Essai Alfa Romeo Alfetta GT 1800 1975

Il y a près d'un an, j'avais été chez F & F Collection pour essayer une Alfa Romeo Ondine. Quelques mois plus tard, sur la page Facebook du négociant, j'ai vu qu'il avait rentré une Alfetta GT, qu'il restaurait complètement. J'ai dit au gérant que je voulais l'essayer dès qu'elle serait prête. Il ne m'a pas oublié et j'ai pu me glisser au volant de cette Alfetta avant même qu'il ne la conduise lui-même !

Ah, l'Italie des années 70... A l'époque, c'était l'un des poumons industriels de l'Europe. Sur ce blog, j'ai évoqué les voitures et les motos. Mais c'était aussi des ordinateurs, des avions (civils et militaires), etc. Surtout, c'était un leader culturel, avec le cinéma, la musique, les dessins animés, les BD... La production était foisonnante, de Pier Paolo Pasolini à Bud Spencer, de Nino Rota à Tarzan Boys, de Mordillo aux funetti... Il y en avait pour tous les goûts !
Aujourd'hui, tout à disparu. Fiat, l'ex-leader du marché Européen, n'est même plus dans le top 5. C'était quand, la dernière fois que vous avez vu un film Italien ou écouté un tube Italien ? La dernière génération de grands artistes, les Eros Ramazotti, Nanni Moretti ou Robert Benigni ont les tempes grises et il n'y a personne pour les relayer... L'Italie s'est même faite doubler par l'Espagne et la Suède dans la production de tubes dance au kilomètre ! Et le football... La non-qualification de l'Italie à la coupe du monde est symptomatique. La Juventus de Turin ou le Milan AC ont perdu de leur superbe. Les jeunes footballeurs rêvent davantage d'Espagne et de Grande-Bretagne...
Il n'y a qu'un seul domaine où l'Italie a su éclore : le prêt-à-porter. Les Daniel Hechter, Pierre Cardin, Ted Lapidus et autres Cacharel faisaient de la mode pour petit-bourgeois cultivés et discrets. Polo boutonné jusqu'au cou et pull sur les épaules. Dès les années 50, avec Brioni, les Italiens avaient compris que c'était aux marques de se mettre au niveau de leur clientèle (et non l'inverse, comme chez les Français.) C'est le règne de Dolce & Gabbana, de Versace, d'Emporio Armani, de Moschino... Des gros logos, des dorures et des couleurs vives. Une mode pour parvenus : je débarque dans un palace, téléphone vissé à l'oreille et chemise ouverte jusqu'au nombril, mais je t'emmerde, parce que je suis riche ! Ca a plu aux Américains, puis aux Russes et enfin aux Chinois. Une vraie success story !

Bref, revenons à cette Alfetta GT 1800 de 1975...
Style extérieur
Comme son nom l'indique, l'Alfetta GT dérive de la berline Alfetta, dont elle ne conserve aucun panneau de carrosserie.
J'adore sa ligne. C'est très dynamique ; la voiture semble prête à bondir. Le rouge ajoute bien sûr à l'agressivité. L'Alfetta GT fut lancée en 1974 et produite jusqu'en 1987 (sous le nom de GTV.) Or, jusqu'au bout, sa ligne restait d'actualité, avec ce profil 2 volumes. Alfa Romeo avait su bien intégrer des éléments modernes, en plastique noir typiquement 70s, avec des chromes plus chics. On note aussi des effets pour arrondir les angles (nervures latérales, phares ronds à l'avant...)
Il faut se rappeler qu'au milieu des années 70, la tendance, c'était les caisses carrées, taillées à la hache. Il y a quelques années, à Rétromobile, Youngtimer Magazine avait justement réuni les voitures sorties en 1976. L'Alfa est incontestablement la plus belle et la plus moderne du lot...
Pardon ? Oui, sur ce lien, c'est une Alfasud Sprint et non une Alfetta GT ! Techniquement, l'Alfasud Sprint n'a rien à voir (c'est une traction à moteur boxer, basée donc sur l'Alfasud.) Elle est sortie deux ans plus tard et Giorgietto Giugiaro (qui avait signé l'Alfetta GT) a incontestablement recyclé son dessin... La Junior Z de 1969, avec ses quatre phares ronds, ses feux arrières horizontaux et ses deux volumes (une première chez Alfa) a du inspirer le designer, tout comme le projet mort-né de coupé sur base Alfa 6 (vers 1971), signé Marcello Gandini. L'Alfasud (1971) également signée Giugiaro, reçu en 1978 un lifting avec calandre noire, intégrant quatre phares ronds. Pas gêné, Giugiaro recycla les idées d'Alfa sur le concept-car Asso di Picche (1973), proposé à Audi. Faute de retour positif, Giugiaro vendit le dessin à Isuzu et -après quelques modifications-, il devint la Piazza (1981.)
Les designers Italiens aimaient bien la photocopieuse... Les constructeurs Asiatiques (Japonais, puis Coréens et Chinois), ça ne les gênait pas d'avoir un dessin avec des traits évoquant un tiers. A la limite, pour ces nouveaux-venus, c'était même un plus. Les Européens se souciaient davantage de leur image de marque et de leur univers. Ils voulaient des dessins plus personnels, ils créèrent leur propre bureaux de style. Et à force de scier la branche sur laquelle ils étaient assis, les designers Italiens se sont cassé la figure...
Intérieur
On retrouve ce mélange d'ambiance 70s (avec le skaï et l'intérieur noir) et de touches rétro (comme le grand volant cerclé, en bois.) En tout cas, on se croirait dans une voiture de compétition de l'époque : le compte-tour est bien en face de vous, avec sa zone rouge à 6 000 tr/min (alors que même les 6 cylindres BMW tournaient à 5 500tr/min.) Au milieu de la console, il y a de quoi surveiller le 1800 : température d'eau et d'huile, pression d'huile... Vous êtes fin prêt pour Monza (ou le San Remo, c'est selon.)
Il y a une ceinture trois-points, mais sans enrouleur !
Moteur/tenue de route
L'Alfetta GT est apparue avec une version 1800 121ch du célèbre double-arbre. Sous le capot, on n'a pas encore ces couvre-culasses disgracieux et il apparait dans toute sa splendeur. Au démarrage, on a un beau bruit, bien viril.

Les manœuvres à petite vitesse, avec le gros volant (et bien sûr, sans direction assistée) sont ardues. Le levier de vitesse à gros débattement est handicapant pour enchainer les rapports. Mais le plus déconcertants, ce sont les réactions de la caisse. Au moindre virage, elle verse, façon 2cv ! Survirage ? Non, elle est prévue comme ça. On est trop habitué aux voitures modernes, collées à la route. C'est donc un autre style de conduite, où il faut se fier aux roues et non au mouvement de caisse. Et bien sûr, la voiture se lève à l'accélération. Une fois qu'on a saisi le mode d'emploi, c'est très fun. Le 1800 revendique un 195km/h en pointe (une vitesse d'ordinaire réservée au 6 cylindres, en 1975.) Et le freinage est bluffant.
Conclusion
Du très enthousiasmant ! Un look (intérieur et extérieur), un bruit et un tempérament au diapason. C'est un témoignage d'un Alfa Romeo ambitieux, qui donnait alors le LA en matière de coupés sportifs. Malgré seulement 121ch pour 1,1t, l'Alfetta GT est une vraie sportive. On réalise à quel point la tenue de route a progressé depuis... Après avoir goûté l'Alfetta GT 1800, ça donne envie de voir les versions avec davantage de chevaux. Il y a eu des GTV 6, des Autodelta avec 2,0l turbo (un KKK qui envoyait la purée sans préavis) et en compétition, des GTV équipées du V8 de la Montreal...

Mais la journée ne faisait que commencer...

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