Rétromobile 2019 : 13. Renault(s) Turbo
En 1979, à Dijon, Jean-Pierre Jabouille s'imposait avec cette RS10 au Grand Prix de France. L'histoire a surtout retenu la lutte de son équipier, René Arnoux, face à la Ferrari de Gilles Villeneuve, pour la 2e place.
Pour autant, c'était la toute première victoire d'un turbo en F1.
Renault profite donc du quarantième anniversaire de ce succès pour organiser une rétrospective, à Rétromobile.
Non, Renault n'a pas inventé le turbo.
Le turbocompresseur fut développé à la fin du XIXe siècle par un certain Alfred Büchi, pour des applications industrielles. Lors de la première guerre mondiale, le turbo fut testé sur les avions. Un bon moyen pour alimenter des moteurs à haute altitude, où l'air est plus rare. Dans les années 30, compresseurs et turbocompresseurs étaient utilisés sur les petites cylindrées, en compétition. C'était un bon moyen d'obtenir de la puissance. Le premier défaut des turbos, c'est qu'en augmentant la pression, ils augmentaient la chaleur. Donc, ils réduisaient la durée de vie du moteur... La CSI, puis la FIA établi des équivalences moteurs atmosphériques/moteurs compressés.
Pendant la seconde guerre mondiale, dans l'aéronautique militaire, il y eu d'énorme progrès sur la fiabilisation et le rendement des moteurs. L'industrie automobile en profita. On faisait des V12 et des V8 avec un rendement de 30 ch/l en atmo, à 4 000tr/min. Donc, avec un V8 de 4,0l, vous obteniez un moteur compact, puissant et fiable. Plus besoin de suralimentation. Dans les années 60, les dragsters, eux, avaient besoin d'un maximum de puissance et immédiatement. Le run ne dure que quelques secondes ; vous pouvez hypothéquer la fiabilité. Le turbo fit ses grands débuts.
Les Américains voulurent de la puissance façon dragster, pour la route. Les "Trois Grands" proposèrent donc des moteurs turbo. Garrett, venu de l'aéronautique, fut LE pionnier du turbo pour la route. L'Allemand Kühnle, Kopp & Kausch (KKK), lui, venait de l'industrie lourde.
En 1972, Porsche réalisa que les équivalences de la FIA n'avaient pas bougé depuis les années 40. La 917/30, gavée par deux turbos KKK, survola le championnat de Can-Am 1973. Puis il termina 2e des 24 heures du Mans 1974 avec une 911 RSR. La route était ouverte pour la 935 (1976.) Le turbo s'imposait petit à petit en compétition circuit. Et un an après la 935, la Renault RS01 débutait en F1...
Et pendant ce temps, le turbo faisait son chemin sur les voitures de route. Pour des constructeurs comme BMW ou Saab, qui n'avaient pas de gros moteurs, c'était un moyen de monter en gamme.
Renault fut l'un des grands adeptes du turbo. On commence cette visite par une R5 Turbo encore discrète :
Puis c'est la Turbo 2... Mis à part les phares et les portes, elle n'a plus grand chose d'une R5. C'est un châssis tubulaire, construit par Heuliez (l'assemblage final avait lieu chez Alpine, à Dieppe), avec moteur turbo en position centrale. Elle servait bien sûr pour l'homologation en Groupe B.
Une seule photo ? Oui, il y avait du monde autour. Alors j'ai photographié d'autres voitures, en attendant que ça se libère... Puis j'ai oublié de revenir.
La R18 Turbo (que j'ai oublié de prendre en photo) fut victime d'une méprise. C'était la première voiture proposée avec un turbo-diesel et Renault en fit grand bruit. Le public confondit donc la turbo (essence) et la turbo-diesel.
Histoire quasi-similaire avec la Fuego. La turbo (essence) arriva bien après la turbo-diesel. D'où la confusion...
Au début des années 80, Renault pensait détenir une formule magique. Il suffisait de mettre un turbo sous le capot d'une voiture pour en faire une sportive, à l'image dynamique.
La paire R9 et R11 eu donc droit à ce traitement...
Notez le rappel du mot "turbo" à l'avant des modèles. Il fallait que ça se sache !
Le turbo, ce n'était pas qu'une innovation technologique. C'était aussi un état d'esprit qui collait bien à l'époque. Surtout dans le monde professionnel. "Mettre le turbo" est une injonction à se dépasser. L'heure n'était plus aux vieux businessmen empâtés, vissés à leur bureau, mais sages. C'était le temps des jeunes loups, toujours en mouvement, sans cesse sur le fil du rasoir. Comme ces voitures aux turbos puissants, mais avec une forte inertie et qui cassaient souvent... Jusqu'aux caricatures du Tony Montana de Scarface ou du Patrick Bateman d'American Psycho : "Welcome to the limit/Standing on the razor's edge/Don't look down just keep your head/Or you'll be finished."
La Supercinq GT Turbo (1985) représentait l'apogée de cet ère du turbo. Cette fois, la présentation était carrément tapageuse. Il fallait bien cela face à la Peugeot 205 GTI...
Le turbo tenta également sa chance sur les grosses cylindrées, avec la R25 V6 Turbo.
En Italie, les plus de 2,0l étaient surtaxées. La suralimentation permettait de contourner l'interdit. Il y eu donc une Fiat Croma 2,0l turbo, une Lancia Thema 2,0l turbo, une Alfa Romeo 164 V6 2,0l turbo et plus tard, une Lancia Kappa 2,0l turbo !
En 1988, Renault lança la R21 Turbo. Le phénomène était déjà sur le déclin. En F1, les turbo furent bannis à partir de 1989. Dans les petites cylindrées, l'heure était davantage aux 16 soupapes. La Golf (2) GTI 16S donnait le la. D'ailleurs, Renault lança peu après la R19 16S, puis la Clio 16S. La mode des gros ailerons et des énormes badge "turbo" était passée. Désormais, cela faisait plutôt beauf.
Renault exposait une Megane RS. Effectivement, elle dispose d'un 1,8l turbo, mais c'est un turbocompresseur progressif, présent dès le bas régime. Et puis, il y a les béquilles électroniques et les pneus larges. Et puis, on parle d'une voiture d'1,2t. Bref, on est très loin des fusées à roulettes du début...
La dernière vraie Renault turbo essence, c'était la Safrane biturbo. Une fausse bonne idée de Safrane haut de gamme. Il faut dire qu'elle fut dévoilée au printemps 1992, les essais presse eurent lieu à l'automne 1993 et les premières voitures arrivèrent courant 1994. Soit, deux ans avant le lifting. Trop chère, manquant (malgré tout) de mise au point, ce fut un gros flop.
En bonus, cette Estafette aux couleurs de l'équipe Renault F1. Avec son énorme haut-parleur, on dirait surtout un camion-sono... Je me demande quel était son usage initial...
Pour autant, c'était la toute première victoire d'un turbo en F1.
Renault profite donc du quarantième anniversaire de ce succès pour organiser une rétrospective, à Rétromobile.
Non, Renault n'a pas inventé le turbo.
Le turbocompresseur fut développé à la fin du XIXe siècle par un certain Alfred Büchi, pour des applications industrielles. Lors de la première guerre mondiale, le turbo fut testé sur les avions. Un bon moyen pour alimenter des moteurs à haute altitude, où l'air est plus rare. Dans les années 30, compresseurs et turbocompresseurs étaient utilisés sur les petites cylindrées, en compétition. C'était un bon moyen d'obtenir de la puissance. Le premier défaut des turbos, c'est qu'en augmentant la pression, ils augmentaient la chaleur. Donc, ils réduisaient la durée de vie du moteur... La CSI, puis la FIA établi des équivalences moteurs atmosphériques/moteurs compressés.
Pendant la seconde guerre mondiale, dans l'aéronautique militaire, il y eu d'énorme progrès sur la fiabilisation et le rendement des moteurs. L'industrie automobile en profita. On faisait des V12 et des V8 avec un rendement de 30 ch/l en atmo, à 4 000tr/min. Donc, avec un V8 de 4,0l, vous obteniez un moteur compact, puissant et fiable. Plus besoin de suralimentation. Dans les années 60, les dragsters, eux, avaient besoin d'un maximum de puissance et immédiatement. Le run ne dure que quelques secondes ; vous pouvez hypothéquer la fiabilité. Le turbo fit ses grands débuts.
Les Américains voulurent de la puissance façon dragster, pour la route. Les "Trois Grands" proposèrent donc des moteurs turbo. Garrett, venu de l'aéronautique, fut LE pionnier du turbo pour la route. L'Allemand Kühnle, Kopp & Kausch (KKK), lui, venait de l'industrie lourde.
En 1972, Porsche réalisa que les équivalences de la FIA n'avaient pas bougé depuis les années 40. La 917/30, gavée par deux turbos KKK, survola le championnat de Can-Am 1973. Puis il termina 2e des 24 heures du Mans 1974 avec une 911 RSR. La route était ouverte pour la 935 (1976.) Le turbo s'imposait petit à petit en compétition circuit. Et un an après la 935, la Renault RS01 débutait en F1...
Et pendant ce temps, le turbo faisait son chemin sur les voitures de route. Pour des constructeurs comme BMW ou Saab, qui n'avaient pas de gros moteurs, c'était un moyen de monter en gamme.
Renault fut l'un des grands adeptes du turbo. On commence cette visite par une R5 Turbo encore discrète :
Puis c'est la Turbo 2... Mis à part les phares et les portes, elle n'a plus grand chose d'une R5. C'est un châssis tubulaire, construit par Heuliez (l'assemblage final avait lieu chez Alpine, à Dieppe), avec moteur turbo en position centrale. Elle servait bien sûr pour l'homologation en Groupe B.
Une seule photo ? Oui, il y avait du monde autour. Alors j'ai photographié d'autres voitures, en attendant que ça se libère... Puis j'ai oublié de revenir.
La R18 Turbo (que j'ai oublié de prendre en photo) fut victime d'une méprise. C'était la première voiture proposée avec un turbo-diesel et Renault en fit grand bruit. Le public confondit donc la turbo (essence) et la turbo-diesel.
Histoire quasi-similaire avec la Fuego. La turbo (essence) arriva bien après la turbo-diesel. D'où la confusion...
Au début des années 80, Renault pensait détenir une formule magique. Il suffisait de mettre un turbo sous le capot d'une voiture pour en faire une sportive, à l'image dynamique.
La paire R9 et R11 eu donc droit à ce traitement...
Notez le rappel du mot "turbo" à l'avant des modèles. Il fallait que ça se sache !
Le turbo, ce n'était pas qu'une innovation technologique. C'était aussi un état d'esprit qui collait bien à l'époque. Surtout dans le monde professionnel. "Mettre le turbo" est une injonction à se dépasser. L'heure n'était plus aux vieux businessmen empâtés, vissés à leur bureau, mais sages. C'était le temps des jeunes loups, toujours en mouvement, sans cesse sur le fil du rasoir. Comme ces voitures aux turbos puissants, mais avec une forte inertie et qui cassaient souvent... Jusqu'aux caricatures du Tony Montana de Scarface ou du Patrick Bateman d'American Psycho : "Welcome to the limit/Standing on the razor's edge/Don't look down just keep your head/Or you'll be finished."
La Supercinq GT Turbo (1985) représentait l'apogée de cet ère du turbo. Cette fois, la présentation était carrément tapageuse. Il fallait bien cela face à la Peugeot 205 GTI...
Le turbo tenta également sa chance sur les grosses cylindrées, avec la R25 V6 Turbo.
En Italie, les plus de 2,0l étaient surtaxées. La suralimentation permettait de contourner l'interdit. Il y eu donc une Fiat Croma 2,0l turbo, une Lancia Thema 2,0l turbo, une Alfa Romeo 164 V6 2,0l turbo et plus tard, une Lancia Kappa 2,0l turbo !
En 1988, Renault lança la R21 Turbo. Le phénomène était déjà sur le déclin. En F1, les turbo furent bannis à partir de 1989. Dans les petites cylindrées, l'heure était davantage aux 16 soupapes. La Golf (2) GTI 16S donnait le la. D'ailleurs, Renault lança peu après la R19 16S, puis la Clio 16S. La mode des gros ailerons et des énormes badge "turbo" était passée. Désormais, cela faisait plutôt beauf.
Renault exposait une Megane RS. Effectivement, elle dispose d'un 1,8l turbo, mais c'est un turbocompresseur progressif, présent dès le bas régime. Et puis, il y a les béquilles électroniques et les pneus larges. Et puis, on parle d'une voiture d'1,2t. Bref, on est très loin des fusées à roulettes du début...
La dernière vraie Renault turbo essence, c'était la Safrane biturbo. Une fausse bonne idée de Safrane haut de gamme. Il faut dire qu'elle fut dévoilée au printemps 1992, les essais presse eurent lieu à l'automne 1993 et les premières voitures arrivèrent courant 1994. Soit, deux ans avant le lifting. Trop chère, manquant (malgré tout) de mise au point, ce fut un gros flop.
En bonus, cette Estafette aux couleurs de l'équipe Renault F1. Avec son énorme haut-parleur, on dirait surtout un camion-sono... Je me demande quel était son usage initial...
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