Rétromobile 2022 : 2. Peugeot 104

La Renault 5 fête son cinquantenaire. Voiture mythique, ayant eu un rôle essentiel dans l'histoire de la firme au losange, elle a logiquement droit à un feu d'artifice. 2022, c'est également le cinquantenaire de sa rivale malheureuse, la Peugeot 104. Oui, mais Stellantis a zappé Rétromobile. La 104 doit donc se contenter d'un unique exemplaire, dans le recoin "club" du salon, alors qu'au même instant, chez Renault, les VIP dansent la lambada au milieu des R5. Tout un symbole...

Il faut se rappeler que contrairement à Citroën, Renault ou Simca, Peugeot n'avait aucune expérience des 5cv (on ne parlait pas encore de citadines et encore moins de segment B.) Les "101", "102" et "103", c'étaient des mobylettes !

Dans l'immédiat après-guerre, la firme au lion était parti sur un modèle unique, avec un moteur unique, mais proposé en plusieurs finitions et surtout, plusieurs carrosserie. C'était le modèle économique des Américains, qui représentaient 90% de la production mondiale et donnait le la de l'industrie automobile.
Avec l'évolution et la segmentation de la demande, les Américains ont offert davantage de diversité : choix entre plusieurs moteurs, plus de niveaux de finition et au tournant des années 60, un second, puis un troisième modèle. Les Français copièrent l'idée. A la fin de la décennie, Citroën, Renault et Simca proposaient ainsi trois, voire quatre modèles. A contrario, Peugeot trainait les pieds, avec le binôme 204/304 et la 404. A titre d'exemple, la 404 n'était proposée qu'en deux motorisations (essence ou diesel) et deux niveaux de finition.

Pour la génération suivante, il y avait une vraie montée en gamme, avec les 305 et 504. Impossible de créer une espèce de version dépouillée de la 305, sur le modèle de la 204. Il fallait un modèle en plus. Oui, mais la 204 devait rester au catalogue jusqu'à 1975. En plus, les versions break et diesel connaissaient un succès certain. Peugeot avait peur qu'une 104 équipée du 1,1l XW ne morde sur la 204. De la même façon, la 104 n'eut pas droit à un hayon, de peur que cela grève les ventes de 204 break. Les projets de 104 4 portes et de 104 break ne dépassèrent pas le stade de prototype.
La Peugeot 104 débarqua ainsi au salon de Paris 1972 (soit 9 mois après le lancement officiel de la R5), uniquement en 1l et en 5 portes sans hayon. La 3 portes n'arrivant qu'en 1974.

Sur tous les tableaux (design, motorisation, marketing...) Peugeot a péché par conservatisme. C'était du à un manque d'expérience.

Dans les années 60, la R4 avait perdu la bataille de l'image face à la 2cv. A Boulogne-Billancourt, on comprit deux choses. 1) L'acheteur d'un petit modèle n'était pas forcément quelqu'un ayant de petits revenus. Il existait une clientèle de classe moyenne urbaine qui souhaitait un petit gabarit, mais avec un bonne présentation. 2) La nouvelle génération voulait qu'on lui parle différemment. Il fallait s'appuyer sur un "pop culture" naissante.
D'où cette R5 complètement disruptive avec des couleurs flashy, des équipements inédits à ce niveau de gamme et un dessin animé (les aventures de supercar), en guise de film de lancement.
Ensuite, Renault osa. Des versions encore plus équipées, une version 5 portes, des moteurs plus gros, une communication tournée vers les djeuns... Et son audace fut récompensée.

A partir de là, Peugeot courait après Renault. Qui plus est, à Sochaux, on faisait toujours moins ambitieux et moins audacieux que chez le rival. En prime, les budgets n'étaient pas là. Avec les rachats de Citroën et de Talbot, Peugeot frisa l’indigestion.
Ils eurent d'ailleurs chacun leur 104. La LN/LNA était une 104 "Citroënisée" à la diable. Avec la Samba, Peugeot -ou plutôt PSA- osa enfin déboutonner le premier bouton de la chemise. Et ça marcha. Une bonne leçon pour la suite...

Car dès la fin des années 70, PSA, aux abois, avait fait une croix sur la 104. Il fallait tout miser sur la future 205. La 104 fut ainsi livrée à elle-même pendant une décennie. Car, PSA avait conservé son habitude de transition en douceur et pendant cinq ans, elle cohabita avec la 205 ! Vers 1985, ça devait être rigolo, d'être vendeur VN chez Peugeot-Talbot, entre les 104 et les Samba... Et je ne parle même pas de 1988, lorsqu'il fallait écouler les ultimes 104...

Commentaires

Articles les plus consultés