Citroën Visa Norev au 1/43e
Mes étagères débordent. Mais lorsque j'ai vu cette Visa au 1/43e sur le Type H-boutique souvenir du Born Paris XV, je n'ai pas pu résister !
Comment dire non à une telle kitscherie ?
J'ai déjà évoqué la genèse de la Citroën Visa. La citadine de la marque aux chevrons fut une arlésienne. Le constructeur avait tout basé autour de la plateforme de la Fiat 127. La 127 sorti en 1971, mais sa cousine Française -dont les études avaient débuté en 1968- avançait à un rythme de tortue. Chez Citroën, on ne savait pas concevoir en moins de 10 ans. En 1972, l'Y2 n'était encore qu'une maquette pleine en plâtre. En 1973, les Italiens claquèrent la porte ; la voiture n'avait plus de plateforme.
A la même époque, la Roumanie voulait se doter d'une industrie automobile. Renault débarqua rapidement avec des R8, puis des R12. Il est vrai que la firme au losange avait des produits tout prêts et l'expérience de la production extra-européenne. Citroën, lui, proposait aux Roumains de codévelopper une voiture inédite, dérivé du projet de citadine (dérivé du projet Y, devenu TA.) En 1976, un accord fut signé. Mais les deux parties manquaient de moyens.
Depuis 1974, Peugeot était actionnaire de Citroën (ils en prirent le contrôle en 1976.) Le projet de citadine devint la VD, mais on n'en voyait pas le bout ! Le Franc-comtois prit une Peugeot 104Z et la "citroënisa", dans l'esprit de l'Y/TA/VD. Ce fut la LN de 1976. En 1978, la citadine vit enfin le jour, avec la Visa. Puis, en 1983, le projet Roumain éclot, avec l'Oltcit Axel. Les trois avatares d'un même projet cohabitèrent !
La force de Citroën, c'était de passer des années et des années à concevoir une voiture et de livrer un produit bâclé !
Sous-équipée et mal finie, la LN évolua rapidement en LNA. La Visa, elle, était sous-motorisé et son design était controversé (euphémisme.) Elle aussi retourna au pas de charge sur la planche à dessin. D'où la Visa II (1981.) Quant à l'Axel, elle ferait passer les productions BL pour un travail soigné ! De toute façon, là, l'AX était déjà presque prête, alors le chevrons abandonna les Roumains au bord de la route...
Les trois avatars avaient un positionnement low-cost, très austère, alors que les autres citadines montaient en gamme et jouaient la carte du fun. La Visa II redressa le tir, avec des versions mieux motorisées et mieux équipées (ne serait-ce que pour ne pas marcher sur les pieds de l'Axel), mais c'était trop tard.
L'AX fut un tsunami pour le bas de gamme Citroën. La LNA disparu en 1986, l'Axel en 1987 et la Visa, en 1988. Et peu de gens les regrettèrent...
Ici, Norev a reproduit une Visa Club, en jaune mimosa. Cette version d'entrée de gamme était équipée d'un bicylindre 652cm3 35ch, de quoi atteindre 128km/h, en descente, avec le vent dans le dos. Le tout avec un équipement monacal...
Il faut croire que Citroën avait fait exprès de ne lui donner aucune qualité. A ce niveau là, cela tomberait sur le coup de la loi sur le bizutage ! Le seul point fort, c'était un allumage électronique, l'unique technologie récupérée des études sur le rotatif.
Vu de 2019, la Visa possède le charme d'une tentative de design disruptif et qui a vite mal vieilli. Le genre de trucs qui déclenche des crises de fou rire, au même titre qu'une Fiat Multipla.
Norev a reproduit la Visa dans tout ses détails, y compris l'intérieur, avec sa sellerie marron (bicolore), son volant monobranche et son gros joystick servant de comodo unique.
La Visa fut aussi la voiture de Spirou et Fantasio, à la pire époque
En 1968, Jean-Claude Fournier n'avait que 25 ans, lorsqu'on lui proposa de reprendre Spirou et Fantasio. Pas facile de succéder au génial André Franquin, qui avait largement développé l'univers de la série, avec notamment des personnages secondaires récurrents. Le Breton réussit cette tâche ardue. Avec lui, le duo devinrent des aventuriers internationaux et les gags se multipliaient (l'humour tarte à la crème étant alors très populaire.) Fournier offrit également des aventures avec davantage de profondeurs, en confrontant ses héros au nucléaire ou au trafic de drogue.
Mais Dupuis voyait surtout que Fournier n'avait écris "que" neuf albums en douze ans. Le magazine Spirou faisait face à des concurrents toujours plus nombreux : Tintin, mais surtout Pilote et Circus, visants davantage les pré-adolescents. Sans oublier des revues carrément typées adolescents, voire adultes comme Fluide Glacial, Métal Hurlant ou A suivre.
Pour riposter, Dupuis voulu créer un "Studio Spirou" (calqué sur le Studio Hergé) avec un maitre et des tâcherons qui feraient l'essentiel du travail. L'objectif étant de créer des albums à la chaine. Finalement, l'idée fut de confier la série à trois équipes. Nic et Cauvin voulaient un Spirou inédit, se déroulant dans un futur proche, très technologique. Tom et Janry prenaient eux, la suite du Spirou de Franquin et Fournier, avec ses personnages. Enfin, Yves Chaland créait un Spirou rétro-futuriste, plus intello, donc touchant un public plus vieux. Trois avatars, comme chez Citroën !
Nic et Cauvin furent les premiers prêts. Pour marquer la rupture avec Fournier, exit la R5 rouge (ou jaune, suivant les albums.) Dans un mini-récit, Spirou conduit une Innocenti Turbo de Tomaso rouge... Qui devint une Mini "normale" bleue, dans la dernière case ! Puis, dans Les faiseurs de silence, Fantasio avait une Citroën Visa, sans doute plus conforme à cet esprit futuriste.
Nic Broca était un singe-savant. Il travailla longtemps sur des dessins animés. Il savait aussi bien dessiner Astérix, que Tintin, Lucky Luke, les Schtroumpfs... Dupuis l'avait recruté pour sa capacité à produire de la case à la chaine. Par contre, son dessin manquait de vie...
Pour le scénario, Raoul Cauvin était à la barre. A l'époque, il produisait l'essentiel du contenu du magazine ! Son truc, c'était partir sur un ou deux personnages avec un univers bien délimité et d'en faire des albums à la chaine (cf. Les tuniques bleues, Sammy, Cédric, Pierre Tombal, Les femmes en blanc...)
Après une Ceinture du froid assez probante, le niveau baissa dans La boite noire. Dans Les faiseurs de silence, c'était le plongeon ! Les titres eux-mêmes trahissaient une pauvreté d'imagination... Alors que la diffusion de ce dernier débutait, Jidéhem remarqua que c'était un copier/coller de son album La bulle du silence de la série Sophie. Et le duo y fit référence, en fin d'album.
Heureusement, dès 1981, Tom et Janry entrèrent en scène et ils reprirent le travail de Fournier avec ses gags à gogo et ses thématiques plus sombres (un virus développé dans l'Antarctique, un village Aborigène face à des mineurs sans scrupules...) Le duo s'occupa désormais de Spirou à temps plein.
Nic Broca retourna au dessin animé avec les Snorky. Il s'éteignit dans un relatif anonymat, en 1993.
Chaland, lui, était davantage un illustrateur qu'un dessinateur. Quant à travailler à la chaine... Son Spirou en deux tomes, Cœur d'acier, resta inachevé.
Comment dire non à une telle kitscherie ?
J'ai déjà évoqué la genèse de la Citroën Visa. La citadine de la marque aux chevrons fut une arlésienne. Le constructeur avait tout basé autour de la plateforme de la Fiat 127. La 127 sorti en 1971, mais sa cousine Française -dont les études avaient débuté en 1968- avançait à un rythme de tortue. Chez Citroën, on ne savait pas concevoir en moins de 10 ans. En 1972, l'Y2 n'était encore qu'une maquette pleine en plâtre. En 1973, les Italiens claquèrent la porte ; la voiture n'avait plus de plateforme.
A la même époque, la Roumanie voulait se doter d'une industrie automobile. Renault débarqua rapidement avec des R8, puis des R12. Il est vrai que la firme au losange avait des produits tout prêts et l'expérience de la production extra-européenne. Citroën, lui, proposait aux Roumains de codévelopper une voiture inédite, dérivé du projet de citadine (dérivé du projet Y, devenu TA.) En 1976, un accord fut signé. Mais les deux parties manquaient de moyens.
Depuis 1974, Peugeot était actionnaire de Citroën (ils en prirent le contrôle en 1976.) Le projet de citadine devint la VD, mais on n'en voyait pas le bout ! Le Franc-comtois prit une Peugeot 104Z et la "citroënisa", dans l'esprit de l'Y/TA/VD. Ce fut la LN de 1976. En 1978, la citadine vit enfin le jour, avec la Visa. Puis, en 1983, le projet Roumain éclot, avec l'Oltcit Axel. Les trois avatares d'un même projet cohabitèrent !
La force de Citroën, c'était de passer des années et des années à concevoir une voiture et de livrer un produit bâclé !
Sous-équipée et mal finie, la LN évolua rapidement en LNA. La Visa, elle, était sous-motorisé et son design était controversé (euphémisme.) Elle aussi retourna au pas de charge sur la planche à dessin. D'où la Visa II (1981.) Quant à l'Axel, elle ferait passer les productions BL pour un travail soigné ! De toute façon, là, l'AX était déjà presque prête, alors le chevrons abandonna les Roumains au bord de la route...
Les trois avatars avaient un positionnement low-cost, très austère, alors que les autres citadines montaient en gamme et jouaient la carte du fun. La Visa II redressa le tir, avec des versions mieux motorisées et mieux équipées (ne serait-ce que pour ne pas marcher sur les pieds de l'Axel), mais c'était trop tard.
L'AX fut un tsunami pour le bas de gamme Citroën. La LNA disparu en 1986, l'Axel en 1987 et la Visa, en 1988. Et peu de gens les regrettèrent...
Ici, Norev a reproduit une Visa Club, en jaune mimosa. Cette version d'entrée de gamme était équipée d'un bicylindre 652cm3 35ch, de quoi atteindre 128km/h, en descente, avec le vent dans le dos. Le tout avec un équipement monacal...
Il faut croire que Citroën avait fait exprès de ne lui donner aucune qualité. A ce niveau là, cela tomberait sur le coup de la loi sur le bizutage ! Le seul point fort, c'était un allumage électronique, l'unique technologie récupérée des études sur le rotatif.
Vu de 2019, la Visa possède le charme d'une tentative de design disruptif et qui a vite mal vieilli. Le genre de trucs qui déclenche des crises de fou rire, au même titre qu'une Fiat Multipla.
Norev a reproduit la Visa dans tout ses détails, y compris l'intérieur, avec sa sellerie marron (bicolore), son volant monobranche et son gros joystick servant de comodo unique.
La Visa fut aussi la voiture de Spirou et Fantasio, à la pire époque
En 1968, Jean-Claude Fournier n'avait que 25 ans, lorsqu'on lui proposa de reprendre Spirou et Fantasio. Pas facile de succéder au génial André Franquin, qui avait largement développé l'univers de la série, avec notamment des personnages secondaires récurrents. Le Breton réussit cette tâche ardue. Avec lui, le duo devinrent des aventuriers internationaux et les gags se multipliaient (l'humour tarte à la crème étant alors très populaire.) Fournier offrit également des aventures avec davantage de profondeurs, en confrontant ses héros au nucléaire ou au trafic de drogue.
Mais Dupuis voyait surtout que Fournier n'avait écris "que" neuf albums en douze ans. Le magazine Spirou faisait face à des concurrents toujours plus nombreux : Tintin, mais surtout Pilote et Circus, visants davantage les pré-adolescents. Sans oublier des revues carrément typées adolescents, voire adultes comme Fluide Glacial, Métal Hurlant ou A suivre.
Pour riposter, Dupuis voulu créer un "Studio Spirou" (calqué sur le Studio Hergé) avec un maitre et des tâcherons qui feraient l'essentiel du travail. L'objectif étant de créer des albums à la chaine. Finalement, l'idée fut de confier la série à trois équipes. Nic et Cauvin voulaient un Spirou inédit, se déroulant dans un futur proche, très technologique. Tom et Janry prenaient eux, la suite du Spirou de Franquin et Fournier, avec ses personnages. Enfin, Yves Chaland créait un Spirou rétro-futuriste, plus intello, donc touchant un public plus vieux. Trois avatars, comme chez Citroën !
Nic et Cauvin furent les premiers prêts. Pour marquer la rupture avec Fournier, exit la R5 rouge (ou jaune, suivant les albums.) Dans un mini-récit, Spirou conduit une Innocenti Turbo de Tomaso rouge... Qui devint une Mini "normale" bleue, dans la dernière case ! Puis, dans Les faiseurs de silence, Fantasio avait une Citroën Visa, sans doute plus conforme à cet esprit futuriste.
Nic Broca était un singe-savant. Il travailla longtemps sur des dessins animés. Il savait aussi bien dessiner Astérix, que Tintin, Lucky Luke, les Schtroumpfs... Dupuis l'avait recruté pour sa capacité à produire de la case à la chaine. Par contre, son dessin manquait de vie...
Pour le scénario, Raoul Cauvin était à la barre. A l'époque, il produisait l'essentiel du contenu du magazine ! Son truc, c'était partir sur un ou deux personnages avec un univers bien délimité et d'en faire des albums à la chaine (cf. Les tuniques bleues, Sammy, Cédric, Pierre Tombal, Les femmes en blanc...)
Après une Ceinture du froid assez probante, le niveau baissa dans La boite noire. Dans Les faiseurs de silence, c'était le plongeon ! Les titres eux-mêmes trahissaient une pauvreté d'imagination... Alors que la diffusion de ce dernier débutait, Jidéhem remarqua que c'était un copier/coller de son album La bulle du silence de la série Sophie. Et le duo y fit référence, en fin d'album.
Heureusement, dès 1981, Tom et Janry entrèrent en scène et ils reprirent le travail de Fournier avec ses gags à gogo et ses thématiques plus sombres (un virus développé dans l'Antarctique, un village Aborigène face à des mineurs sans scrupules...) Le duo s'occupa désormais de Spirou à temps plein.
Nic Broca retourna au dessin animé avec les Snorky. Il s'éteignit dans un relatif anonymat, en 1993.
Chaland, lui, était davantage un illustrateur qu'un dessinateur. Quant à travailler à la chaine... Son Spirou en deux tomes, Cœur d'acier, resta inachevé.
Commentaires
Enregistrer un commentaire
Qu'est-ce que vous en pensez ?