZ" signifie "Tubolare Zagato". Au lieu d'avoir recarrossé une voiture de série, Zagato a commandité un châssis tubulaire inédit. La voiture fut assemblée chez Delta, qui allait bientôt devenir Autodelta...
Les pions se mirent en place petit à petit. Delta devint Auto-Delta, avant de perdre son tiret au rachat par Alfa Romeo, en 1963. La TZ évolua en TZ2, qui était alors un vrai petit proto. Alfa Romeo (s')investi et en 1967, place à un vrai proto à V8 2l, la 33. Nous étions à la grande époque des courses de côte et c'est ainsi à Fléron, en Belgique, que la 33 débuta.
Dès 1968, la 33/2 débarqua et il s'agissait cette fois d'un proto fermé -le seul de la lignée-. La Milanaise jouait la catégorie 2l en championnat du monde. En 1969, l'ACO et la CSI interdire les gros protos. Alfa Romeo comprit qu'il avait un coup à jouer en réalésant son V8 à 3l. La 33/3 revint à la carrosserie ouverte. Même si le succès était encore loin. Les 33/2 furent revendues à la SAFOR, l'importateur Français, pour courir en championnat national.
Cette 33/2 ex-SAFOR est le joyau de la collection de Gérald Bugnon, donc de la vente. On sent l'inspiration des protos contemporains : Porsche 906 et Ferrari 330. Avec les prémices du travail aérodynamique, via des coques de phares en plexiglas, les rétroviseurs profilés ou les ailettes, au bout des flancs.
Pendant ce temps, la Giulietta tirait sa révérence. Alfa Romeo avait prévu deux remplaçantes : un modèle plus petit et un modèle plus grand. Fiat fit du lobbying face à l'état Italien, alors propriétaire d'Alfa Romeo. La petite 103 fut placardisée (et revendue à Renault pour donner la R8 ?) La firme Milanaise poursuivit la monoculture avec le "modèle plus grand", la Giulia. De nouveau, le coupé fut sous-traité à Bertone et le cabriolet, à Pininfarina. Mais ils étaient davantage distincts de la berline. Au point où le nom de "Giulia Sprint" fit long feu ; le coupé évolua en Junior/GT/GTA/GTAm/GTV. Par commodité, on le désigne par "coupé Bertone".
Ici, on serait face à l'une des 500 GTA "Stradale" ayant servi à l'homologation en prototype... Mais elle fut ensuite coursifiée, dans un style VHC générique.
Voilà pour les neuf Alfa Romeo.
Osenat met également à la ventes des affiches, des maquettes et divers moteurs. Le plus étonnant étant ce 6C 2500 Marino. Comme son nom l'indique, c'était un moteur marin.
Les moteurs d'avions d'Alfa Romeo sont relativement connus. En revanche, peu de gens savent qu'il y a eu des Alfa Romeo sur l'eau. En 1940, l'Italie fasciste lança un programme de construction de canots explosifs (MTM.) L'idée était d'utiliser des bateaux rapides, pour des objectifs marins. Une flottilles de canots repéraient un objectif. Le pilote mettait la gomme, puis il bloquait le cap et il s'éjectait sur un canot pneumatique. L'avant du bateau était bourré d'explosif. Lorsqu'il percutait un bateau ennemi, la charge explosait. Pour cette mission, elle sélectionna la plus puissante des mécaniques de série : le 6 cylindres 2,5l Alfa Romeo, dérivé des mécaniques de Grand Prix. Notez qu'il était accouplé à une transmission Isotta-Fraschini, histoire de rester dans l'automobile de luxe.
Le hall d'exposition était très vide. Alors Osenat y a mis plusieurs voitures de sa future vente parisienne. Dont ce trio de cyclecars.
Puis il y a ces voitures, annoncées nul part et ne figurant dans aucun catalogue, à l'instar des trois sportives dans l'entrée. Une (vraie ?) Auburn 1935, une Rochet-Schneider 1918 et une Rolls-Royce "Springfield" (Silver Ghost ?) En plus, Osenat a été généreux sur les cordelettes. Impossible de s'approcher...
En bonus, sur le parking, une rare Jaguar XJ12C et une Citroën Ami 6 break.
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