FAW-VW Jetta King par XCartoys

XCartoys est LE fabricant de voitures Chinoises au 1/64e. Il reproduit volontiers les modèles des années 90 et 2000, y compris les productions les plus obscures. A se demander y trouve-t-il assez d'acheteurs pour être rentable ! En attendant, voici la FAW-VW Jetta King.


Comme à chaque fois, la reproduction est fidèle jusque dans les moindres détails. 

Malheureusement, ma FAW-VW Jetta "tout court" au 1/64e est au fond d'un carton. Impossible de les comparer de visu. En tout cas, par rapport à celle-ci (qui était fabriquée par un autre), la Jetta King est beaucoup mieux finie.

La boite possède un logo "Jetta" (qui est une marque à part entière, en Chine), mais rien ne prouve que XCartoys a effectivement obtenu l'imprimatur de Volkswagen...

La Jetta 2 arriva en Chine fin 1991. Le site de Changchun mua par étape d'un unité d'assemblage (CKD) vers une vraie usine de production (built-up.) Mais même pour la Chine des années 90, la Jetta était ridée. La Fukang (ZX) lui donna un coup de vieux et nombre de constructeurs étaient dans les starting-blocks pour produire en Chine.

Volkswagen fouilla dans ses bennes. La Passat (B4), plus produite depuis peu, donna ses optiques avant. Vu qu'elle était 3cm plus large, le masque fut raboté pour s'adapter à la Jetta. L'arrière, lui, resta d'origine jusqu'à la Jetta Pioneer. La nouvelle Golf IV donna son 1,6l "AE113" 99ch, plus moderne que l'ancien 1,6l des années 80. Ils en profitèrent pour l'équiper de l'ABS. Par contre, la boite restait une antique boite manuelle à 4 rapports. Enfin, ils trouvèrent un vieux stock de planches de bord de Corrado.
Ils ont mis tout cela dans un shaker géant et cela donna la Jetta King de 1997 !

L'état Chinois avait forcé Citroën a faire d'emblée de la production à forte valeur ajoutée Chinoise. Volkswagen, lui, avait davantage de latitude et son maitre-mot fut "progressivement".
Chez FAW-VW, le transfert de l'outillage de Westmoreland s'effectua pas à pas. Volkswagen recrutant et formant les Hommes qui venaient derrière les machines. De même, il travailla avec les équipementiers locaux, attendant qu'ils montent en compétence.
En 1995, la ligne d'assemblage de la Jetta démarra. L'ancien atelier de CKD fut reconverti dans l'assemblage de Audi 200. Il s'agissait cette fois de former les ouvriers aux standards d'Audi. En parallèle, une seconde unité de production fut construite. Cette fois, avec des machines inédites : elle allait produire de Audi A6 (C4) à partir de 1999.
Puis ce serait au tour de la première chaine d'évoluer. Les machines de Westmoreland allaient être remplacées par du dernier-cri.

En 1990, la Chine avait produit environ 100 000 véhicules, parmi lesquels une courte majorité de VU (VUL, PL, mais aussi les Jeep Cherokee.) Les SAIC-VW Santana et [Hong Qi] Audi 100 formaient la quasi-intégralité de la production de VP. Pour 2000, le Pays du Milieu tablait sur 400 000 véhicules, dont deux tiers de VP (soit quasiment une multiplication par six de la production de voitures.)
Le pays ayant une tradition de prévisions "optimistes", les constructeurs étrangers prirent cet objectif avec des pincettes.
En plus des travaux chez FAW-VW, Volkswagen avait métamorphosé le site SAIC-VW d'Anting, près de Shanghai. Avec les introductions programmées de la Polo et de la Passat chez SAIC-VW et de la Bora chez FAW-VW, Volkswagen produirait six modèles à l'horizon 2003. Avec une capacité totale de production d'un demi-million de voitures, soit les trois quart du marché Chinois, d'après les prévisions de 1990...

Sauf que dès 1992, avec l'entrée en production de la Xiali et de la Jetta, la Chine dépassait les 100 000 voitures particulières. Les 200 000 furent atteint dès 1992. Et ce n'était qu'un début... Surtout, l'économie Chinoise s'envolait, avec une classe moyenne toujours plus nombreuse. Posséder une voiture était un marqueur social fort. Ça vous posait son patron de PME !
La demande en berlines de milieu de gamme semblait intarissable. Faute de système bancaire fiable, les acheteurs débarquaient en concession avec des sacs de riz ou des cartons remplis à ras-bord de billets de 100 yuans (qui valaient alors 10€.)

L'offre ne suivait pas la demande. La Chine avait eu la main leste sur les licence de constructeur (un sésame indispensable pour pouvoir produire des voitures) et Volkswagen voyait ses parts de marché fondre comme neige au soleil. Surtout, il ne pouvait pas y faire grand chose. Certes, les Allemands sont spécialistes dans la rigidité des plannings. Et pas question de passer à l'étape suivante, tant qu'on n'a pas validé tous les sous-jalons.
Mais en même temps, davantage de flexibilité aurait eu peu d'effets. Le problème évident, c'est le site. Il faut trouver un vaste terrain, convaincre la bureaucratie Chinoise et enfin, vous pouvez poser la première pierre. Puis il faut l'équiper. Les robots, presses, etc. sont souvent réalisés sur-mesure, en fonction des contraintes de votre site et de vos besoins. Du premier cahier des charges à la livraison finale, il peut se passer des mois. Pour la Jetta, Volkswagen disposait d'une usine moderne, à l'arrêt, à Westmoreland. Il n'avait eu qu'à la déménager en Chine. Désormais, il n'avait plus rien en stock. Sans oublier que les équipementiers étaient également en tension.
Second souci : où trouver une main d’œuvre qualifiée ? Historiquement, FAW construisait des camions de technologie soviétique, quasiment à la main. Une production unitaire également pour la filiale Hong Qi et sa limousine hors d'age. Les Allemands avaient du quasiment repartir de zéro. Malgré tout, les chaines tournaient moins vite qu'en Europe et elles ne produisaient des voitures que dans une seule finition, une seule motorisation et une seule couleur ! Quand bien même Volkswagen aurait construit une usine, il faudrait ensuite recruter des milliers d'ouvriers, puis les former.
Un problème moins souvent évoqué, c'est celui des cadres supérieurs. On peut former un monteur ou un soudeur. En revanche, difficile de s'improviser manager ou ingénieur ! Beaucoup de trentenaires et de quadragénaires ne connaissaient absolument rien à l'automobile. D'ailleurs ils n'avaient même pas le permis de conduire ! C'étaient les étudiants des Grandes Écoles Chinoises, qui manifestaient place Tienanmen (et dans quelques grandes villes.) La répression fut terrible et longue. Au milieu des années 90, les amphis se garnissaient de nouveau. La jeunesse était d'ailleurs surnommée "post-90". Les grandes entreprises faisaient le pied de grue à la sortie des grandes universités. De jeunes diplômés étaient bombardés cadres supérieures. Certains se retrouvaient peu après à siéger dans les conseils d'administration. Seuls quelques rares occidentaux étaient près à poser leurs valises dans une Chine encore sauvage. Les grands groupes prospectaient dans la diaspora Chinoise : Hong-Kong, Macao, Taïwan, Singapour... Ils pouvaient s'adapter plus facilement. Or, Volkswagen était jusqu'ici peu implanté en Asie. A contrario, Japonais et Coréens étaient bien établis en extrême-orient : ils pouvaient promouvoir en interne des cadres chevronnés, maitrisant le mandarin. Sans surprise, Japonais et Coréens furent les grands gagnants de l'automobile Chinoise des années 1995-2005. Malgré tout, il y avait des tensons entre "Haiwai Huaren" et leurs subordonnés Chinois.
A un jet de pierre de l'usine FAW-VW de Changchun, il y a la province du Liaoning. Sidérurgie, pétrochimie, industrie ferroviaire... C'était la cœur de l'industrie lourde Chinoise. Beaucoup d'usines avaient été créées par l'occupant Japonais, au temps du Manchukuo, d'autres remontaient jusqu'à la Chine impérial. Pékin avait jugé les usines trop vétustes (on y produisait notamment des locomotives à vapeur !) et pas assez rentables, donc il ferma tout. Malgré la vivacité de l'économie Chinoise, le pays compta une perte nette de 20 millions d'emplois au fil des années 90. C'était les dommages collatéraux de la modernisation à marche forcée. Le Liaoning, aussi peuplé que l'Espagne, était l'une des provinces les plus touchées. Or, dans ces usines, il y avait des ouvriers qualifiés et des cadres. Certains s'entassèrent dans un camion vers Changchun. Les plus jeunes et les plus hardis acceptèrent des emplois subalternes et moins bien payés que ce qu'ils avaient autrefois. Les plus vieux, incapable de s'adapter à un environnement occidentalisés et souvent très malades, rentrèrent bredouille. L'usine Jinbei de Shenyang, préfecture du Liaoning devait éponger ce chômage massif et elle avait elle-même du mal à trouver des profils adéquats.

Revenons à la Jetta. Le développement Chinois surpris tout le monde. Volkswagen et GM investirent lourdement, faisant le pari que la croissance allait se poursuivre durant une décennie. Ferdinand Piëch voulait faire de VW le N°1 mondial et avec ses volumes, la Chine était un marché incontournable.
Les Allemands rattrapèrent leur retard. En 2008, il écoula un million de voitures dans l'année. En 2010, chacune de ses deux joint-ventures avait une production à sept chiffres. Parmi les pionniers du Pays du Milieu, Volkswagen est le seul à avoir encaissé les différents coups d'accélérateurs du marché.

En 2003, la Jetta King évolua. Esthétiquement, on remarque surtout les boudins ton caisse. Elle reçu un 1,6l EFI 95ch (a priori, un FSI "descendu"), moins puissant, mais plus économe que le précédent bloc. Surtout, on pouvait désormais choisir la finition et la teinte de sa Jetta !
Avec 10 000 ventes par mois, la Jetta King était au sommet des ventes. Sa seule rivale était la Santana ! Pour autant, les flottes -en particulier les taxis- absorbaient l'essentiel de la demande. Volkswagen avait compris que la classe moyenne ne voulait pas d'une berline low-cost antédiluvienne, même replâtrée. Avec la Passat (B5) et la Polo, il avait pris le train de la modernité. Accessoirement, les marges sur les Jetta et Santana -vendues à vil prix- étaient faible.
En 2010, FAW-VW relifta une dernière fois la Jetta 2, qui devint Jetta Pioneer. Volkswagen aurait voulu la bazarder, mais FAW fit pression pour qu'elle effectue un dernier passage. Elle fut presque exclusivement vendue aux flottes. Surtout, elle était assemblée à Chengdu, dans une petite usine, bâtie pour l'occasion. Notez que Chengdue avait une meilleure productivité que la grande usine de Changchun, pré-2003. C'est dire les bons de géants effectués par l'industrie Chinoise... En 2013, après 22 ans de carrière Chinoise (et 29 ans de carrière totale), la Jetta 2 quitta discrètement la scène.

Commentaires

  1. Bravo ! Bravo surtout d'être arrivé à nous intéresser sur les aventures d'une vieille VW dans l'Empire du milieu !

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