Rétromobile 2024 : 8. Pontiac Fiero

Une Pontiac Fiero "stock" : c'est devenu bien rare ! D'habitude, elles sont maquillées en Ferrari... Pourtant, à Rétromobile, il y en avait une à vendre...

Depuis 2020 et la C8, la Chevrolet Corvette possède un moteur central arrière. Cela fit pourtant longtemps figure d'éléphant blanc. Pour la C7, Chevrolet avait même songé à commercialiser en parallèle une 'Vette à moteur central arrière et une autre à moteur avant !

20 ans après, GM restait traumatisé par le flop de la Pontiac Fiero.

Durant les années 60, le moteur arrière avait pris le pouvoir en Grand Prix, en endurance, puis à Indianapolis. La Lamborghini Miura (1966) fut la première grosse GT à moteur central arrière. Lamborghini n'était pas présent en compétition, mais l'adoption d'une architecture directement inspirée du Mans marqua les esprits. La Mangusta, première vraie GT de route de De Tomaso, suivi dans la foulée. Maserati sauta le pas en 1971, avec la Bora. Même Ferrari, hostile au moteur central arrière, suivi en 1972, avec la 365 GT4 BB.

Le moteur central arrière était devenu une évidence pour les grosses GT. John Z de Lorean, alors à la tête de Chevrolet, en était persuadé. Zora Arkus-Duntov, le "père" de la Corvette et Bill Mitchell, tsar du design de GM, étaient d'accord avec lui : la Corvette devait suivre le mouvement. D'autant plus que l'ennemi-intime Ford s'apprêtait à distribuer la De Tomaso Pantera dans son réseau US.
La XP-882 fut le premier prototype connu de Corvette à moteur central. La XP-880 Astro I de 1968 n'était pas officiellement une Corvette. Voiture laboratoire transformée en concept-car, la XP-882 fut dévoilée au salon de New York 1970. Puis il y eu la XP-895, en 1972. La XP-897 GT, en 1973. La Corvette devait passer au moteur central avec la quatrième génération, en 1980.

Fâché avec la direction, John Z de Lorean quitta GM en 1973. Zora Arkus-Duntov prit sa retraite en 1975 et Bill Mitchell, en 1977. La Corvette à moteur central avait perdu ses trois principaux avocats. David McLellan, le nouveau chef de projet 'Vette, était nettement plus timoré. Le moteur central n'était plus aussi incontournable.
Entre temps, Ford avait déchiré son contrat avec De Tomaso. La Datsun 240Z était la meilleure vente des coupés de moyenne cylindrée. Plus surprenant : Porsche, le pionnier du moteur arrière, choisissait un moteur avant pour sa première grosse GT, la 928. Chevrolet avait conscience qu'avec la Corvette, il fallait avancer à pas de loup : les fans étaient en embuscade. La C4 allait donc conserver un moteur avant. Le concept-car Aerovette de 1977 fut un baroud d'honneur. 

A la même époque, Pontiac retrouvait des couleurs. La Firebird Trans Am (1976) redynamisa la marque. Puis ce fut l'explosion avec Cours après moi shérif (Smokey and the Bandit, en VO.) La marque osa demander des budgets pour concevoir un modèle propre : un coupé à moteur central. Le fait de partir sur Pontiac -marque moins exposée- et avec un badge inédit, réduisait les risques. Pontiac n'avait rien à perdre et tout à y gagner.

Hulki Aldikacti fut nommé chef de projet. Vétéran de Pontiac, il lui manquait tout de même le charisme d'un Zora Arkus-Duntov. Or, entre 1976 et 1984, les contours évoluèrent beaucoup. Dans un contexte de second choc pétrolier et par peur de cannibaliser les ventes de la Corvette, le gros coupé devint un petit coupé. On retrouvait un avant cale de porte et la silhouette ramassée typique de voitures à moteur central de l'époque (cf. la Toyota MR.)
Plusieurs fois, GM songea à abandonner. William Hoglund, en charge de Pontiac à partir de 1980, remua ciel et terre pour que la Fiero soit produite. Mais le budget était sans cesse réduit.

La Fiero sorti en 1984, avec le triste 4 cylindres 2,5l "Iron Duke" 92ch. Pour assurer le battage, une Fiero (équipée d'un 2,7l turbo 232ch) joua les pace car à Indianapolis. La demande était forte, au point où l'usine de Pontiac (la ville) dut passer aux 3-8. 136 000 voitures sortirent au premier millésime. Le premier coupé à moteur central arrière de la General Motors s'annonçait comme un succès.

GM s'emballa. Il pensait sans doute qu'après la GTO et la Firebird Trans Am, Pontiac avait trouvé une nouvelle poule aux œufs d'or.
L'idée d'une Corvette suivant la même architecture ressurgit. D'où les concepts-car Indy (1986) et CERV III (1990) pour mieux tâter le terrain. Même Oldsmobile s'y mit avec la voiture de record Aerotech (1986) !

Il y eu un contre-choc pétrolier et les moyennes cylindrées revenaient en grâce. D'où la création d'une Fiero équipée d'un V6 140ch, plus en rapport avec son look futuriste. Les ventes sont malgré tout divisées par deux.

Pour 1986, la Fiero fut reliftée, avec un hayon. GM considérait que la Fiero se vendait bien, toute seule. Donc pas d'engagement en compétition ou de placement-produit dans des films. Alors qu'au même instant la Firebird se montrait sous son meilleur jour dans Un prince à New York et surtout, K2000.
Il y eu une série de voitures qui prirent feu. Les durites, de mauvaises qualité, cassait lorsque le niveau d'huile était bas. L'huile restante giclait sur les échappements brûlants et prenait feu. Réponse de GM : surveillez votre niveau d'huile ! Tout ceci contribua sans doute au déclin de la Fiero. Après un léger rebond en 1986, les ventes s'effondrèrent en 1987. 

Malgré de nouvelles suspensions, le millésime 1988 fut désastreux.

Le projet de Fiero deuxième génération, planifié par 1990, fut bazardé. La voiture n'atteignant même pas 1989. Le projet futuriste était devenu un boulet. Hulki Aldikacti tomba dans l'anonymat. Il mourut en 2015.

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