Trois cents esse aile

Sur les Champs Elysées, on voit quantité de grosses cylindrées modernes : Ferrari, Aston Martin, Bentley... Avant, je les prenais en photo. Mais maintenant, je ne les vois quasiment plus... Puis mon radar interne est attiré par une voiture anthracite. Ailes avant de 300SL/190SL, en cabriolet, mais avec phares sous cloche : aucun doute, c'est une 300SL Roadster ! L'un des 1 858 exemplaires produits entre 1957 et 1963. Là, par contre, ça mérite des photos !

Admirer ce superbe travail aérodynamique. Les ailettes latérales ne sont pas là pour la déco : ce sont des appuis pour éviter que la voiture ne se déleste à haute vitesse. La 300SL profitait largement du transfert de technologie de l'aéronautique militaire (en gros, c'était un Messerschmitt Bf 109 à quatre roues.) Mais ça restait du travail à la règle à calculer. Vous faisiez une maquette, puis vous la mettiez dans la soufflerie, en croisant les doigts. En épinglant des rubans ici et là pour voir où l'air passait... Alors qu'aujourd'hui, vous faites un dessin sur Catia et en direct, vous simulez les flux d'air...
Pour mieux la voir, je suis passé à travers le chantier de la piste cyclable. Comme tous les chantiers parisiens, il avance très, très lentement. Certains accuse la maire de placer des balais-routes des mois avant le début effectif des travaux, pour créer des bouchons et dissuader les automobilistes d'emprunter l'axe en question.
D'ailleurs, à ce propos, faute de vignette Crit'air adéquat, cette 300SL n'était pas censée rouler dans Paris intra-muros, en pleine semaine.

Trop exclusive, la 300SL "papillon" connu un succès mesuré. En 1957, Mercedes-Benz décida de la remplacer par un roadster. Il se voulait plus polyvalent, avec un moteur dégonflé à 215ch (alors que la Talbot-Lago America contemporaine se contentait des 95ch du V8 Simca !) Son 6 cylindres-en-ligne 3l était équipé d'une injection mécanique (inspirée là aussi des chasseurs nazis de la Seconde Guerre Mondiale.) Une technologie performante, mais fragile et couteuse. Le châssis multitubulaire, très complexe, ajoutait également à la facture. On arrivait ainsi à un tarif astronomique de 10 928$. A titre de comparaison, en 1957, la Ford Thunderbird était facturée 3 408$ et elle valait elle-même 1,5 fois le prix d'une Ford Custom !
Alors, en 1963, Mercedes la remplaça par la 230 SL "Pagode", un compromis entre la 300SL Roadster et la 190SL. Mais ça, c'est une autre histoire. Autant la 300SL "papillon" devint immédiatement collector (et donnant lieu à quantité de répliques), autant la Roadster connu davantage un chemin de croix. Les caprices du 6 cylindres, mais sans les portes papillons, ni les 280 en pointe ! Bien sûr, aujourd'hui, les tarifs sont devenus stratosphérique. D'ailleurs, je me demande comment une assurance a pu autoriser le conducteur à rouler dans le trafic parisien avec...

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