Rétromobile 2019 : 4. Citroën Visa Chrono
Il y a quelques jours, sur Twitter, quelqu'un affirmait que la Citroën Visa 1000 Pistes était la plus belle voiture des années 80. Histoire de troller, j'ai répondu que la Visa étant sortie en 1978, c'est la plus belle voiture des années 70. La plus belle voiture des années 80, c'est l'Axel, voyons !
Et hasard ou coïncidence, je croisais une Visa 1000 Pistes (NDLA : en fait, une Chrono), à Rétromobile. Je me devais de l'immortaliser !
La Visa, c'était une voiture condamnée. En 1968, lorsque Citroën et FIAT flirtèrent, la firme aux chevrons lança le Projet Y. L'essentiel de la future Visa était déjà là... Mais la voiture dut attendre 10 ans pour se trouver une plateforme.
Citroën passa l'essentiel des années 70 à peaufiner sa citadine. Le gouvernement Roumain la finança en partie, puis la coopération évolua vers un projet distinct. En 1974, PSA reprit le constructeur. Il fallait une citadine au plus vite et la 104 fut "Y-isée". Cela donna la LN (1976.) A l'automne 1978, le projet initial fut enfin produit, avec la Visa.
Son design intérieur et extérieur était pour le moins... Déroutant. Avec le temps, je trouve que ça a acquis un certain cachet. C'est un témoignage vivant d'un design des années 70, porté à son paroxysme. Mais là où tout le monde se focalise sur la laideur de la Visa, je pense que la plus grosse erreur, c'était son positionnement. George Douin avait théorisé la "GTLisation", lors de la conception de la Renault 5 GTL (1976.) Ce n'était pas qu'une question d'augmentation de la cylindrée, avec des boites plus longues, pour faire baisser la consommation. Il s'agissait également d'une montée en gamme des citadines : même la R5 L d'entrée de gamme reçu davantage de chevaux et d'équipements. Les citadines à moteur de mobylette, qui n'atteignaient même pas le 130, c'était fini !
Et donc, deux ans plus tard, Citroën lança une Visa Spécial équipée d'un bicylindre 35ch avec une vitesse de pointe de 128km/h. Le bruit caractéristique était un vrai repoussoir. Beaucoup d'acheteurs de citadines venaient de la 2cv (ou de la R4) et ils cherchaient désormais une "vraie voiture". Cela faisait parti de l'ascension sociale. Les Visa Spécial et Club (à peine mieux équipée) rappelaient donc aux gens cette 2cv dont ils voulaient se débarrasser... Ce serait comme un ouvrier qui troquerait son "bleu" pour un costume et qui découvrirait que le tissu de son costume, c'est celui d'un "bleu" ! La Spécial recevait un 4 cylindres 1,1l 50ch (issu de la 104.) Pour autant, sa présentation restait très austère. Idem côté publicité (slogan : "ça c'est une auto".) Accessoirement, en positionnant la Visa dans l'entry, Citroën cannibalisait la LNA...
Heuliez fut chargé de relifter la Visa, sans toucher aux panneaux de carrosserie. La Visa II apparu dès 1982, avec des faces avant et arrière moins clivantes. Pour un nouveau tableau de bord, par contre, il fallu attendre 1984. Dès 1980, avec la Super X et son 1,2l 64ch, la Visa tentait de monter en gamme. La 1,1l se déclina en davantage de versions. Pour dynamiser la gamme, Citroën opta pour le sport. Il y eu un trophée Visa, en rallye. La Chrono était présentée comme une version "civile" de la Trophée. Elle eu droit au 1,4l 93ch de la 104 ZS2, de quoi atteindre 173km/h. Comme par hasard, les 1000 exemplaires se vendirent comme des petits pains. D'où une seconde série, avec un moteur 80ch, que l'on retrouva ensuite sur la GT.
Fort du succès de la Chrono, la firme aux chevrons, poursuivit dans le sport avec la 1000 Pistes, à transmission intégrale. Puis il y eu la GTI, en 1984. La Visa Lotus, une Groupe B équipée du 2,2l de l'Esprit, resta dans les cartons (sans doute pour ne pas faire de l'ombre à la future 205 T16...)
Cette même année 1984, le projet Roumain abouti enfin, avec l'Axel. Avec la LNA, cela faisait un sacré embouteillage dans l'entrée de gamme de Citroën ! Et l'on ne parle pas de la 2cv, toujours présente... Poussive et mal finie, l'Axel fut un flop. Beaucoup de gens la confondirent avec la Visa (esthétiquement proche, car issue du même projet...) et cette dernière fut sans doute une victime collatérale.
Sans doute pour se distinguer de sa cousine Roumaine, la Visa lança la 14 TRS, équipée du 1,4l des GT et Chrono, mais dégonflé à 60ch. On voit bien qu'au début, l'accent était mis sur la bicylindre. Avec le lifting, le curseur fut décalé sur la 1,1l et à partir de 1985, il était placé sur le 1,4l. Citroën avait enfin compris la GTLisation ! En parallèle, il y eu de vrais efforts en matière de communication. En 1984, la marque s'offrait Jean Becker (à la réalisation), Remy Julienne (pour les cascades) et Julien Clerc (pour la musique) pour le spot de la Visa Diesel. Slogan : vavavoum ! Puis il y eu la Visa GTI décollant d'un porte-avion, l'année suivante. On était loin de "ça, c'est une auto" !
En 1986, l'AX débarquait. Les LNA et Axel s'effacèrent. La Visa fit un peu de résistance. 1986, c'était aussi l'année de la disparition de la GSA. La Visa aurait du la relayer comme compact de la gamme. Néanmoins, le constructeur était persuadé que la BX était une compact... D'où un gouffre béant, jusqu'à la ZX, en 1991...
Précisons que la Visa n'a jamais été un franc succès. Difficile d'exister face à la 205. Et l'on soupçonnait PSA de gentiment contenir la Visa pour éviter qu'elle ne fasse de l'ombre à sa chouchoute... Mon opinion est que Citroën aurait du faire davantage d'efforts sur les modèles "normaux" (hors-sportives) et peut-être utiliser l'arme des séries limitées.
Fin 1988, la 1 254 390e et dernière Visa quittait la chaine. L'histoire n'était pas complètement finie. Il y eu bien sûr le C15, arrivé sur le tard et qui lui survécu près de 20 ans. Et il y eu la Wuling LZW 7100... En 1988, les Chinois rachetèrent l'outillage de la Visa. Ils créèrent un drôle de bitza : calandre de Visa II, mais optiques arrière originelles. Le frère Roumain fourni des trains roulant d'Axel. Pour la mécanique, ils optèrent pour le 3 cylindres Daihatsu de la Huali/Xiali. Pour la petite histoire, les LZW 7100 étaient assemblées à Liuzhou. Un demi-siècle plus tôt, l'usine montait les Curtiss P40 destinés aux Tigres volants. En dépit du manque chronique de voiture, dans la Chine des années 80, la LZW 7100 fut un bide. Wuling, qui produisait en parallèle des minivans, se retrouva en quasi-faillite. Il ne redémarra vraiment qu'en 2001, lorsque GM poussa son partenaire SAIC à racheter le constructeur et à y investir...
Et hasard ou coïncidence, je croisais une Visa 1000 Pistes (NDLA : en fait, une Chrono), à Rétromobile. Je me devais de l'immortaliser !
La Visa, c'était une voiture condamnée. En 1968, lorsque Citroën et FIAT flirtèrent, la firme aux chevrons lança le Projet Y. L'essentiel de la future Visa était déjà là... Mais la voiture dut attendre 10 ans pour se trouver une plateforme.
Citroën passa l'essentiel des années 70 à peaufiner sa citadine. Le gouvernement Roumain la finança en partie, puis la coopération évolua vers un projet distinct. En 1974, PSA reprit le constructeur. Il fallait une citadine au plus vite et la 104 fut "Y-isée". Cela donna la LN (1976.) A l'automne 1978, le projet initial fut enfin produit, avec la Visa.
Son design intérieur et extérieur était pour le moins... Déroutant. Avec le temps, je trouve que ça a acquis un certain cachet. C'est un témoignage vivant d'un design des années 70, porté à son paroxysme. Mais là où tout le monde se focalise sur la laideur de la Visa, je pense que la plus grosse erreur, c'était son positionnement. George Douin avait théorisé la "GTLisation", lors de la conception de la Renault 5 GTL (1976.) Ce n'était pas qu'une question d'augmentation de la cylindrée, avec des boites plus longues, pour faire baisser la consommation. Il s'agissait également d'une montée en gamme des citadines : même la R5 L d'entrée de gamme reçu davantage de chevaux et d'équipements. Les citadines à moteur de mobylette, qui n'atteignaient même pas le 130, c'était fini !
Et donc, deux ans plus tard, Citroën lança une Visa Spécial équipée d'un bicylindre 35ch avec une vitesse de pointe de 128km/h. Le bruit caractéristique était un vrai repoussoir. Beaucoup d'acheteurs de citadines venaient de la 2cv (ou de la R4) et ils cherchaient désormais une "vraie voiture". Cela faisait parti de l'ascension sociale. Les Visa Spécial et Club (à peine mieux équipée) rappelaient donc aux gens cette 2cv dont ils voulaient se débarrasser... Ce serait comme un ouvrier qui troquerait son "bleu" pour un costume et qui découvrirait que le tissu de son costume, c'est celui d'un "bleu" ! La Spécial recevait un 4 cylindres 1,1l 50ch (issu de la 104.) Pour autant, sa présentation restait très austère. Idem côté publicité (slogan : "ça c'est une auto".) Accessoirement, en positionnant la Visa dans l'entry, Citroën cannibalisait la LNA...
Heuliez fut chargé de relifter la Visa, sans toucher aux panneaux de carrosserie. La Visa II apparu dès 1982, avec des faces avant et arrière moins clivantes. Pour un nouveau tableau de bord, par contre, il fallu attendre 1984. Dès 1980, avec la Super X et son 1,2l 64ch, la Visa tentait de monter en gamme. La 1,1l se déclina en davantage de versions. Pour dynamiser la gamme, Citroën opta pour le sport. Il y eu un trophée Visa, en rallye. La Chrono était présentée comme une version "civile" de la Trophée. Elle eu droit au 1,4l 93ch de la 104 ZS2, de quoi atteindre 173km/h. Comme par hasard, les 1000 exemplaires se vendirent comme des petits pains. D'où une seconde série, avec un moteur 80ch, que l'on retrouva ensuite sur la GT.
Fort du succès de la Chrono, la firme aux chevrons, poursuivit dans le sport avec la 1000 Pistes, à transmission intégrale. Puis il y eu la GTI, en 1984. La Visa Lotus, une Groupe B équipée du 2,2l de l'Esprit, resta dans les cartons (sans doute pour ne pas faire de l'ombre à la future 205 T16...)
Cette même année 1984, le projet Roumain abouti enfin, avec l'Axel. Avec la LNA, cela faisait un sacré embouteillage dans l'entrée de gamme de Citroën ! Et l'on ne parle pas de la 2cv, toujours présente... Poussive et mal finie, l'Axel fut un flop. Beaucoup de gens la confondirent avec la Visa (esthétiquement proche, car issue du même projet...) et cette dernière fut sans doute une victime collatérale.
Sans doute pour se distinguer de sa cousine Roumaine, la Visa lança la 14 TRS, équipée du 1,4l des GT et Chrono, mais dégonflé à 60ch. On voit bien qu'au début, l'accent était mis sur la bicylindre. Avec le lifting, le curseur fut décalé sur la 1,1l et à partir de 1985, il était placé sur le 1,4l. Citroën avait enfin compris la GTLisation ! En parallèle, il y eu de vrais efforts en matière de communication. En 1984, la marque s'offrait Jean Becker (à la réalisation), Remy Julienne (pour les cascades) et Julien Clerc (pour la musique) pour le spot de la Visa Diesel. Slogan : vavavoum ! Puis il y eu la Visa GTI décollant d'un porte-avion, l'année suivante. On était loin de "ça, c'est une auto" !
En 1986, l'AX débarquait. Les LNA et Axel s'effacèrent. La Visa fit un peu de résistance. 1986, c'était aussi l'année de la disparition de la GSA. La Visa aurait du la relayer comme compact de la gamme. Néanmoins, le constructeur était persuadé que la BX était une compact... D'où un gouffre béant, jusqu'à la ZX, en 1991...
Précisons que la Visa n'a jamais été un franc succès. Difficile d'exister face à la 205. Et l'on soupçonnait PSA de gentiment contenir la Visa pour éviter qu'elle ne fasse de l'ombre à sa chouchoute... Mon opinion est que Citroën aurait du faire davantage d'efforts sur les modèles "normaux" (hors-sportives) et peut-être utiliser l'arme des séries limitées.
Fin 1988, la 1 254 390e et dernière Visa quittait la chaine. L'histoire n'était pas complètement finie. Il y eu bien sûr le C15, arrivé sur le tard et qui lui survécu près de 20 ans. Et il y eu la Wuling LZW 7100... En 1988, les Chinois rachetèrent l'outillage de la Visa. Ils créèrent un drôle de bitza : calandre de Visa II, mais optiques arrière originelles. Le frère Roumain fourni des trains roulant d'Axel. Pour la mécanique, ils optèrent pour le 3 cylindres Daihatsu de la Huali/Xiali. Pour la petite histoire, les LZW 7100 étaient assemblées à Liuzhou. Un demi-siècle plus tôt, l'usine montait les Curtiss P40 destinés aux Tigres volants. En dépit du manque chronique de voiture, dans la Chine des années 80, la LZW 7100 fut un bide. Wuling, qui produisait en parallèle des minivans, se retrouva en quasi-faillite. Il ne redémarra vraiment qu'en 2001, lorsque GM poussa son partenaire SAIC à racheter le constructeur et à y investir...
Commentaires
Enregistrer un commentaire
Qu'est-ce que vous en pensez ?