Graff Racing : un peu d'histoire...
Il y a une semaine, j'étais invité à l'inauguration des nouveaux locaux du Graff Racing, en région parisienne. Dans mon esprit, le Graff Racing était encore basé à Chinon ! En tout cas, en tant que fan de Formule Ford, j'étais tout excité d'y aller. Je m'en suis remis à mon GPS... Me voilà sur l'A6, sortant juste après Orly. Puis c'était une banlieue pavillonnaire. Le GPS me disait que la destination était à moins d'un kilomètre, pourtant, pas le moindre atelier à l'horizon ! Aïe aïe aïe, ça commençait mal... Puis, au dernier moment, les maisons laissent place à des entrepôts et à l'endroit indiqué, une enseigne "Graff" surgit. A côté d'une enseigne "Trouillet", tout un symbole...
L'entrée est tapissé de cadre racontant l'historique du Graff Racing. L'occasion de parler de cette glorieuse écurie.
Jean-Philippe Grand porte bien son nom. Fils d'un patron de PME, il fut mis en internat, au Mans. C'était là, en observant les 24 heures du Mans, qu'il attrapa le virus. Il s'acheta une R8 Gordini, en 1972 et disputa des courses de côte. En 1977, il faillit disputer les 24 heures du Mans, sur la Porsche 911 d'Yves Courage. En 1980, il réalisa son rêve, au volant d'une Chevron (aux côtés d'Yves Courage.) En 1981, toujours avec Courage, il remporta sa classe. Puis, en 1982, il pilota la toute première voiture créée par Courage, la Cougar et il eu même droit à des sorties en championnat du monde d'endurance.
Au début des années 80, Grand était un pilote un peu gentleman-driver (il travaillait dans l'entreprise familiale), mais avec le coup de volant d'un pro. Champion de France circuit 1982 et 1983 avec une Lola, on lui proposa de disputer le tout premier championnat de Formule Ford, en 1984. Il le remporta avec une Rondeau (une Reynard assemblée en France.)
Grand se prit au jeu. Avec l'aide de Jacky Ickx et Ken Tyrrell, il prépara une F3000, en 1985. Il disputa trois meetings, mais ne se qualifia qu'une fois. A 31 ans, il se rendit compte qu'il était trop vieux et qu'il manquait de moyens pour viser la F1.
Ce fut la fin de ses ambitions de pilotes, même s'il couru les 24 heures du Mans jusqu'en 1991.
Avec le journaliste François Fayman, il transforma sa structure informelle en vraie écurie : le Graff Racing (GRAnd-François Fayman.) Jacques Goudchaux lui apporta un premier sacre, en 1986. A l'époque, c'était encore une discipline pour gentlemen-drivers. Mais alors que la Formule Renault était noyautée par La Filière Elf, des espoirs "non-Elf" comme Eric Helary ou Laurent Aïello s'orientèrent vers la FF. Avec William David (1989) et Jean-Christophe Bouillon (1990), le Graff prit le train de la professionalisation.
Fort de ses succès en FF, le Graff fit des incursions en Formule Renault et en F3. Christophe Bouchut lui offrit un premier titre en F3, en 1992.
Le championnat de France de Formule Ford était à son apogée. Le Graff y faisait figure d'épouvantail. A partir de 1992, l'équipe devint invincible. Souvent, le champion s'imposait devant un autre pilote Graff, qui s'imposait la saison suivante...
Le Graff Racing revint en F3 et en Formule Renault. En championnat de France de F3, Elf était en train de lâcher ses équipes, Winfield et Promactème. Serge Saulnier (Promactème) parti en Grande-Bretagne, avec Renault UK. Il fit débuter un certain Jenson Button... Le cahier du championnat de France 1995 s'ouvrait sur Winfield et Promactème, puis sur la double-page suivante, on trouvait le Graff Racing, LD Autosport et Action Sport & Moteurs Technik (ASMT, renommé peu après ASM), avec, en 5e page, la Signature du privée Philippe Sinault... Les deux premiers disparus, les quatre autres prirent le pouvoir...
Soheil Ayari remporta le titre de champion de France 1996. Grand songea à l'accompagner en F3000. Le Français revint chez Graff, en F3, le temps du Grand Prix de Macao 97, où il s'imposa devant son équipier Patrice Gay. Ce doublé fut LE temps-fort du Graff Racing.
Puis les formules de promotion furent marquées par une nouvelle ère. Des championnats européens apparaissaient (Open Nissan, FR V6, Euro F3000, Formule BMW...) Les sponsors institutionnels (pétroliers, cigarettiers...) jetaient l'éponge. Or, ils avaient l'habitude de sponsoriser plusieurs équipes dans plusieurs disciplines, durant plusieurs saisons. Les nouveaux-venus (boissons énergisante, téléphonie, paris sportifs...) ne sponsorisaient qu'une seule équipe, mais ils exigeaient d'elle qu'elle soit présente dans plusieurs disciplines. Mais il suffisait d'un conseil d'administration pour que le robinet soit coupé aussi sec.
Jean-Philippe Grand se tâtait. Le Graff Racing employait 50 personnes. Grossir, c'était risquer de fermer la boite au moindre retrait de sponsor. Et puis, il n'avait pas le côté "politique" d'un Frédéric Vasseur (repreneur d'ASM, qu'il allait transformer en ART Grand Prix), d'un Sinault ou d'un Saulnier.
Le Graff Racing se concentra sur les coupes nationales. Michel Lecomte, son bras droit, prit un parti de l'équipe sous son aile. Il disputa l'Open Nissan sous la bannière "Epsilon by Graff", puis "Epsilon Euskadi", en 2002.
Les premières années semblèrent donner raison aux ambitieux. En 1998, Ford abandonna la Formule Ford et le niveau baissa très vite. En 2002, le championnat de France de F3 fut absorbé par son homologue allemand pour former l'Euro F3. Le Graff Racing se retrouva acculé en Formule Renault, jusqu'à la disparition du championnat de France, en 2007.
Après un retour en endurance, à la fin des années 90, le Graff Racing rebondit en Carrera Cup et en GT Tour. Kevin Estre, l'un de ses derniers pilotes de Formule Renault, fut du voyage en Carrera Cup.
En GT Tour, Grand (et d'autres, notamment Olivier Panis) se plaignirent des règlements à la tête du client. En 2008, il prit sa pré-retraite. Jean-Louis Oger, qui a fait fortune dans le secteur médical, prit la suite.
Ce fut une période de tempête. En 2011, le Sébastien Loeb Racing fit une offre pour racheter les infrastructures du Graff Racing. Oger se plaignit d'un prix trop bas. Jean-Noël Lanctuit, ancien pilote Graff en GT, fit une offre de reprise. L'activité se poursuivit, mais cette fois Grand prenait définitivement sa retraite. Il réapparu au Mans Classic.
Sans le savoir, j'ai immortalisé Grand, lors d'un de ses tout derniers meeting en tant que gérant du Graff Racing, à Dijon :
Le projet de Lanctuit fit long feu. Pascal Rauturier, un mécano monté en grade, chercha un repreneur. Ce fut Eric Trouillet, héritier du groupe éponyme (transport, location d'utilitaires et construction de remorques PL), gentleman-driver à ses heures. Le Graff Racing retrouva de la stabilité. L'équipe s'offrit une Norma et une Ligier LMP3, disputant avec le V de V et l'ELMS. Au passage, elle déménagea à Morangis, fief de Trouillet.
Personnellement, je suis surtout la monoplace. Lors de mon bref passage chez V de V, on me demanda de rédiger un communiqué sur le Graff Racing. Je pensais que l'équipe avait disparu, à l'instar d'Epsilon ou de LD Autosport ! Et pourtant, ils étaient là... Je les ai même immortalisé à Magny-Cours :
L'entrée est tapissé de cadre racontant l'historique du Graff Racing. L'occasion de parler de cette glorieuse écurie.
Jean-Philippe Grand porte bien son nom. Fils d'un patron de PME, il fut mis en internat, au Mans. C'était là, en observant les 24 heures du Mans, qu'il attrapa le virus. Il s'acheta une R8 Gordini, en 1972 et disputa des courses de côte. En 1977, il faillit disputer les 24 heures du Mans, sur la Porsche 911 d'Yves Courage. En 1980, il réalisa son rêve, au volant d'une Chevron (aux côtés d'Yves Courage.) En 1981, toujours avec Courage, il remporta sa classe. Puis, en 1982, il pilota la toute première voiture créée par Courage, la Cougar et il eu même droit à des sorties en championnat du monde d'endurance.
Au début des années 80, Grand était un pilote un peu gentleman-driver (il travaillait dans l'entreprise familiale), mais avec le coup de volant d'un pro. Champion de France circuit 1982 et 1983 avec une Lola, on lui proposa de disputer le tout premier championnat de Formule Ford, en 1984. Il le remporta avec une Rondeau (une Reynard assemblée en France.)
Grand se prit au jeu. Avec l'aide de Jacky Ickx et Ken Tyrrell, il prépara une F3000, en 1985. Il disputa trois meetings, mais ne se qualifia qu'une fois. A 31 ans, il se rendit compte qu'il était trop vieux et qu'il manquait de moyens pour viser la F1.
Ce fut la fin de ses ambitions de pilotes, même s'il couru les 24 heures du Mans jusqu'en 1991.
Avec le journaliste François Fayman, il transforma sa structure informelle en vraie écurie : le Graff Racing (GRAnd-François Fayman.) Jacques Goudchaux lui apporta un premier sacre, en 1986. A l'époque, c'était encore une discipline pour gentlemen-drivers. Mais alors que la Formule Renault était noyautée par La Filière Elf, des espoirs "non-Elf" comme Eric Helary ou Laurent Aïello s'orientèrent vers la FF. Avec William David (1989) et Jean-Christophe Bouillon (1990), le Graff prit le train de la professionalisation.
Fort de ses succès en FF, le Graff fit des incursions en Formule Renault et en F3. Christophe Bouchut lui offrit un premier titre en F3, en 1992.
Le championnat de France de Formule Ford était à son apogée. Le Graff y faisait figure d'épouvantail. A partir de 1992, l'équipe devint invincible. Souvent, le champion s'imposait devant un autre pilote Graff, qui s'imposait la saison suivante...
Le Graff Racing revint en F3 et en Formule Renault. En championnat de France de F3, Elf était en train de lâcher ses équipes, Winfield et Promactème. Serge Saulnier (Promactème) parti en Grande-Bretagne, avec Renault UK. Il fit débuter un certain Jenson Button... Le cahier du championnat de France 1995 s'ouvrait sur Winfield et Promactème, puis sur la double-page suivante, on trouvait le Graff Racing, LD Autosport et Action Sport & Moteurs Technik (ASMT, renommé peu après ASM), avec, en 5e page, la Signature du privée Philippe Sinault... Les deux premiers disparus, les quatre autres prirent le pouvoir...
Soheil Ayari remporta le titre de champion de France 1996. Grand songea à l'accompagner en F3000. Le Français revint chez Graff, en F3, le temps du Grand Prix de Macao 97, où il s'imposa devant son équipier Patrice Gay. Ce doublé fut LE temps-fort du Graff Racing.
Puis les formules de promotion furent marquées par une nouvelle ère. Des championnats européens apparaissaient (Open Nissan, FR V6, Euro F3000, Formule BMW...) Les sponsors institutionnels (pétroliers, cigarettiers...) jetaient l'éponge. Or, ils avaient l'habitude de sponsoriser plusieurs équipes dans plusieurs disciplines, durant plusieurs saisons. Les nouveaux-venus (boissons énergisante, téléphonie, paris sportifs...) ne sponsorisaient qu'une seule équipe, mais ils exigeaient d'elle qu'elle soit présente dans plusieurs disciplines. Mais il suffisait d'un conseil d'administration pour que le robinet soit coupé aussi sec.
Jean-Philippe Grand se tâtait. Le Graff Racing employait 50 personnes. Grossir, c'était risquer de fermer la boite au moindre retrait de sponsor. Et puis, il n'avait pas le côté "politique" d'un Frédéric Vasseur (repreneur d'ASM, qu'il allait transformer en ART Grand Prix), d'un Sinault ou d'un Saulnier.
Le Graff Racing se concentra sur les coupes nationales. Michel Lecomte, son bras droit, prit un parti de l'équipe sous son aile. Il disputa l'Open Nissan sous la bannière "Epsilon by Graff", puis "Epsilon Euskadi", en 2002.
Les premières années semblèrent donner raison aux ambitieux. En 1998, Ford abandonna la Formule Ford et le niveau baissa très vite. En 2002, le championnat de France de F3 fut absorbé par son homologue allemand pour former l'Euro F3. Le Graff Racing se retrouva acculé en Formule Renault, jusqu'à la disparition du championnat de France, en 2007.
Après un retour en endurance, à la fin des années 90, le Graff Racing rebondit en Carrera Cup et en GT Tour. Kevin Estre, l'un de ses derniers pilotes de Formule Renault, fut du voyage en Carrera Cup.
En GT Tour, Grand (et d'autres, notamment Olivier Panis) se plaignirent des règlements à la tête du client. En 2008, il prit sa pré-retraite. Jean-Louis Oger, qui a fait fortune dans le secteur médical, prit la suite.
Ce fut une période de tempête. En 2011, le Sébastien Loeb Racing fit une offre pour racheter les infrastructures du Graff Racing. Oger se plaignit d'un prix trop bas. Jean-Noël Lanctuit, ancien pilote Graff en GT, fit une offre de reprise. L'activité se poursuivit, mais cette fois Grand prenait définitivement sa retraite. Il réapparu au Mans Classic.
Sans le savoir, j'ai immortalisé Grand, lors d'un de ses tout derniers meeting en tant que gérant du Graff Racing, à Dijon :
Le projet de Lanctuit fit long feu. Pascal Rauturier, un mécano monté en grade, chercha un repreneur. Ce fut Eric Trouillet, héritier du groupe éponyme (transport, location d'utilitaires et construction de remorques PL), gentleman-driver à ses heures. Le Graff Racing retrouva de la stabilité. L'équipe s'offrit une Norma et une Ligier LMP3, disputant avec le V de V et l'ELMS. Au passage, elle déménagea à Morangis, fief de Trouillet.
Personnellement, je suis surtout la monoplace. Lors de mon bref passage chez V de V, on me demanda de rédiger un communiqué sur le Graff Racing. Je pensais que l'équipe avait disparu, à l'instar d'Epsilon ou de LD Autosport ! Et pourtant, ils étaient là... Je les ai même immortalisé à Magny-Cours :
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