Škoda est un habitué de Rétromobile et il vient souvent avec de nombreuses voitures méconnues. Trop souvent, j'ai eu la flemme de faire un post dessus. Mais cette année, je suis motivé ! D'autant plus que Škoda fête ses 130 ans. Chaque voiture est aussi un témoin des convulsions politico-économique de la région, de la Bohème-Moravie austro-hongroise à la Tchéquie d'aujourd'hui...
Le Néo-zélandais Motor Lines assemblait des Škoda pour le marché local. Il songeait à un tout-terrain. Motor Lines s'intéressa à un prototype sur base Jowett Bradford, créé par un carrossier "kiwi". Motor Lines fut venir la voiture dans son atelier, l'étudia en détail et proposa l'idée à Škoda. Sans payer un cent au carrossier.
Le Trekka naquit en 1966. Les Tchèques l'expédiait en kit vers la Nouvelle-Zélande. Le Trekka possède plus qu'un air de famille avec le Land Rover Serie II et Austin Gipsy (tous deux lancés en 1958.) Mais il cache en fait, une plateforme d'Octavia et ses 1,1l 40ch, puis 1,2l 55ch. C'est un deux roues motrice.
Le Trekka était moins solide qu'il n'en avait l'air. Les tentatives d'exportations en Australie ou au Vietnam firent long feu. En 1971, Škoda arrêta l'Octavia et les Néo-Zélandais durent abandonner le Trekka.
Aujourd'hui, le Trekka ressort des archives. De facto, c'est l'ancêtre des SUV modernes de Škoda, dont le Yeti.
On retourne quelques années en arrière avec cette 1201 STW de 1958. La Škoda 1101 de l'immédiat après-guerre n'était qu'une évolution de la Popular 1100 des années 30. Avec la 1200 (1952), la constructeur s'offrait sa première vraie nouveauté.
En 1955, la 1200 évoluait en 1201. Nikita Krouchtchev voulait une industrie davantage tournée vers les biens d'équipements. Les pays satellites de l'URSS durent agir en conséquence. Avec l'arrivée de la 440, l'usine de Mladá Boleslav arrivait à saturation. Du coup, la 1201 fut synonyme de déménagement à Kvasiny. Jusqu'ici, cette usine construisait des limousines dérivées de la Superb des années 30. Désormais, Tatra aurait le monopole des limousines. C'était la première étape du développement industriel et commercial de Škoda, qui allait durer jusqu'au début des années 70.
Ce qui est intéressant, c'est le lettrage à l'arrière. Il s'agissait des quatre constructeurs de la Tchécoslovaquie : Jawa, Škoda, Tatra et Aero. L'état fit des choix.
L'usine Jawa Auto de Kvasiny fut donnée à Škoda (et c'est d'ailleurs de là que sortait cette 1201.) Quant à l'activité moto, elle est désormais très réduite.
Aero avait repris un projet mort-né de Jawa, qui devint l'Aero Minor. Ce fut le principal succès de ce constructeur jusque là confidentiel. L'état fit place net autour de Škoda et Aero se concentra sur l'aéronautique. Les bureaux Pragois de Škoda ont été bâti sur l'ancien site de l'usine Aero.
Comme de nombreuses entreprises du bloc de l'Est (dont Jawa), Tatra se retrouva avec des produits complètements obsolètes, à la chute du Mur. La production de camions fut sauvée. Mais il dut faire une croix sur l'automobile.
En 1969, Škoda créa la 110 Super Sport, basée sur la 110 de rallye. Un prototype roulant fut dévoilé au salon de Bruxelles 1972. A la tête de la Tchécoslovaquie, il y avait désormais Gustàv Husàk, nommé par les Soviétiques. Husàk voulait en finir avec le Printemps de Prague et c'en était terminé, de la fantaisie chez Škoda.
En 1981, Juraj Herz voulu tourner une histoire de voiture tueuse. C'était un sous-genre du film d'horreur alors en vogue (cf. Enfer mécanique, Christine...) La 110 Super Sport fut ressortie, peinte en noir et équipée d'un aileron façon DRM. Elle devint la "Ferat", une voiture de rallye d'une marque fictive.
Juraj Herz était un réalisateur a priori sérieux. En 1972, Les lampes à pétrole frôla la Palme d'or à Cannes. Mais c'était un passionné de films gores. Le milieu artistique avait été très actif dans le Printemps de Prague et il y eu des purges. Caméras qui partaient dans tous les sens, photo inconstante, figurants ahuris (un mécano manque de se faire renverser, par la voiture, dans les premières secondes), Herz n'a pas eu la meilleure équipe. La censure imposa un remontage du film. L'histoire de voiture tueuse se transforma en réflexion sur l'immoralité des entreprises privées. On a quand même droit à quelques belles giclées de sauce tomate.
Le vampire de Ferat est plus un navet qu'un authentique nanard.
Škoda a presque toujours été présent en rallye. Lorsque le règlement kit-car éclot, il s'engouffra dedans avec la Felicia. A la fin des années 90, le championnat kit-car se dépeuplait. La plupart des concurrents migraient vers le WRC. Alors pourquoi pas Škoda ?
Pour 1999, les Tchèques créèrent une Octavia WRC, afin de respecter l'empattement minimum imposé. Purs produits Škoda, Pavel Sibera et Emil Triner se partagèrent l'une des voitures. Armin Schwartz eu l'autre à temps plein. Au RAC, Bruno Thiry prit le volant de la voiture des Tchèques et termina 4e.
L'année suivante, "Arminator" rempila, aux côtés de Luis Climent, venus du Groupe N. Trop encombrante pour les épreuves sur asphaltes et sous-motorisée pour les épreuves sur terre, l'Octavia visait surtout les courses par élimination, type Safari ou Acropole. Sans surprise, elle termina une nouvelle fois bonne dernière du championnat constructeur.
En 2001, Bruno Thiry revint, mais c'est Armin Schwartz qui réalisé le principal exploit de l'Octavia : une 3e place au Safari.
Entre temps, Peugeot avait fait un bras d'honneur à la FIA. Le WRC ne pouvait refuser un concurrent comme lui, même avec une minuscule 206. Puisque la règle de l'empattement minimum (devenu une règle de la longueur minimum) était caduque, place à des WRC plus compactes ! Et Škoda de travailler sur une Fabia WRC...
A chaque salon, Škoda aime rappeler qu'il est partenaire officiel de l'UCI. On est en France, donc on a l'incontournable
Superb du Tour de France. En Italie, il exhibe des voitures du Giro, etc.
La première Superb n'était qu'une Passat (B5) rallongée avec un intérieur bois et une Škoda. En Chine, SAIC-Volkswagen la vendait d'ailleurs sous le nom de Passat Lingyu. La Superb visait avant tout les flottes et j'ai eu la chance (?)
d'en conduire plusieurs fois une.
Une pensée pour Dominique Depons, dont l'équipe était chargée de conduire les Superb du Tour de France. Pour ses 60 ans, Domi a voulu s'offrir une pré-retraite en Nouvelle Calédonie. Quelques semaines plus tard, lors d'une attaque de sa résidence, il perdait tout et devait être évacué.
A l'origine, le rassemblement de Worthersee n'était qu'une concentration de fans de Golf GTI. Volkswagen en a fait un évènement officiel. Il a commencé à y dévoiler des concept-cars, puis il y invita les autres marques du groupe. Les réalisations de Škoda étaient basées sur des modèles de série et construits par des stagiaires.
En 2014, les stagiaires créèrent le Yeti XTreme. Un Yeti 1,8l TSI 152ch avec des freins d'Octavia vRS et deux baquets. Le tout avec un look plus "4x4".
L'une des stars du stand, c'est cette Popular Sport Coupe. Acquise il y a peu par le constructeur, sa restauration débutera dès son retour en Tchéquie.
Comme son nom l'indique, la Popular était une tentative de descente en gamme. Une préoccupation commune des constructeurs des années 30. D'ailleurs, à la même époque, Ford UK utilisait parfois le nom de "Popular" pour désigner la Modèle Y.
La 418 Popular était une version raccourcie, avec un moteur "descendu" à 900cm3 de la 420. Lancée en 1934, la 418 fit long feu, mais l'ensemble des 420 récupérèrent le nom "Popular". Comme
Fiat, Škoda créa un modèle sportif, pour les victoires de classe au Monte-Carlo ou aux 1000 Miles. Poussé à 26ch, la Popular Sport Coupé atteignait 105km/h en pointe. Notez le profilage de la carrosserie.


Les affaires de Vàclav Laurin et Vàclav Klement allaient bien, au début des années 20. Ils produisaient désormais des voitures, des bus et des camions en moyenne série. En 1925, leur usine de Mladá Boleslav fut dévastée par les flammes, alors qu'ils s'apprêtaient à lancer une voiture de moyenne cylindrée, la 110. A la même époque, le conglomérat Škoda (trains et armement) avait décroché une licence de fabrication d'Hispano-Suiza. Néanmoins, Škoda ne possédait pas d'usine dédiée.
Un accord fut trouvé: Škoda racheta Laurin & Klement. Vàclav Klement restait présent, comme directeur technique. La 110 possédait un large "Laurin & Klement" sur la calandre, mais avec un badge Škoda sous le bouchon de radiateur. Ce n'est qu'en 1930 que Laurin & Klement prit le nom de Škoda Auto.
Au lendemain de la guerre, l'état Tchécoslovaque nationalisa Škoda et scinda en deux ses activités : l'automobile d'un côté, le reste de l'autre. Škoda Works fut privatisé à la chute du Mur. A la fin des années 90, l'entreprise était surendettée. La Tchéquie accepta de mettre la main à la poche, si Škoda se débarrassait de ses filiales dans l'énergie et les machine-outils, ne conservant que le ferroviaire. Škoda Plzeň, son nouveau nom, avait la faucheuse habitude de faire des pots-de-vin pour décrocher des marchés. Du coup, en 2010, nouveau changement de nom : Škoda Transportation ! Antonin Charouz aurait accepté de l'argent douteux du conglomérat, afin de remplir les caisses de son écurie. L'intéressé dit que ce n'est pas vrai, mais il perdit l'imprimatur de Sauber/Alfa Romeo, avant de vendre son équipe à PHM (ex-Mücke, devenu depuis AIX.)
En 2022, Škoda Transportation vendit à Volkswagen l'usufruit du logo et du nom. D'ici 2029, il devrait changer de nom.



Vaclàv Klement mourut en 1930 et cela marqua la fin de la transition. Après cela, il ne restait plus grand chose de Laurin & Klement dans Škoda Auto.
En 1935, Škoda dévoila la 935 Dynamic, au salon de Prague. Ce concept-car possédait des idées très radicales. D'abord dans sa ligne "goutte d'eau", mais aussi dans son moteur 4 cylindres à plat 2 litres.
Toujours en 1935, Škoda lança la 901 Rapid. Il s'agissait de transposer ce qui avait fait le succès de la Popular, sur une voiture plus grande. Elle évolua en 1938, en 922 Rapid OHV. Le style extérieur s'inspirait clairement de la 935 Dynamic. Mais point de 4 cylindres à plat ; Škoda se contenta d'une version 1,6l 42ch du 4 cylindres de la 901 Rapid. "OHV", car le moteur recevait un arbre-à-came en tête.
La Tchécoslovaquie traversait une période noire. L'Allemagne nazie grignota d'abord l'ouest du Pays. Pologne et Hongrie croquèrent des régions de l'est. Le président Edvard Beneš, seul chef d'état élu d'Europe centrale, s'exila à Londres en octobre 1938. Emil Hàcha lui succéda et sa fonction n'était plus que symbolique, face aux nazis. En mars 1939, la Slovaquie déclara son indépendance, sous le parrainage de l'Allemagne. Tandis que le reste devint le Protectorat de Bohème-Moravie.
L'une des raisons de l'appétit d'Hitler pour la Tchécoslovaquie, c'était Škoda. Depuis la fin du XIXe siècle, Škoda produisait des canons. Puis il se diversifia dans les blindés et les tanks. Hitler s'était assis sur le traité de Versailles et l'Allemagne produisait de nouveau des armes. Néanmoins, les nazis n'avaient pas l'expérience, ni les volumes des Tchèques.
Les nazis prirent le contrôle de l'outil industriel de Škoda. L'essentiel de la conception et de la production était tournée vers le secteur militaire. Les nazis attaquèrent ainsi la France et l'URSS avec une part non-négligeable d'équipements Tchèques. La production de voitures était réduite, mais pas nulle. Ainsi, cette Rapid OHV sorti de Mladá Boleslav en 1940. Visez le bleu, d'inspiration très américaine. Quelques voitures furent également produites durant l'immédiat après-guerre.



Terminons par cette Laurin & Klement Type A.
Tout a commencé par la rencontre de deux jeunes gens, à Mladá Boleslav. Vaclàv Laurin et Vaclàv Klement n'avaient pas vingt ans lorsqu'ils ouvrir un magasin de réparation de vélos. Vaclàv Laurin le libraire avait du bagout. Vaclàv Klement le forgeron était doué de ses mains. En 1895, ils passèrent à la construction de leurs propres vélos. Puis aux motos. Enfin, en 1905, Laurin & Klement dévoila sa première voiture, la Type A. Son étonnant bicylindre en V développait 7ch de quoi atteindre 40km/h.
La Type A était légèrement dépassée pour l'époque. Mais Laurin & Klement était le seul constructeur d'Europe Centrale, à une époque où transporter des voitures était compliqué. Les Type A étaient assemblées à la main, suivant les goûts de ses clients. Certains exemplaires furent livrés dans l'Allemagne et l'Autriche voisines.
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