Dealerships : 뽀뽀

Vous vous souvenez du concessionnaire Ssangyong/Lada ? C'était là que j'avais fait l'un de mes premiers "conducteur du jour". Et désormais, les pelleteuses sont à l’œuvre pour le raser...
En fait, cela faisait des années qu'il était abandonné. Au moment du "conducteur du jour", il avait une activité très minimale -de concessionnaire Peugeot- et ensuite, les portes restèrent définitivement closes. Une partie fut ensuite sous-louée à la Croix Rouge. Le reste était muré.

La particularité de ce concessionnaire, c'est qu'à chaque changement de panneau, au lieu de refaire sa décoration, il se contentait de mettre le nouveau panneau à un endroit vierge. Il portait donc encore les couleurs de Lada, Ssangyong (pré-Daewoo) et Toyota ! La Croix Rouge, installée dans la partie "Peugeot" avait, elle, enlevé les éléments.
En septembre dernier, une affiche de permis de construire apparut : démolition. L'ex-Ssangyong allait devenir l'un de ces immeubles de standing "Grand Paris".
Ma ville ne va pas être concernée par les travaux du métro. A l'origine, la ligne 1 du métro et le tramway 1 devaient être prolongés pour se rencontrer non loin. Ca aurait donné un hub métro-RER-tramway. Des travaux préliminaires (notamment les canalisations d'eau) avaient été effectués. Mais le Grand Paris a dépassé son budget et il a fallu tailler dans les nombreux projets. Le grand hub passa à la trappe et ma ville devint beaucoup moins attractive...

Pourtant, il fut décidé malgré tout de raser le concessionnaire. Je profitais de l'intervalle pour prendre quelques photos...
Le Grand Paris, ce n'est pas qu'un projet d'infrastructures. C'est aussi un remodelage complet de la petite couronne.

Dans les années 50, pour donner de l'air à Paris, on eu l'idée de créer des villes nouvelles (comme Cergy-Pontoise.) Des écosystèmes avec habitations, entreprises, commerces, etc. Loin de Paris. L'idée étant que l'habitant de ces villes nouvelles ne devait pas quitter ces écosystèmes, sauf pour monter à Paris, de temps en temps.

60 ans après, les planificateurs se sont (enfin) rendus compte des erreurs de leurs ainés. Les banlieusards vivent dans la ville A et travaillent dans la ville B. D'où des axes circulaires (périphérique, A86 et N104) complètement saturés. Il faut donc des liaisons non pas Paris-banlieue, mais banlieue à banlieue.
Avec les futurs métros, on va créer 68 gares, sans compter les gares existantes transformées en hub.

Dans le même temps, il y a des centaines de familles de classes moyennes qui n'ont plus les moyens de se loger à Paris. Depuis 1939, la population français a augmenté de 50%, mais celle de Paris intra-muros a perdu un tiers de ses habitants ! La baisse est continue et elle n'entraine pas de baisse des loyers. Demain, la capitale pourrait passer sous les 2 millions d'âmes. Les promoteurs et les élus déroulent le tapis rouge aux Parisiens. Surtout le long de la future ligne 16 du métro, qui traverse de vrais Molenbeek. Un peu de gentrification ne serait pas de refus...
Sauf qu'en compensation, les villes ayant peu d'habitants, se voient contraintes de construire des HLM. Dans ma ville, une belle barre (façon de parler) est ainsi en train de sortir de terre. Au mépris des règles d'urbanisme et d'occupation des sols. La maire nous explique qu'elle ne l'a pas choisi. Sauf que l'auteur de cette règle, c'était son prédécesseur (dont elle était l'adjointe...)
Donc, vous avez des familles parisiennes de classes moyennes, qui sont alléchées par les pubs. "Devenez propriétaire pour [moitié du prix parisien], au pied du métro !" Sauf que l'immeuble, il est terminé en 2019. Alors que le métro, lui, il viendra en 2025, voire 2030... Et je pense qu'avec les dépassements de budget, certains projets de prolongation en plusieurs étapes (ligne 11, ligne 14, ligne 17...) passeront à la trappe.
Du coup, des familles se retrouvent dans des zones avec pas ou peu de transports en commun à court, moyen terme. Et je connais des gens qui du coup, on choisi de passer le permis et d'acheter une voiture. Paradoxalement, le Grand Paris promeut donc les ventes de voitures particulières !

Après, on aura sans doute des stations sur le modèles de Rosa Parks ou de l'Ile Seguin. A savoir une espèce d'enclave bobo au milieu des cités, avec un McDo, un Carrefour Market, un Picard, une boulangerie pas très artisanale et un restaurant à thème.
Les lignes passent souvent loin des centre-villes historiques. Pas fous, les élus n'ont pas voulu de rues commerçantes éventrées pendant 10 ans. Ils ont bien vu les dégâts économiques des construction de tramways... Comme ici, avec Ssangyong, les immeubles sont souvent poussés sur des zones industrielles en quasi-friche, voire des ETI. Sans oublier les zones portuaires, le long de la Seine et de la Marne. Des zones avec beaucoup d'espace et peu de voisins pour râler.
Cela signifie que les futurs habitants seront près des métros, mais à 10, 15 minutes de marche du centre-ville. Pas facile d'y aller, surtout avec une poussette ou des enfants en bas âge. Et il ne faut pas oublier que nombre d'habitants sont des réfugiés économique parisiens. Ils avaient l'habitude d'avoir tout dans un rayon de 5 minutes à pied ! Quant à y aller en voiture, c'est niet, car le centre-ville est désormais une "zone à faibles émissions" (le terme de novlangue pour dire qu'il est piétonisés.)
En résumé, les personnes non-motorisés resteront à proximité du métro et les autres iront dans ces centres commerciaux moches, pour faire leurs courses...
Globalement, je suis malgré tout pour le Grand Paris. Je ne suis pas un ayatollah de la voiture. Oui, il y a des fois où je laisse mes deux voitures au garage, pour prendre le RER ! Ces dernières années, on a connu le bâton (bonus/malus, fermetures de voies, suppression du stationnement en surface...) Demain, on aura enfin la carotte de vraies alternatives. Personne ne prend plaisir à s'entasser dans les embouteillages. Mais le RER A, avec ses pannes récurrentes, ses wagons bondés (bonjour la promiscuité), ses pics-pockets violents et sa fermeture estivale, ce n'est guère tentant...
Lorsque je passais le permis, en pleine semaine, les places de stationnement étaient désertes. Les endroits pour pratiquer les créneaux ne manquaient pas ! Maintenant, dans les zones pavillonnaires, même en pleine semaine, il n'y a quasiment plus de place. Ce sont des gens qui n'ont plus qu'une utilisation marginale de l'automobile. Avec le Grand Paris, cet ultime besoin va disparaitre. Ils ne rachèteront plus d'automobile.
Je parie sur un taux d'équipement en chute libre. Dans Paris intra-muros, il n'est plus que d'un tiers ; un Parisien sur trois possède une voiture. Demain, ça sera un Francilien sur trois. Le marché des citadines et des micro-citadines va s'effondrer. Ce n'est pas un hasard si Smart a été le premier touché. La Fortwo était idéale pour les petites rues et les micro-places de parkings. Sauf que dans Paris, les ruelles sont désormais piétonnes et il n'y a plus que des parkings souterrains, où c'est le même prix pour tous... A quoi bon rouler dans une golfette ? C'est un boulet !

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