INAUGURATION TRIUMPH PARIS ITALIE

Ce soir, c'est motos ! Triumph inaugure un nouveau show-room dans le sud Parisien. Donc, pour une fois, moto ne sera pas synonyme de Ducati, sur ce blog !

Je m'étais inscrit sur Facebook. Mais bien sûr, je n'ai toujours pas le permis A. J'avais peur d'être démasqué. J'aurais du emporter mon casque...

En fait, 1,80m, des mèches blanches, un blouson en cuir : je correspond peu ou prou au portrait-robot du visiteur. Après tout, une moto, c'est un engin un peu égoïste. Et à 20 000€, difficile de succomber étant jeune. Alors vous patientez et vous sautez le pas qu'une fois les enfants grands.

Les moins de 30 ans, voire les moins de 25 ans, eux, ils font du "window shopping". 

Ils me rappellent Sebastiani. Dehors, c'était des caïds des bacs à sable. Vous en avez même un qui est arrivé en drift ! (NDLA : ma voisine laissant échapper un : "C'est quoi ce c.. ?")
Mais une fois dedans, ils perdent de leur superbe. "Dès que le vigile a le dos tourné, j'enfourche la Speed Triple et tu prends la photo ! Ensuite, on inverse. (...) Vas-y, magne-toi, le vigile va nous voir !" ou "Reprendre de la pizza ? Attends, on a déjà pris deux parts, on va se faire dégager !"

La moto, c'est un univers volontiers viril, voire viriliste (compétition, dépassement de soit, prise de risque, esprit de corps...) Pourtant, un bon tiers des visiteurs sont des visiteuses. Et elles ne sont pas là pour accompagner monsieur...

Dans le Joe Bar Team, il n'y a aucune motarde. Les seules femmes sont des jeunes filles, un peu nunuches, qui montent derrière les quatre héros.
Dans Week-end motard, par contre, il y a le personnage de "la fille en Ducati". Dure à cuir, elle donne la leçon aux héros ! Chez Triumph, il y a ces cousines. Pas question de jouer les passagères ! Certaines seraient plutôt du genre à embarquer leurs propres passagères... Je comprends le concept de l'Amazone, du garçon manqué. Par contre, certaines font 1m60 en talonnettes : comment font-elles pour atteindre le sélecteur de vitesse ?

"Triumph" pour les vieux caisseux, cela évoque plutôt des voitures. Plus précisément, des roadsters comme la TR3A ou la Spitfire... Et ce n'est pas une homonymie !

En 1884, Siegfried Bettmann quitta son Nuremberg natal pour Coventry. En pleine essor du vélo, il importa des modèles Allemands, sur les cadres desquels il apposait "Bettmann". Ce n'était pas très vendeur et dès 1886, il rebaptisa sa marque "Triumph".
En 1894, Bettmann fabriqua ses propres vélos. Puis, en 1902, Triumph construisit sa première moto. En 1914, l'état-major cherchait une moto pour l'armée Britannique.
Siegfried Bettmann sauta sur l'occasion et conçu en un temps record un modèle correspondant au cahier des charges. Triumph sorti du conflit les poches pleines. Claude Holbrook, alors N°2, convainquit son chef de racheter Dawson, un minuscule constructeur. En 1921, Dawson fut renommé Triumph Motor Company.
Claude Holbrook décida de faire de Triumph un constructeur de grosses cylindrées. Une stratégie discutable et en 1936, Triumph fut dans le rouge. Ariel, un constructeur de motos, racheta les motos et les vélos (qu'il revendit en 1939.) De son côté, après avoir été livrée à elle-même la branche auto fut reprise par Standard en 1944. Triumph-Standard fut lui-même absorbé par British Leyland en 1960, avant de fusionner avec son rival BMH en 1968...
Prince des roadsters durant la période 1955-1965, Triumph Motor Company connu une chute dans les années 70. Le point final étant l'Acclaim, dont la production s'arrêta en 1984.

Curieusement, Triumph Engineering, la branche moto, connu un histoire quasi-symétrique. Ce modèle de 1972, témoigne du passé glorieux.

En 1951, BSA racheta Ariel et Triumph. Cette dernière avait profité d'une publicité gratuite : Marlon Brando chevauchait une Thunderbird dans L'équipée Sauvage. Puis il y eu la Rickman Metisse de Steve McQueen dans La grande évasion.
Comme chez leur lointain cousins à quatre roues, Triumph Enginering savait tout, mieux que tout le monde. Un démarreur électrique ? Pas besoin ! Les freins à disque ? Pas besoin ! Augmenter le rendement, pour faire des moteurs plus petits, à puissance égale ? Pas besoin ! Un quatre cylindres ? Passer de deux à trois cylindres, ça suffit !
Forcément, les Japonais n'eurent qu'à se servir. En 1971, le groupe BSA coula. Il fut repris par Maganese Bronze. Au sein de Norton Villiers Triumph, la marque cohabita avec un BSA et un Norton qui n'allaient guère mieux. Triumph fut liquidé en 1974, puis repris par ses employés. L'aventure dura jusqu'en 1983.

Depuis la faillite de Norton Villiers, en 1977, BSA et Norton ont connu nombre de projets foireux. Triumph, lui, fut ressuscité pour de bon, en 1984. John Bloor a rapidement investi dans de nouveaux modèles. Dès le début des années 90, Triumph réapparut en France. Un grave incendie en 2002, dans l'usine d'Hinckley, n'a pas entamé sa croissance.
Avec 78 365 motos en 2021, Triumph pointe devant Ducati. Le constructeur a fêté au passage sa millionième moto (en additionnant les différents avatars.) Notez aussi que la marque est indépendante.

Désormais, "Triumph" est donc associé aux motos. Cela explique sans doute pourquoi BMW n'a pas osé ressusciter la maque dans les années 90, lui préférant MG.

Dans la gamme actuel, il y a d'abord la Thruxton. Un nom ô combien évocateur pour moi, qui ai visité le circuit !

Dans le coin des motos d'occasions, l'une des premières Speed Triple cohabite avec l'une des dernières. L'occasion d'admirer l'évolution du design...

En mai 2002, le constructeur inaugura une usine à Chonburi, en Thaïlande. A l'origine, Chonburi n devait faire que des sous-ensembles. Mais le rapport s'est inversé. Depuis 2020, les Speed Triple sont intégralement assemblées en Thaïlande. Hinckley ne réalisant plus que des sous-ensembles.

La gamme actuelle de Triumph est un mélange d'emprunts au passé pré-1984 et de modèles inédits. La Bonneville est une "Classic" dont le nom reprend celui d'un modèle des années 60.

La "Bonnie" originelle était populaire aux USA, où elle faisait figure de "Mini-Harley-Davidson". En Europe, elle brouilla l'image du constructeur, alors plutôt sportive. Elle était qualifiée de "tréteau". Dans Week-end motard, Gilou en possédait une, ainsi qu'une Yamaha XT. Ce qui sous-entendait qu'en fait, il n'y connaissait pas grand chose...

La fin des années 70 fut une hécatombe pour les fabricants Européens : en plus de BSA et Norton sus-cités, Benelli, Bultaco, Laverda, Montesa, Motobécane, Münch, MV Agusta et Zundapp disparurent. Les Japonais possédèrent jusqu'à 99% du marché mondial, au-delà de 125cm3 !

Depuis, la moto Européenne a relevé la tête. Certains disent que les Japonais ont volontairement levé le pied. Une annihilation complète des Européens aurait été mal prise par certains motards. Sans parler des pouvoir publics, qui auraient pu décréter des mesures protectionnistes.

La solution pour vivre à l'ombre des nippons, ce sont les marchés de niches. Triumph -et Ducati- a opté pour des grosses cylindrées, avec des possibilités de personnalisation, comme cette Rocket 3. Avec 2,5l de cylindrée, c'est la plus grosse moto au monde.

Les trails sont un peu le pendant des SUV. Certes, il y a eu des Triumph au Dakar, mais la Tiger a surtout été créée pour faire plaisir à la clientèle. Et comme les SUV, les trails font surtout du franchissement de trottoir.

Les premières motos pour le hors-piste étaient des roadsters dépouillés et préparés par des artisans. Rescapés d'Auschwitz, les frères Berliner conçurent ainsi des "Scrambler" aux débuts des années 60. D'abord sur base Rickman (donc Triumph), puis sur base Ducati.
Ces motos servent d'alibi à Ducati pour l'actuelle Scrambler. Triumph commercialise une moto du même type, baptisée... Street Scrambler et s'appuyant également sur l'héritage des frères Berliner.

En tout cas, ce que j'aime dans les présentations motos, c'est que c'est un public de connaisseurs (du moins au-delà de 500cm3.) Vous ne pouvez pas les berner avec un écran tactile et un assistant personnel !
Les constructeurs de niche s'adressent à un clientèle de motards chevronnés. Donc exigeants. Vidisti, credidisti ! Les concessionnaires motos sont donc remplis à ras-bord de modèles. A fortiori avec toutes ces séries limitées. Le vendeur doit aussi connaitre son produit...

Même pour des produits très marketés comme la Tiger ou la Street Scrambler, le constructeur doit aussi faire des efforts en amont.

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