El Hombre Dorado

Des Cadillac Eldorado, on n'en croise pas souvent ! Pour commencer, je vais vous parler... D'El Dorado (en deux mots.) Parmi mes passions, il y a les récits des conquistadors.

Dans l'Europe de l'ouest du milieu du XVe siècle, il existait de très bons pilotes de navires et d'excellents géographes. Sans GPS, ils ont réussi à cartographier les cotes, du Sud Marocain jusqu'aux iles Lofoten en Norvège, des iles Irlandaises jusqu'à la Caspienne... Les gens pensaient alors qu'ils connaissaient 99% de la planète et de ses ressources. Ils savaient qu'à l'est, il y avait l'Inde et la Chine. Marco Polo et surtout les Jésuites, en fournissaient des récits détaillés. Depuis l'antiquité, nombre de marchandises (soieries, porcelaines, épices...) arrivaient d'Asie, via la Route de la Soie. Portugais et Espagnols étaient géographiquement au bout de la chaine et bien sûr, chaque intermédiaire se sucrait au passage... Pour accéder directement à l'Asie, ils pouvaient tenter de prendre le contrôle de la Route de la Soie. Ce qui impliquait de faire la guerre aux Arabes, aux Perses, aux Tartares, aux Mongols... Néanmoins, ils savaient aussi qu'en Chine et en Inde, il y avait des ports en eaux profondes. Les Portugais venaient de concevoir une évolution de la caraque, la caravelle, capable de naviguer en haute mer et d'y rapporter plusieurs tonnes de marchandises. D'où l'idée du prince Portugais Henri le navigateur : envoyer quelques caravelle direction l'Inde. Le plus facile, c'était de contourner l'Afrique... En effet, sur les cartes Arabes, la terre semblait s'arrêter au sud de la Libye. Donc, ils s'imaginaient qu'au sud du cap Boudjour, il y avait un passage vers l'Est...Gil Eanes, en 1434, découvrit la cote de l'actuel Sahara Occidental. Mais il vit surtout que non, il n'y avait pas de passage vers l'est. Ensuite, les navigateurs allèrent toujours plus au sud, mais toujours pas de passage. Il fallu attendre Vasco de Gama, en 1498, pour enfin contourner le continent... L'autre alternative, c'était de partir vers l'ouest. On était à peu près sûr que la terre était ronde et l'Inde était forcément, là, à l'ouest ! Les Portugais découvrirent ainsi les Açores et les Iles de Cap Vert. Christophe Colomb, lui, déclarait que l'Inde était beaucoup plus loin. Le souci, c'est qu'autant les pilotes Européens connaissaient chaque golfe, chaque récif et chaque courant des cotes occidentales, autant au-delà du Cap Vert, c'était l'inconnu... Colomb a découvert des iles des Caraïbes. Les navigateurs suivant trouvèrent d'autres iles, des terres... Mais toujours pas de route vers l'Inde. 11 ans après Colomb, Amerigo Vespucci écrivit dans Mondus Novus que ces terres n'étaient pas un archipel comme les Açores, mais bien un continent.
Le nouveau paradigme, ce n'était plus de chercher la route vers l'Inde. L'expédition de Magellan démontra qu'en fait, c'était encore plus compliqué par l'ouest, que de contourner l'Afrique ! Par contre, ce nouveau continent s'avérait très riche. Les conquistadors n'étaient pas des navigateurs et encore moins des explorateurs. Eux, ils étaient là pour bâtir des colonies et prendre le contrôle des ressources (notamment les mines d'or.) La grande question, c'était où étaient les richesses ? Les informations ne manquaient pas. Depuis l'antiquité, il y avait plein d'histoires plus ou moins légendaires d'hommes ayant navigué vers l'ouest. Saint Brendan, un moine Irlandais, aurait ainsi abordé Terre Neuve au VIe siècle ! Entre le scorbut, les maladies tropicales, les naufrages et surtout, les batailles perdues face aux Indiens, nombre d'expéditions furent des désastres, laissant peu de survivants. Parfois, dans une taverne, vous pouviez croiser un vieux marin, unique rescapé de telle épopée et qui se rappelle plus ou moins de là où il était parti... Le plus dur, c'était d'avoir de l'information de qualité.
C'est comme cela qu'ils entendirent parler une cérémonie sur le lac Guatavita. Les Indiens construisaient un radeau, recouvert de feuilles d'or et chargé d'objets en or. Le radeau était incendié, puis mis à l'eau. Comme cela, une fois en cendres, il finissait par couler à pic, au fond du lac. De quoi faire plaisir à la déesse du lac... Variante : un prêtre, couvert de feuilles d'or, se jetait dans le lac et s'y "lavait". C'était la légende de "l'homme dorée" (El Hombre Dorado, en espagnol.) De fil en aiguille, on parlait de cités, en Colombie, où les maisons étaient entièrement couvertes d'or. C'était le mythe d'Eldorado. Les conquistadors se rendirent au lac Guatavita, qu'il tentèrent d'assécher. Cela prit quatre siècles et ils récupérèrent juste un peu d'or. Depuis, le lac fut submergé de nouveau. D'autres, comme Sir Walter Raleigh, à la fin du XVIe siècle, cherchèrent encore ces mystérieuses cités d'or... Et bien sûr, l'histoire servi de base au dessin animé éponyme. Enfant du soleil, tu parcoures la terre, le ciel...
En 1952, Cadillac fêtait son cinquantenaire. Pour leur concept-car anniversaire, ils voulaient un nom évoquant l'opulence et l'or... D'où le choix d'Eldorado. Aujourd'hui, cette référence aux conquistadors, donc à l'exploitation des Indiens, serait ultra-politiquement incorrecte.
L'année suivante, l'Eldorado devint la version luxueuse du cabriolet série 62. Au fil des générations, elle s'est pas mal embourgeoisée. En 1967, elle devint un coupé. Après un retour du cabriolet, dans les années 70, l'Eldorado redevint exclusivement un coupé.

Celle du jour est une Eldorado TC de la dixième génération. Son V8 4,9l développait 204ch. De quoi atteindre 205 km/h, malgré 1 845kg sur la balance. Consommation : 19,4l aux 100km en urbain ! Prix : 388 000 francs, soit une demi BMW 850i.
Un prix en francs ? Oui, car cette voiture fut importée par NAVI.

Au lendemain de la guerre, les Américaines étaient à la mode. Pour s'en offrir une, il fallait disposer d'un compte en dollars. Malgré tout, cela vous posait un PDG. Des importateurs indépendants tentaient vaillamment de faire venir en France des Américaines. Dans Le cave se rebiffe, on en voyait un.
Jean Charles Automobiles débuta son activité dans les années 70. Il devint le fournisseur des stars. Dans les années 80, il se mua en importateur officiel de Cadillac et il éditait des brochures en français. En 1992, sous l'impulsion de la CEE, la France du relâcher sa réglementation sur les importations extra-européennes (créée pour empêcher les Japonais d'envahir le marché.) Jean Charles Automobiles en profita pour créer NAVI, avec un réseau de concessionnaires. Cette structure proposait une gamme piochée dans différentes marques de GM USA (Chevrolet Beretta/Corsica, Buick Park Avenue, Pontiac Trans Sport et Firebird... Et toujours, les Cadillac), en réponse au Chrysler de Sonauto. Par la suite, pour plus de clarté, NAVI se recentra autour des Chevrolet et de Cadillac (la Pontiac Trans Sport et l'Oldsmobile Alero gagnant ainsi un "+".)
Puis GM décida de reprendre en direct NAVI. Entre amateurisme, changement régulier d'importateur et directives contradictoires, les GM US ont connu un calvaire durant les années 2000. En 2013, Jean Charles Automobiles du fermer ses portes et se reconvertir dans la restauration d'Américaines, à Argenteuil.
Pour finir, évoquons GM ! Je suis toujours très dubitatif... Il y a dix ans, GM était un bateau ivre d'une quinzaine de marques (hors participations), avec peu de synergies. Depuis, il s'est offert un régime amaigrissant radical : liquidation de Hummer, Pontiac, Saab et Saturn, revente des participations dans Suzuki et Subaru, retrait de Chevrolet d'Europe, fermetures d'usines aux USA et en Australie, retrait de Russie, revente d'Opel/Vauxhall... Et aujourd'hui, fermeture à moyen-terme des usines de GM-Korea (ex-Daewoo.)
Ma première impression, c'est que pour détacher Opel/Vauxhall de GM, le groupe a sorti la tronçonneuse. Du coup, le groupe n'est presque plus présent en Europe. Au Brésil et au Mexique, Chevrolet va faire face à un problème à court-terme, vu qu'il vend des Opel rebadgées. Idem pour Buick et Holden. Tandis que PSA se retrouve avec des Opel vendues en Amérique Latine et en Afrique du Sud qui l'intéressent moyennement.
Le second constat, c'est que le GM actuel est très rabougrit. Il n'a plus que cinq marques (hors Wuling/Baojun, dont il ne possède qu'un tiers), une présence très confidentielle en occident et une marque à peu près mondiale, Chevrolet, qui n'a plus de stratégie globale. On retombe sur les questions de taille critique, comme Mitsubishi ou autrefois, British Leyland. Normalement, lorsqu'un groupe industriel se restructure, il y a un volet "liquidation" et un volet "investissement". Or, depuis deux ans, GM ne donne pas l'impression d'investir où que ce soit. C'est encore une fois, le triomphe des contrôleurs de gestion et la volonté de bien figurer en bourse, face à une stratégie à long terme. Le risque évident, c'est que GM se retrouve sous la menace d'un raider, notamment Indien ou Chinois...

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