Karmann police


C’est la première Volkswagen Karmann-Ghia (type 14) de ce blog. Elle a visiblement été surbaissée et le William Saurin n’est bien sûr pas d’origine. Sans oublier la peinture noire mate. Dommage.

Karmann, ça évoque pour moi… Une usine de tissus de siège. Quand j’étais en IUP, en 2000, en cours d’allemand, on étudiait des articles de la presse économique d’Outre-Rhin. Il y en avait un consacré à la nouvelle usine de tissus de sièges, inaugurée par Karmann, au Brésil. On nous expliquait que la firme était en pleine croissance, qu’elle créait des emplois, que c’était super, etc. Hélas, 10 ans plus tard, le groupe faisait naufrage.
Le métier d’origine de Karmann, c’était la production de hard-top et de cabriolets. Vers 2005, tous les généralistes voulaient avoir au moins un coupé-cabriolet à leur catalogue. Or, seuls Heuliez, Karmann et Pininfarina possédaient les droits de la cinématique d’un coupé-cabriolet. Pour pouvoir avoir un coupé-cabriolet à sa gamme, il fallait le produire chez eux. En même temps, cette sous-traitance intéressait les constructeurs. Ca leur faisait une variable d’ajustement. Bien sûr, la plupart de ces coupé-cabriolets, lourds, patauds et sans aucune image, furent des flops. Karmann avait tenté de se diversifier dans les tissus de siège (voir plus haut), mais c’était insuffisant pour faire face à la chute des coupé-cabriolets. Le groupe ferma en 2010. Notez qu’outre son usine de siège, Karmann possédait un second site au Brésil, Karmann-Ghia. Il a fabriqué la voiture éponyme, ainsi que des Escort XR3 et des Defender (!) Sur la fin, il produisait surtout des portes pour Fiat. Il survécu à la faillite de Karmann. Sur Google, les dernières infos remontent à 2016 : un tribunal a prononcé la liquidation judiciaire ; l’entreprise attend désormais qu’un repreneur se manifeste…

Puisque je parle de mes cours d’allemand. J’avoue que le rangement, ça n’était pas mon fort, à l’époque. Même après l’IUP, j’avais toujours mes vieux polycopiés sur mon bureau. Avec bien en évidence, un autre article allemand : « Nur Klaus sagt nein ! » Klaus, c’est Klaus Esser, le PDG de Mannesmann. A l’origine, Mannesmann fabriquait des tuyaux. Puis, croissance par opportunité, elle se diversifia dans les tuyaux pour l’automobile (et sponsorisa le DTM, via des stickers pour parebrise…), puis dans câbles téléphoniques. Profitant de la libéralisation de la téléphonie allemande et de l’émergence de portable, elle lança son propre réseau, D2. Elle s’offrit même le petit poucet Britannique, Orange. Et voilà que le Britannique Vodafone faisait une OPA hostile ! Vodafone profitait de la bulle des télécoms pour puiser dans les fonds issus de sa capitalisation boursière. Juste avant, en 1999, le chimiste Hoechst et son homologue Rhône-Poulenc avaient fusionné pour former Aventis. Hoechst fut le dindon de la farce ; Rhône Poulenc pris le contrôle du nouvel ensemble. Pour Gerhard Schröder, ce fut un casus belli. Pas question de se refaire avoir avec Vodafone et Mannesmann ! Mais Klaus Esser tenait bon. Même lui, il dit non [à Vodafone] !
Seulement voilà, le capitalisme Allemand manquait de chevaliers blancs. La Deutsche Bank sortait d’une fusion ruineuse avec la Dressdner. Quant à Daimler, il avait fait fusionner son pôle aéronautique avec Aerospatiale-Matra (formant EADS) pour mieux prendre ses distances et se recentrer sur l’auto. Vodafone réussit néanmoins à gober Mannesmann. La Commission Européenne se contenta de lui imposer de vendre Orange (racheté par France Télécom.) Il vendit les activités hors des télécoms, ne se gardant que le réseau de téléphonie. D1 étant sponsor de Benetton, Vodafone mit un pied en F1 et il se retrouva convoité par Jordan, Ferrari et McLaren ! Mais ça, c’est une autre aventure… Moi, j’ai fini par mettre mes cours d’IUP à la poubelle. Terminé le « Nur Klaus sagt nein » ! Quelques années après, Klaus Esser est réapparu dans l’actualité : il fut mis en examen pour délit d’initié. Ainsi, en 2000, tandis qu’il jouait les hérauts du patriotisme économique allemand, Klaus « nein » Esser tuyautait Vodafone sur les moyens de contourner la législation allemande. Dans les OPA hostiles, il y a souvent des Judas. Mais ici, Judas était Jésus !

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