Très 6...

C'est curieux de se balader sur le site de l'ePrix de Paris. C'est un coin où je ne vais pas souvent, alors pour moi, ça reste "le circuit de l'ePrix de Paris". Je m'attendrais presque à ce qu'un robocop me tombe dessus !

Et je suis tombé sur cette Triumph TR6. L'ultime vrai roadster de Triumph, une TR4/TR5 habilement relookée par Giovanni Michelotti. Il fallait remplacer la TR6, mais British Leyland n'était pas capable de geler un design en moins de 5 ou 6 ans (et je ne parle pas de l'industrialisation derrière.) C'est assez incroyable de voir aujourd'hui le foisonnement de projets, où comment BL perdait son temps (allant jusqu'au stade du prototype roulant) sur des idées qui avait 0 chance de se concrétiser. Les PDG se succédaient à BL et chacun voulait renouveler toutes les gammes de tout le groupe, d'où des retards. Et pendant que ces nouveautés se pouponnaient, BL voyait ses ventes s'effondrer. Du coup, les budgets étaient coupés et il fallait tailler à la hache parmi les projets en cours. Souvent, c'était au gré de la diplomatie interne.
Quand j'étais petit, j'avais une TR7 (jaune) en Matchbox et une TR7 (rouge) en Majorette. J'adorais la ligne en coin de cette voiture. Mon père avait du m'expliquer qu'avant la TR7, il y avait eu une TR5, une TR6, etc. Donc, je m'imaginais que d'ici à ce que j'ai le permis, Triumph en serait à la TR20 ! Du coup, j'avais imaginé cette TR20 de la fin des années 90... Alors qu'à l'époque, cela faisait déjà longtemps que la production des TR7/TR8 était arrêtée...

Au sein de BL, il y avait clairement un doublon entre Triumph et MG. Ils étaient sur le même segment des berlines et roadsters sportifs. Triumph était mieux placé politiquement et MG fut mis sur une voie de garage dès le début des années 70. Alors que le vocabulaire de la marque à l'octogone était mieux structuré (a contrario, Triumph n'avait même pas de logo) et qu'elle était plus reconnue aux Etats-Unis.
MG travaillait alors sur la Magna, un coupé à moteur central (un genre de Dino 246 modernisée.) De son côté, Triumph avait le projet Bullet (un clone maladroit de VW-Porsche 914) et l'ambitieux coupé Lynx (avec avant "cale de porte".) BL décida de fusionner les trois projet dans la TR7 : l'avant de la Lynx, la cellule centrale de la Bullet et l'arrière de la Magna ! Elle devait être produite à Speke, mais l'usine était contrôlée par les trotskistes, alors BL ferma l'usine ! Il fallu donc déménager l'outillage à Canley, ce qui voulait dire encore du retard...

La TR6 et la Stag avaient montré à quel point Triumph ne cernait pas du tout son univers. Et ça allait être encore pire avec la TR7. Elle était uniquement proposée en coupé, alors que TR signifiait "Triumph Roadster" (un cabriolet arriva dans un second temps.) La marque se voulait sportive, mais les moteurs 4 cylindres étaient poussifs, surtout aux USA. Le tout avec la fameuse finition BL... La clientèle était passée à autre chose. En Europe, on lui préférait une Golf GTI, plus agile. Et aux USA, les coupés japonais ont profité de la vacance du pouvoir britannique...
BL tenta une nouvelle, nouvelle formule. Cette fois, les TR7 et TR8 étaient produites à Solihull, chez Rover. Un site plus compétent. Triumph avait même décidé de revenir au sport auto, en motorisant une équipe de F3. Pour info, l'une des March/Triumph fut confiée à un certain Nigel Mansell... Mais ça ne suffit pas et en 1981, la TR7/TR8 disparu. Les fans de MG ricanaient : un an plus tôt, BL fermait l'usine d'Abingdon, en expliquant que MG, c'était le passé et que Triumph représentait l'avenir...

L'Acclaim acheva Triumph. En 1984, lors d'une énième réorganisation, la marque fut sacrifiée. Hasard du calendrier, quelques mois plus tôt, Triumph Engineering baissait le rideau. Depuis 1936, les deux "Triumph" (motos et autos) étaient deux marques qui vivaient séparément.
John Bloor, un promoteur immobilier, voulu racheter l'usine de motos de Meriden pour la raser et construire des pavillons. Finalement, il décida de relancer la marque. Conscient que Triumph n'avait pas coulé pour rien, il prit son temps. Il espionna les Japonais, fit bâtir une usine flambant neuve, à Hinckley, puis il lança lui-même des distributeurs en Allemagne et en France. Au total, il lui fallu près de dix ans pour relancer Triumph. Aujourd'hui, c'est une belle entreprise, avec deux sites de production en Grande-Bretagne et une usine de sous-traitance interne en Thaïlande.

Moi, je suis l'un des tout derniers à avoir vu des Triumph dans la rue et au temps où les Spitfire n'étaient que des voitures d'occasions. Depuis, au fil des réorganisations d'Austin-Rover à MG-Rover, MG est redevenue une marque de premier plan. A contrario, les marques plus anciennes -comme Triumph ou Morris- furent un peu gommées de l'histoire. On voit d'ailleurs aujourd'hui que Rover, prit entre Land Rover et MG, semble aller vers l'oublie.
En bref, pour tous les gens nés après moi, Triumph évoque avant tout des motos. BMW est propriétaire de l'usufruit de Triumph. Mais quel serait l'intérêt pour lui de relancer la marque ? Il devrait réexpliquer que Triumph, c'était aussi des voitures. En plus, comme je l'ai dit plus haut, Triumph n'a jamais vraiment eu de codes de design. BMW serait sans doute obligé de remonter jusqu'à la TR3A. De toute façon, le marché actuel des cabriolets/roadsters est bien morose...
La transition est toute trouvée pour parler du futur roadster MG ! Récemment, le site Australien Drive a été invité à Shanghai par MG. L'objectif principal, c'était de tester la MG3 reliftée, qui sera vendue en août sur l'ile-continent. Sur place, ils ont plus glaner quelques informations. Le gros SUV X-Motion sera bientôt produit. Un geste logique, à leur où tous les constructeurs Chinois se jetent sur les gros SUV. Après le GS et le compact ZS, ça sera le troisième SUV de MG. Mais la grosse annonce, c'est la rumeur d'un roadster. Un roadster électrique, à quatre roues motrices !

Depuis le rachat de MG par NAC, puis SAIC, le roadster est une vieille lune. A minima, il y a eu trois projets : une MG TF complètement refaite, un véhicule sur base MG3 et une version décapsulée du concept-car Icon. A mon avis, c'étaient avant tout des initiatives de MG UK, ayant notamment pour but de garantir une activité sur le site de Longbridge. Les fuites devaient être plus ou moins orchestrées de manière à mettre la maison-mère sous pression.

SAIC va très bien. En incluant Roewe et Maxus, elle devrait dépasser les 500 000 ventes en Chine. En Grande-Bretagne, le record de 2017 devrait être franchi dès ce mois-ci ! A ce train-là et avec l'appoint de la MG6 (et du X-Motion ?) Les 10 000 ventes devrait largement atteintes, en 2019. Outre-manche, M. Jones considère de moins en moins MG comme une chinoiserie au destin précaire. Même si l'on reste loin des scores de MG-Rover... En Australie, la marque à l'octogone vient à peine de poser ses valises. Pour 2018, 1 000 unités représentent un objectif raisonnable. Néanmoins, la MG3 reliftée et le X-Motion montrent que SAIC a des ambitions pour l'ile-continent.
Voilà pour le sûr à 99%. Ce que l'on attend, c'est une deuxième vague : Europe continentale et USA. Normalement, en 2020, MG va lancer une deuxième génération de véhicules. A cette occasion, il cherchera à être davantage présent à l'export. Dans ce contexte, le roadster serait effectivement un outil de reconquête. Les volumes Britanniques et Australiens seraient suffisant pour justifier son développement. Voilà pour la théorie. Jusqu'ici, SAIC a surtout été le roi de l'effet d'annonce. quia vidisti me credidisti.

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