Aguttes - Automobiles de collection vente d'été

L'autre jour, sur le périphériques, j'étais comme d'habitude bloqué dans les bouchons. Au moins, j'ai eu tout le temps d'examiner une affiche évoquant une "exposition de voitures anciennes, à l'espace Champerret".

Sur Google, aucune trace de cette exposition. J'y suis malgré tout allé le jour J. A l'espace Champerret, tout semblait désert. c'est un lieu en sous-sol, avec une allée centrale en "L". Avais-je mal lu le lieu ou la date ? Je poussais jusqu'à la seconde barre du "L", histoire de dissiper tout doute. C'est là que je suis tombé sur une affiche de Corvette C1 et la silhouette caractéristique d'une MG A. J'étais au bon endroit !
En fait d'exposition anodine, il s'agit des lots promis à une vente aux enchères.

Il y avait des belles voitures. Commençons par cette MG A. Le catalogue précise que c'est une 1600 de 1958 (millésime 1959.)
La plus belle -à mon goût- c'était cette Corvette C3 "façon Greenwood". C'était le genre de GT délirantes que l'on pouvait admirer au milieu des années 70. Rien qu'à la vue des échappements latéraux, on se doute que ça doit faire du bruit...

Elle cohabite avec une Ford Mustang préparée récemment en VHC.
On restait dans les mécaniques Américaines, avec cette De Tomaso Pantera. Une GT5 de 1982, qui sort de l'atelier Still d'Eric Helary (comme la 'Vette.)
Une Camaro de 1969. A chaque fois que je vois une Camaro 1, j'ai Anthony Kiedis qui gueule dans ma tête : "Dream of Califor-nication..."

Ce qui m'a tout de suite sauté aux yeux, c'est que les jantes n'étaient pas d'origine. En général, c'est le premier indice d'une préparation. C'est très fréquent sur les muscle-cars, où la personnalisation, voire l'accéssoirisation, ont toujours fait parti de cette culture. Par contre, le catalogue était muet sur les éventuelles modifications. Il se contentait de dire que c'était une "Vrai Pony Car".
Il n'y avait que des ricaines ! La preuve avec cette Citroën SM.
Plus inhabituel : une Golf 2 G60 Rallye. C'était la première fois que j'en voyais une en vrai ! Dans la famille Golf GTI, vous aviez la GTI "tout court", la GTI 16S, la G60 (avec le compresseur en "G") et au sommet, la G60 Rallye. Prix de vente : 189 700frs, soit 70 000 frs de plus qu'une GTI 16S ! Comme son nom l'indique, elle était destinée au rallye et à l'homologation en Groupe A. Notez qu'elle disposait de 4 roues motrices.
Ce fut une mal-aimée. Le compresseur n'offrait que 160ch ; autant qu'une 309 GTI 16S ou une Kadett GSI 16V (qui étaient beaucoup moins chères.) Lorsque la G60 Rallye fut conçue, Lancia était tout seul en rallye ; il existait un espace pour la Volkswagen. Sauf qu'entre-temps, Toyota avait débarqué avec la Celica.

Par la suite, sa calandre à phares rectangulaires s'est vite démodées. Quand on ne connait pas, on la prend pour une simple GTI jackytuning...

Elle est partie pour 23 310€, ce qui était plus que raisonnable, eu égard à sa rareté.
Dans le même esprit d'Allemande haute-performance, voici une Alpina B10 Bi-turbo. Le préparateur n'était pas parti d'une M5 (E34), mais d'une 535i sur laquelle il greffa deux turbo Garrett. Elle revendiquait 360ch et 300km/h en pointe.

Là encore, le profane n'y voit qu'une E34 jackytunée. Ce qui explique sans doute pourquoi elle est restée sur la touche.
Le coin des Rolls-Royce, avec une Corniche. Apparemment, personne n'avait envie de se prendre pour Elton John...

La Corniche apparut dans deux vidéos. D'une part, dans I'm still standing (1983.) Le chanteur évoquait sa vie d'excès et le clip comportait des images facilement déchiffrables... Par exemple, Elton John débarquait au Carlton de Cannes (avec la Corniche) et il versait des paillettes au majordome, en guise de pourboire...
Dans Nikita (1985), il conduisait sa cousine, une Bentley Continental. Il frimait derrière le Mur de Berlin, sous les yeux d'une jeune et belle soldate Soviétique... La Bentley faisait parti de sa panoplie de millionnaire extravagant. Et Nikita représentait la femme taboue. Pourtant, moins de 4 ans plus tard, le Mur de Berlin s'effondrait...
La plus désirable de toute la vente, c'était cette autre Chevrolet Corvette (en l'occurrence, une C1.) L'une des 300 Corvette produites en 1953. Très belle, mais très, très chère et très poussive (avec son 6 cylindres), la première 'Vette fit un bide. Alors que quelques mois plus tôt, au Motorama, c'était la bousculade !
Par la suite, Chevrolet revit sa copie. Le prix de vente fut abaissé, la liste des équipements de série, allongée et dès 1955, elle reçu un V8. Du coup, les ventes décollèrent.

66 ans plus tard, évidemment, les C1 sont devenues très recherchés. Elle fut adjugée par 50 300€, ce qui est là encore, très, très raisonnable.
Encore plus rare : l'une des 156 Facel-Vega Excellence ! Les derniers feux des constructeurs de prestige Français...

L'accrochage était très particulier. S'il y a un "coin Rolls-Royce" et un vague regroupement des Américaines, le reste était très fouillis, sans regroupement par époque ou provenance. Surtout, autant les voitures étaient entassées le long des fenêtres et près du podium d'enchères, autant elles avaient de l'espace ailleurs.
Au moins, je pouvais faire le tour de cette très belle Excellence. Elle portait bien son nom...
Et dans un recoin, cette Fiat 130. Certes, cette berline est très rare de ce côté des Alpes et c'était un exemplaire de première main.
Mais qu'est-ce qu'elle fichait là ?

A cet instant-là, j'avais une sérieuse impression d'amateurisme de la part d'Aguttes. La maison s'est lancé dans l'automobile, visiblement par opportunisme économique, en 2016. Elle organise 5 ou 6 ventes par an. Comment est-ce qu'un expert peut jauger aussi bien une Golf G60 Rallye, qu'une Corvette C1 ? Il n'y a que chez Pawn stars qu'il y a des experts en tout ! Pour ses autres ventes, Aguttes fait des thématiques (peintures impressionnistes, art asiatique...) Là, c'est "vente d'été", choux et carottes !
Encore une voiture façon jackytuning, en apparence... En fait, il s'agit d'une 911 SC "turbo look" Alméras, avec moteur réalésé à 3,5l. Surtout, c'était une ex-Johnny Halliday... L'autocollant "Meznarie", c'est parce qu'elle fut restaurée chez Meznarie, dans les années 90.

Depuis la mort du chanteur, j'ai vu passer quelques unes de ses anciennes voitures. Les vendeurs tablent sur la nostalgie pour gonfler les prix... Et à chaque fois, les voitures restent sur le carreau. Sachant cela, Aguttes aurait du être prudent. 170 000€ exigés pour ce qui n'était qu'une 911 atmo kité, c'était du "Bob Marley"... Et comme d'habitude, elle ne s'est pas vendue.
Autant la C1 était sous-évaluée, autant d'autres lots étaient proposés à des prix délirants eu égard à l'intérêt du modèle et la configuration de l'exemplaire. Le lot le moins sérieux, c'était cette 911 SC Targa sans longue-portées, mais avec un affreux kit arrière et une boite Sportomatic. "Modèle assez rare et à redécouvrir" (dixit le catalogue.) Mise à prix : 35 500€ et le descriptif sous-entend qu'il y a des travaux à faire dessus...

Sans surprise, cette horreur est restée à quai.

Au final, seules 23 des 48 voitures proposées ont été vendues.

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