La désincarnation des grandes organisations
Fini les histoires de Zhengzhou, retour à Paris ! On commence avec La désincarnation des grandes organisations, de Bertrand Rakoto. Un livre consacré aux constructeurs Français et comment leur management se sont enfermés dans une tour d'ivoire.
Quand j'ai lu cet article de La Tribune, je me suis immédiatement connecté sur Amazon pour acheter l'ouvrage ! Après, en tant qu'acheteur, ayant travaillé pour Renault, en tant que prestataire, je suis forcément tenu à un devoir de réserve sur ces trois sujets... Donc forcément, ça sera compliqué d'en parler.
Je pense que la critique vaut pour tous les constructeurs généralistes, y compris hors d'occident (avec des nuances, bien sûr.)
Jusque dans les années 90, les généralistes étaient souvent monomarques. Ils s'étaient en revanche diversifié dans les poids-lourd, les autocars, les tracteurs agricoles, les équipements automobile... Ils disposaient d'un écosystème : des designers (qui prenaient en charge coupé, cabriolets, breaks...), des sous-traitants, des partenaires pour les pays émergents, des artisans (auxquels ils vendaient des éléments mécaniques.)
Puis les constructeurs se sont recentré sur les voitures particulières et les utilitaires légers, vendant le reste. Ils ont racheté des marques d'entrée de gamme, des marques premium, voire de luxe et des marques régionales (Europe de l'Est, Asie du Sud-est...) L'écosystème, lui, il a disparu. Les entreprises satellites ont été rattachées aux constructeurs (notamment les usines dans les pays émergents) ou bien liquidées (cf. Bertone, Heuliez, Matra, Chausson...) On voit bien la limite de ces groupes tentaculaires et souvent très bureaucratiques.
Je suis d'accord avec les limites de la financiarisation. Les temps de l'automobile est très long. Actuellement, les usines ont des planning qui courent jusqu'en 2025, avec des modèles qui se termineront en 2027, voire 2028 (hors utilitaires et long-life.) Il faut 5 ans pour lancer une voiture. Alors les PDG brassent du vent. Ils font des annonces qui n'engagent que ceux qui y croient. Ils se félicitent des résultats de plans d'actions dont les effets ne se font pas encore sentir.
La conséquence de cette financiarisation est que l'aventurisme est sanctionné. Les groupes préfèrent suivre la meute. Les sociétés de conseils et d'études sont là pour vendre leurs travaux. Or, les bonnes nouvelles se vendent mieux, c'est bien connu... Le marketing a sans doute une importance démesurée. Par définition, l'avenir est incertain. Pourtant, on n'est plus comme dans les années 80, où un modèle et une région représentait l'essentiel du chiffre d'affaires. La plupart des groupes ont deux ou trois têtes de gondole, deux ou trois régions phares. Ils pourraient s'offrir le luxe de l'audace (au pire, le reste de la gamme compensera.) Mais non. Le rêve des constructeurs, c'est le client pris à la concurrence. On lui refile des options, des packs d'équipements et des accessoires qui gonflent la note (et sur lesquels constructeurs et réseaux se gavent) -c'est l'école VW-. Puis, au bout de 4 ans, il s'est pris un contrôle technique (où comme par hasard, il y avait des choses à revoir), donc il revient pour remplacer son tacot -c'est le modèle iPhone de l'obsolescence programmée-. Sauf que si tout le monde papillonne, cela veut dire que vos clients aussi, ils risquent de partir à la concurrence ! Et votre client qui a payé 20 000€ pour une voiture au bout du rouleau à 60 000km, il ne va pas revenir !
Et si les constructeurs le faisait exprès ? Qu'ils n'ont pas envie d'avoir un modèle trop encombrant ? L'auteur n'évoque pas cette piste et c'est dommage. Un modèle qui explose les scores, il bouleverse le planning des usines, parce qu'il a besoin de davantage de moyens. Et puis, sa durée de vie sera plus longue, donc sa remplaçante sera retardée (avec le risque d'être démodée.) Et puis, ce n'est jamais facile de remplacer un best-seller, les constructeurs accusent le coup ensuite (cf. VW avec la Coccinelle, Peugeot avec la 205...) Donc mieux vaut des voitures interchangeables, qui respectent leurs prévisions. Pas plus, pas moins.
Les constructeurs ne comprennent pas que l'air de rien, l'automobile bouge imperceptiblement. Tata, Tesla ou Geely n'étaient rien, il y a 10 ans. La nature a horreur du vide. Hyundai a profité du tassement des ventes des Japonaises. Toyota est devenu le roi de l'hybride. Byd pourrait devenir le roi de l'électrique. Les marques premium ont chassé les généralistes du segment E, puis du segment D. Aujourd'hui, ils se battent pour le segment C. Rover a montré que le N°1 Européen d'avant-hier peut finir par couler avec armes et bagages. Alors les dirigeants de groupes feraient bien de virer leurs yesmen et de regarder par la fenêtre...
Quand j'ai lu cet article de La Tribune, je me suis immédiatement connecté sur Amazon pour acheter l'ouvrage ! Après, en tant qu'acheteur, ayant travaillé pour Renault, en tant que prestataire, je suis forcément tenu à un devoir de réserve sur ces trois sujets... Donc forcément, ça sera compliqué d'en parler.
Je pense que la critique vaut pour tous les constructeurs généralistes, y compris hors d'occident (avec des nuances, bien sûr.)
Jusque dans les années 90, les généralistes étaient souvent monomarques. Ils s'étaient en revanche diversifié dans les poids-lourd, les autocars, les tracteurs agricoles, les équipements automobile... Ils disposaient d'un écosystème : des designers (qui prenaient en charge coupé, cabriolets, breaks...), des sous-traitants, des partenaires pour les pays émergents, des artisans (auxquels ils vendaient des éléments mécaniques.)
Puis les constructeurs se sont recentré sur les voitures particulières et les utilitaires légers, vendant le reste. Ils ont racheté des marques d'entrée de gamme, des marques premium, voire de luxe et des marques régionales (Europe de l'Est, Asie du Sud-est...) L'écosystème, lui, il a disparu. Les entreprises satellites ont été rattachées aux constructeurs (notamment les usines dans les pays émergents) ou bien liquidées (cf. Bertone, Heuliez, Matra, Chausson...) On voit bien la limite de ces groupes tentaculaires et souvent très bureaucratiques.
Je suis d'accord avec les limites de la financiarisation. Les temps de l'automobile est très long. Actuellement, les usines ont des planning qui courent jusqu'en 2025, avec des modèles qui se termineront en 2027, voire 2028 (hors utilitaires et long-life.) Il faut 5 ans pour lancer une voiture. Alors les PDG brassent du vent. Ils font des annonces qui n'engagent que ceux qui y croient. Ils se félicitent des résultats de plans d'actions dont les effets ne se font pas encore sentir.
La conséquence de cette financiarisation est que l'aventurisme est sanctionné. Les groupes préfèrent suivre la meute. Les sociétés de conseils et d'études sont là pour vendre leurs travaux. Or, les bonnes nouvelles se vendent mieux, c'est bien connu... Le marketing a sans doute une importance démesurée. Par définition, l'avenir est incertain. Pourtant, on n'est plus comme dans les années 80, où un modèle et une région représentait l'essentiel du chiffre d'affaires. La plupart des groupes ont deux ou trois têtes de gondole, deux ou trois régions phares. Ils pourraient s'offrir le luxe de l'audace (au pire, le reste de la gamme compensera.) Mais non. Le rêve des constructeurs, c'est le client pris à la concurrence. On lui refile des options, des packs d'équipements et des accessoires qui gonflent la note (et sur lesquels constructeurs et réseaux se gavent) -c'est l'école VW-. Puis, au bout de 4 ans, il s'est pris un contrôle technique (où comme par hasard, il y avait des choses à revoir), donc il revient pour remplacer son tacot -c'est le modèle iPhone de l'obsolescence programmée-. Sauf que si tout le monde papillonne, cela veut dire que vos clients aussi, ils risquent de partir à la concurrence ! Et votre client qui a payé 20 000€ pour une voiture au bout du rouleau à 60 000km, il ne va pas revenir !
Et si les constructeurs le faisait exprès ? Qu'ils n'ont pas envie d'avoir un modèle trop encombrant ? L'auteur n'évoque pas cette piste et c'est dommage. Un modèle qui explose les scores, il bouleverse le planning des usines, parce qu'il a besoin de davantage de moyens. Et puis, sa durée de vie sera plus longue, donc sa remplaçante sera retardée (avec le risque d'être démodée.) Et puis, ce n'est jamais facile de remplacer un best-seller, les constructeurs accusent le coup ensuite (cf. VW avec la Coccinelle, Peugeot avec la 205...) Donc mieux vaut des voitures interchangeables, qui respectent leurs prévisions. Pas plus, pas moins.
Les constructeurs ne comprennent pas que l'air de rien, l'automobile bouge imperceptiblement. Tata, Tesla ou Geely n'étaient rien, il y a 10 ans. La nature a horreur du vide. Hyundai a profité du tassement des ventes des Japonaises. Toyota est devenu le roi de l'hybride. Byd pourrait devenir le roi de l'électrique. Les marques premium ont chassé les généralistes du segment E, puis du segment D. Aujourd'hui, ils se battent pour le segment C. Rover a montré que le N°1 Européen d'avant-hier peut finir par couler avec armes et bagages. Alors les dirigeants de groupes feraient bien de virer leurs yesmen et de regarder par la fenêtre...
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