Mondial 2018 : 14. Vinfast

C'est l'un des stands les plus exotiques du Mondial 2018 : Vinfast, le constructeur Vietnamien.

En fait, ce ne sont ni les premières voitures Vietnamiennes, ni les secondes ! De 1970 à 1975, il y a eu La Dalat, cousine vietnamienne de la Citroën Baby-brousse. En 2012, l'assembleur Vinaxuki, lâché par son partenaire Hafei dévoila la VG 100, une Lobo à peine replâtrée. Trois voitures furent assemblées, puis Vinaxuki livra son usine à la végétation. Et voici donc les Vinfast A2.0 et SA2.0.
Phạm Nhật Vượng est l'homme le plus riche du Vietnam. Il a fait fortune dans les nouilles instantanées. Puis il a surfé sur la croissance économique vietnamienne pour se diversifier dans le BTP et les chaines de magasins (vêtements et électronique grand public.) C'est le Vingroup.

Vinfast est né en 2017. Phạm a privilégié la facilité et la vitesse à l'économie. Ainsi, il s'est largement appuyé sur l'existant. Les A2.0 et SA2.0 sont des BMW Série 5 (F10) et X5 (F15) relookées par Pininfarina, avec des moteurs passés par AVL. Magna a travaillé sur le châssis et Faurecia, sur l'intérieur. Enfin, Vinfast produira dans l'ancienne usine GM, en attendant d'ouvrir son propre site, dans son fief d'Hanoï.
Pour les débuts Parisiens, James deLuca (le PDG, débauché chez GM) et Lê Thị Thu Thủy (la vice-présidente) posent aux côtés de David Beckham. Objectif : conquérir le marché premium Asiatique, dès 2019 !
Il y a de quoi être dubitatif. Le Vingroup ne possède aucune expérience de l'industrie ou d'un métier connexe de l'automobile (par exemple, la distribution.) Avec environ 200 000 voitures produites en 2017, le Vietnam est un pays avec une industrie automobile balbutiante. Il possède uniquement des usines d'assemblages, faute de volume et d'équipementiers sur place. Kia, N°1 Vietnamien, est le seul à avoir une valeur ajoutée locale. Vinfast serait donc condamné à tout importer et à employer une main d’œuvre étrangère. En prime, l'état vietnamien veut de la croissance, mais pas trop vite. Le Vietnam pratique un communisme austère, les dirigeants ont des boutons lorsqu'ils voient les nouveaux riches se balader au volant de grosses cylindrées et ils multiplient les surtaxes. Pas sûr qu'ils apprécient de voir une marque émerger dans le premium. Accessoirement, BMW ne semble pas au courant qu'il lui a filé une licence de fabrication des F10 et F15...
Mais Vinfast s'est gardé une carte dans la manche : l'Opel Karl. L'usine Chevrolet était un héritage de Daewoo. C'était la seule usine extra-coréenne que GM a racheté lors de la reprise partielle du chaebol. Le Vietnam fut aussi le dernier marché (avec la Corée) où les Daewoo tardèrent à adopter un badge Chevrolet... La marque au "+" fut longtemps le N°2 Vietnamien, derrière Kia, mais devant Toyota.
Hélas, les dieux se sont acharnés sur Chevrolet Vietnam. Un won trop haut, qui donna envie à GM de réduire la voilure en Corée. Une volonté de GM de se recentrer sur les USA. Et enfin, l'entrée du Vietnam dans l'ASEAN, avec la fin des surtaxes sur les voitures importées. A ce titre, l'état Vietnamien sentait que son embryon d'industrie auto n'y résisterait pas. A-t-il forcer la main de Phạm Nhật Vượng pour qu'il se mue en constructeur automobile ? En tout cas, en 2017, il rachète les activités vietnamiennes de GM.
Outre les A2.0 et SA2.0, un troisième modèle figure discrètement au catalogue Vinfast : une Opel Karl badgée Chevrolet. Une voiture davantage compatible avec le paradigme du régime vietnamien. Surtout, avec d'anciens GM à la barre (dont James deLuca), Vinfast sera en terrain connu.
A mon avis, donc, en 2019, Vinfast ne produira que des Karl. Puis il prendra son temps pour lancer des premium. S'il les lance...

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