Shanghai-GM Buick Regal par XCarToys

Sur ce blog, j'évoque fréquemment des voitures ayant précipité la chute d'une marque. Pour une fois, il y a un happy end ! Voici une voiture qui a permis à la marque de rebondir. En l'occurrence, une Buick Regal, reproduite au 1/64e par XCarToys.

En terme de finition, tout est parfait. La finesse du travail et le niveau de détail est bluffant.

Lorsqu'on la compare à la Buick Roadmaster de Greenlight Collectibles, à la fois plus chère et plus grossière, il n'y a pas photo !

William Crapo Durant n'aimait pas les voitures ; il fabriquait des calèches. Il se laissa tenté par le rachat de Buick, en 1904. Durant l'utilisa pour bâtir un groupe, Genral Motors. Il fut alors prit d'une frénésie de rachat : Oldsmobile, Cadillac, Elmore, Welch, Cartercar, Oakland, Reliance... Licencié par GM, il créa Chevrolet. Revenu aux commandes de GM, il s'acheta Chevrolet à lui-même et rajouta Samson et McLaughlin au portefeuille de marques, avant d'être écarté définitivement !
Cette stratégie était diamétralement opposée à celle de Ford, qui visait à n'avoir qu'une usine d'une seule marque, produisant un seul modèle. Dans les années 30, le marché automobile se segmentait. Avec ses marques, GM pouvait ainsi couvrir l'ensemble du spectre. Du coup, Ford et Chrysler copièrent cette stratégie multi-marque.
L'apogée des marques intermédiaires, ce fut les Trente Glorieuses. Chez GM, chaque marque possédait une large autonomie : designs distincts avec peu de pièces d'aspects communes, jusqu'à posséder des mécaniques propres et bien sûr, usines dédiées avec réseaux séparés. Chez Buick, cela donna la fameuse Roadmaster de Rain Man. Il n'y avait plus vraiment de règles de positionnement. Tant pis aussi pour un éventuelle cannibalisation des ventes avec d'autres modèles GM. A la fin des années 60, la gamme comptait six modèles, de la modeste Special à la luxueuse Electra, sans oublier le gros coupé Riviera et la muscle cars Wildcat... Sachant que Buick distribuait également les Opel GT et Kadett !
Avec la crise, les trois grands passèrent d'un excès à un autre : réduction drastique des gammes, fusion des réseaux et hyper-commonalité des modèles. La carrosserie était commune et seule la finition variait. Buick ressorti l’appellation Roadmaster et la calandre à fanons. Mais la clientèle n'était pas dupe : c'était une simple Chevrolet Caprice Classic rebadgée... En face, les Japonais proposait du premium au prix de l'access premium, avec une image plus dynamique que les Américaines, alors pourquoi se priver ?

Autant les marques d'entrée et de haut de gamme semblaient incontournables, autant la valeur ajoutée des marques intermédiaires était discutable. Dodge (Chrysler) fut la seule marque à sortir de l'ornière. Mercury (Ford), Buick et Oldsmobile (GM) possédaient une image de voitures pour pensionnaires d'EPHAD. Mercury et Oldsmobile furent sacrifiées. Nul doute que sans la Chine, Buick aurait connu un destin similaire...

Traversons le Pacifique. A la même époque, le marché Chinois se développait de manière exponentielle. En 1980, la Chine assemblait quasiment à la main une dizaine de milliers de berlines archaïques, avec un outil industriel complètement obsolète. Les discours de Deng Xiaoping sur la motorisation du pays semblait tenir de l'incantatoire... Dix ans plus tard, les ouvriers Chinois jouaient de la clef Allen pour assembler des berlines Européennes. Mais ce temps fut bref. Les usines Chinoises produisaient toujours plus, des modèles plus récents, avec des pièces fabriquées sur place. Les prévisions économiques Chinoises ont toujours été très optimistes et pourtant, elles étaient en-deça des réalités !

La Chine pesait de plus en plus lourd, dans la construction automobile mondiale. Un acteur comme GM se devait d'y avoir une usine. Or, les deux constructeurs Chinois de VP (FAW/Hong Qi et SAIC) étaient déjà mariés à Volkswagen. Partir sur un nouveau partenaire et le faire monter en compétence était risqué. GM préféra se marier lui aussi à SAIC, en 1997. Un ménage à trois loin d'être idéal, le concept de NDA étant inconnu au Pays du Milieu...
Pour la voiture, mieux valait opter pour une grande berline, afin de profiter du savoir-faire acquis avec la Jetta.

Restait à lui trouver une marque. Jusqu'ici, GM avait une politique de "glocalisation", avec la création ou le rachat de marque locale (cf. Daewoo en Corée, Holden en Australie, Isuzu au Japon, Opel et Vauxhall en Europe...) Or, les Chinois était méfiant envers les produits fabriqués chez eux. A fortiori dans les années 90, où ils découvraient les biens d'équipements étrangers. Donc, il fallait partir d'une marque existante.
Prenez la cible : le cadre urbain de 25-45 ans. C'était un primo-accédant et il était ouvert à la nouveauté. Néanmoins, il était très sollicité : textile, électroménager, hifi... En permanence, il entendait parler de nouvelles marques. GM avait besoin d'un nom facile à retenir, sachant que son client type maitrisait mal l'anglais. Les noms avec des enchainements de consonnes étaient compliqué à transcrire en chinois.

Le casting idéal, c'était Buick. Sa transcription était 别克 (bie-ke.) Un nom court, au format des mots chinois.
GM était d'autant plus sûr de son coup qu'il y avait un précédent. Durant l'entre-deux guerre, les Américains étaient les premiers fournisseurs des settlements de Pékin et Shanghai. Buick était particulièrement présent et la marque organisa même des campagnes publicitaires locales, à destination des Chinois.

Ainsi, dans son vaste portefeuille de marques et de modèles, GM opta pour la Buick Regal. Elle débuta avec une version 2,0l 119ch du L34 (indisponible aux USA.) C'était un peu juste pour déplacer les 1,5t, mais au moins, cela permettait de proposer un prix contenu. Des V6 arrivèrent par la suite.

La production de la Shanghai-GM Buick Regal débuta en avril 1999. Ce fut d'emblée un carton. Etait-ce dû à l'image "voiture Américaine ?" En tout cas, l'aspect phonétique joua indéniablement en sa faveur.

En tout cas, GM eu tôt fait de talonner VW comme première marque Chinoise. Ce fut aussi une cure de jouvence par Buick. Dopée par ses bons scores Chinois, la marque retrouva grâce aux yeux du conseil d'administration de GM.

Pour surfer sur la vague, GM (s')investi en Chine, donnant à sa joint-venture d'autres modèles et un bureau de design. Mais nous y reviendront dessus une autre fois...

Quant à la Regal, elle fut produite jusqu'en 2008. Le modèle US disparu en 2004 et GM mit quatre ans pour lui créer une remplaçante. 

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