Rétromobile 2020 : 27. Tracteurs
En tant que citadin, je croise rarement des tracteurs agricoles. Donc, j'en parle tout aussi rarement. Pourtant, beaucoup de modèles ont un intérêt historique. Alors, lorsque Rétromobile en expose plusieurs, j'en profite...
Les tracteurs Porsche-Diesel sont les plus convoités du genre !
De 1952 à 1963, Porsche produisit des tracteurs. Dans la RFA du miracle économique, c'était une activité lucrative. De quoi permettre à un petit constructeur de faire la soudure. Ils ont arrêté en 1963, sans doute car l'activité automobile était suffisamment rentable. De plus, produire des tracteurs agricoles, ça n'était plus compatible avec l'image de constructeur de voiture de sport. Plus prosaïquement, Porsche n'avait ni les moyens, ni l'envie de lutter dans un marché de plus en plus compétitif.
Avec le lancement du Cayenne Diesel, les tracteurs Porsche-diesel sortirent de l'oubli. Mais ce 218 proposé pour 20 000€ par ArtCurial ne trouva pas preneur.
Tracteurs et voitures de sport, incompatibles ? Lamborghini prouve le contraire !
Venu d'une famille de viticulteurs, Ferruccio Lamborghini a fait fortune en fabricant des tracteurs pour les vignobles de Modène. Grâce au vinaigre balsamique, les viticulteurs avaient les moyens.
Ensuite, mécontent de sa Ferrari, il en aurait été dire deux mots à Enzo F., qui l'aurait renvoyé dans les cordes. Furieux, le patron aurait décidé de créer sa propre marque. Une belle légende, hélas, très probablement fausse.
Lui, par contre, il est parti pour 17 880€... Mais ArtCurial en attendait 20 000€ !
Un peu plus loin, on trouve un second tracteur Lamborghini. L'ironie de l'histoire de Ferruccio, c'est que les tracteurs firent sa fortune... Et sa chute.
En 1971, son importateur Sud-africain annula au dernier moment une grosse commande. Quelques mois après, la Bolivie connaissait un coup d'état. Or, Lamborghini devait expédier des tracteurs là-bas. Nouvelle commande annulée. Les invendus s'accumulaient. Mais la région de Bologne est contrôlée par les communistes : Ferruccio s'était engagé auprès des syndicats à ne jamais licencier. Ruiné, il vendit ses tracteurs à SAME. Insuffisant pour éponger les dettes. En parallèle, les ventes de voitures chutèrent avec la crise du pétrole. Ferruccio du vendre des parts de Lamborghini Automobili, avant de se désengager complètement.
Un autre Porsche-diesel. Il était destiné aux plantations de café du Brésil. Les caféiers sont fragile et là, les branches pouvaient glisser sur la machine...
La Manufacture d'Armes de Paris produisait des fusils depuis la Commune. Elle s'est diversifiée dans les sous-ensembles pour l'aéronautique et les motos (ses moteurs propulsant nombre de cyclecars.) A la fin de la guerre, MAP tenta de se diversifier dans les tracteurs agricoles, mais c'était trop tard.
Simca importait des tracteurs Steyr et Fiat durant l'entre-deux guerre. En s'offrant MAP, il montait en compétence. La division prit le nom de Someca (Société de Mécanique [de la Seine].)
Lorsque Fiat vendit Simca à Chrysler, il se garda Unic et Someca. Fiat rêvait de vendre des camions et des tracteurs conçut en Italie, mais fabriqués en France. Ni les uns, ni les autres ne convainquirent. Unic fut fondu dans Iveco et Someca, dans Fiatagri.
Tracteurs et voitures de sport, troisième, avec ces David Brown !
David Brown avait eu l'idée de construire des tracteurs, en collaboration avec Henry Ferguson. Ce fut une diversification réussit pour l'entreprise familiale de mécanique (fondée par le grand-père de David Brown, également prénomé David Brown !)
Durant la guerre, David Brown fournit des tracteurs pour tirer les avions sur les aérodromes. Sa fortune faite, il s'offrit Lagonda, puis Aston Martin...
Le père d'Henry Ford avait quitté l'Irlande, fuyant la famine. Le futur constructeur grandit dans une ferme du Michigan.
Bien des années plus tard, dans les années 10, Henry Ford était l'homme le plus riche et le plus puissant des Etats-Unis. Sa motivation pour poursuivre n'était plus économique. Désormais, il allait changer le monde.
Avec sa Ford T, Henry Ford avait motorisé les petites classes moyennes. Son nouveau projet était d'équiper chaque fermier d'un tracteur. Le travail à la ferme serait moins pénible. Surtout, les fermiers pourraient produire davantage. Et moins cher. Il n'y aurait plus de famine. Henry Ford tint à ouvrir une usine à Cork, près du village d'origine de ses parents. Et lorsque la Chine connu une famine biblique, Ford voulu y implanter une usine de tracteurs !
Depuis le début du XIXe siècle, on tentait de mécaniser l'agriculture. De lourds moteurs à vapeur, montés sur roues (mais incapable de se mouvoir d'elle-même) entrainaient moissonneuses et batteuses, via une courroie. Il y en avait encore une en activité, dans les années 50 dans le petit village savoyard où ma mère passait ses vacances, étant enfant. En 1901, Daniel Albone lança l'Ivel, le premier véhicule agricole autopropulsé, produit en série. Mais il restait cher.
Dès 1905, Henry Ford se pencha sur les tracteurs agricoles. Néanmoins, son Fordson ne sortit qu'en 1917. Les fermiers Américains se jetèrent dessus. Henry Ford était "un des leurs". Dans les années 20, les autres fabricants réagirent. Le Farmall d'International Harvester ou la gamme d'Allis-Chalmers prirent Ford à son propre jeu. Les prix des tracteurs baissèrent. En 1928, Ford arrêta de produire des tracteurs aux USA (mais il reprit la production dix ans plus tard, via un accord avec Henry Ferguson.)
Les fermiers Américains s'endettèrent pour s'offrir ces tracteurs. En 1929, avec la crise, le rêve tourna au cauchemar. Les banques, au bord du gouffre, exigèrent le remboursement immédiat des emprunts. Les fermiers étaient incapable de rembourser. En prime, avec la surproduction agricole, les prix avaient chuté au-delà du point d'équilibre des fermiers. Et malgré tout, cela restait hors de prix pour les chômeurs. Bientôt, les fermes furent fermées en masse et il y eu un exode rural tout aussi massif. Parfois, les banques -elles-mêmes en crise, rappelons-le-, autorisaient les fermiers à garder leurs biens, pourvu qu'ils leur donne le moindre cent gagné.
Henry Ford rêvait d'aider les ruraux ; il avait au contraire précipité la destruction du monde rural.
Pour finir, un tracteur Citroën. En 1919, le modèle économique d'André Citroën, c'était Henry Ford. Et puisque Ford fabriquait des Fordson, Citroën allait lui aussi commercialiser des tracteurs agricoles !
Mais très vite, le patron eu d'autres chats à fouetter. Quelques années plus tard, il y revint avec un tracteur monté sur chenilles Kégresse. Enfin, au temps des Michelin, il y eu le Type J, un tracteur dérivé des Traction Avant 7cv.
Les tracteurs Porsche-Diesel sont les plus convoités du genre !
De 1952 à 1963, Porsche produisit des tracteurs. Dans la RFA du miracle économique, c'était une activité lucrative. De quoi permettre à un petit constructeur de faire la soudure. Ils ont arrêté en 1963, sans doute car l'activité automobile était suffisamment rentable. De plus, produire des tracteurs agricoles, ça n'était plus compatible avec l'image de constructeur de voiture de sport. Plus prosaïquement, Porsche n'avait ni les moyens, ni l'envie de lutter dans un marché de plus en plus compétitif.
Avec le lancement du Cayenne Diesel, les tracteurs Porsche-diesel sortirent de l'oubli. Mais ce 218 proposé pour 20 000€ par ArtCurial ne trouva pas preneur.
Tracteurs et voitures de sport, incompatibles ? Lamborghini prouve le contraire !
Venu d'une famille de viticulteurs, Ferruccio Lamborghini a fait fortune en fabricant des tracteurs pour les vignobles de Modène. Grâce au vinaigre balsamique, les viticulteurs avaient les moyens.
Ensuite, mécontent de sa Ferrari, il en aurait été dire deux mots à Enzo F., qui l'aurait renvoyé dans les cordes. Furieux, le patron aurait décidé de créer sa propre marque. Une belle légende, hélas, très probablement fausse.
Lui, par contre, il est parti pour 17 880€... Mais ArtCurial en attendait 20 000€ !
Un peu plus loin, on trouve un second tracteur Lamborghini. L'ironie de l'histoire de Ferruccio, c'est que les tracteurs firent sa fortune... Et sa chute.
En 1971, son importateur Sud-africain annula au dernier moment une grosse commande. Quelques mois après, la Bolivie connaissait un coup d'état. Or, Lamborghini devait expédier des tracteurs là-bas. Nouvelle commande annulée. Les invendus s'accumulaient. Mais la région de Bologne est contrôlée par les communistes : Ferruccio s'était engagé auprès des syndicats à ne jamais licencier. Ruiné, il vendit ses tracteurs à SAME. Insuffisant pour éponger les dettes. En parallèle, les ventes de voitures chutèrent avec la crise du pétrole. Ferruccio du vendre des parts de Lamborghini Automobili, avant de se désengager complètement.
Un autre Porsche-diesel. Il était destiné aux plantations de café du Brésil. Les caféiers sont fragile et là, les branches pouvaient glisser sur la machine...
La Manufacture d'Armes de Paris produisait des fusils depuis la Commune. Elle s'est diversifiée dans les sous-ensembles pour l'aéronautique et les motos (ses moteurs propulsant nombre de cyclecars.) A la fin de la guerre, MAP tenta de se diversifier dans les tracteurs agricoles, mais c'était trop tard.
Simca importait des tracteurs Steyr et Fiat durant l'entre-deux guerre. En s'offrant MAP, il montait en compétence. La division prit le nom de Someca (Société de Mécanique [de la Seine].)
Lorsque Fiat vendit Simca à Chrysler, il se garda Unic et Someca. Fiat rêvait de vendre des camions et des tracteurs conçut en Italie, mais fabriqués en France. Ni les uns, ni les autres ne convainquirent. Unic fut fondu dans Iveco et Someca, dans Fiatagri.
Tracteurs et voitures de sport, troisième, avec ces David Brown !
David Brown avait eu l'idée de construire des tracteurs, en collaboration avec Henry Ferguson. Ce fut une diversification réussit pour l'entreprise familiale de mécanique (fondée par le grand-père de David Brown, également prénomé David Brown !)
Durant la guerre, David Brown fournit des tracteurs pour tirer les avions sur les aérodromes. Sa fortune faite, il s'offrit Lagonda, puis Aston Martin...
Le père d'Henry Ford avait quitté l'Irlande, fuyant la famine. Le futur constructeur grandit dans une ferme du Michigan.
Bien des années plus tard, dans les années 10, Henry Ford était l'homme le plus riche et le plus puissant des Etats-Unis. Sa motivation pour poursuivre n'était plus économique. Désormais, il allait changer le monde.
Avec sa Ford T, Henry Ford avait motorisé les petites classes moyennes. Son nouveau projet était d'équiper chaque fermier d'un tracteur. Le travail à la ferme serait moins pénible. Surtout, les fermiers pourraient produire davantage. Et moins cher. Il n'y aurait plus de famine. Henry Ford tint à ouvrir une usine à Cork, près du village d'origine de ses parents. Et lorsque la Chine connu une famine biblique, Ford voulu y implanter une usine de tracteurs !
Depuis le début du XIXe siècle, on tentait de mécaniser l'agriculture. De lourds moteurs à vapeur, montés sur roues (mais incapable de se mouvoir d'elle-même) entrainaient moissonneuses et batteuses, via une courroie. Il y en avait encore une en activité, dans les années 50 dans le petit village savoyard où ma mère passait ses vacances, étant enfant. En 1901, Daniel Albone lança l'Ivel, le premier véhicule agricole autopropulsé, produit en série. Mais il restait cher.
Dès 1905, Henry Ford se pencha sur les tracteurs agricoles. Néanmoins, son Fordson ne sortit qu'en 1917. Les fermiers Américains se jetèrent dessus. Henry Ford était "un des leurs". Dans les années 20, les autres fabricants réagirent. Le Farmall d'International Harvester ou la gamme d'Allis-Chalmers prirent Ford à son propre jeu. Les prix des tracteurs baissèrent. En 1928, Ford arrêta de produire des tracteurs aux USA (mais il reprit la production dix ans plus tard, via un accord avec Henry Ferguson.)
Les fermiers Américains s'endettèrent pour s'offrir ces tracteurs. En 1929, avec la crise, le rêve tourna au cauchemar. Les banques, au bord du gouffre, exigèrent le remboursement immédiat des emprunts. Les fermiers étaient incapable de rembourser. En prime, avec la surproduction agricole, les prix avaient chuté au-delà du point d'équilibre des fermiers. Et malgré tout, cela restait hors de prix pour les chômeurs. Bientôt, les fermes furent fermées en masse et il y eu un exode rural tout aussi massif. Parfois, les banques -elles-mêmes en crise, rappelons-le-, autorisaient les fermiers à garder leurs biens, pourvu qu'ils leur donne le moindre cent gagné.
Henry Ford rêvait d'aider les ruraux ; il avait au contraire précipité la destruction du monde rural.
Pour finir, un tracteur Citroën. En 1919, le modèle économique d'André Citroën, c'était Henry Ford. Et puisque Ford fabriquait des Fordson, Citroën allait lui aussi commercialiser des tracteurs agricoles !
Mais très vite, le patron eu d'autres chats à fouetter. Quelques années plus tard, il y revint avec un tracteur monté sur chenilles Kégresse. Enfin, au temps des Michelin, il y eu le Type J, un tracteur dérivé des Traction Avant 7cv.
Entre nous, ces tracteurs ont tout de même un intérêt restreint, si on fait abstraction de l'objet historique.
RépondreSupprimerLes voitures peuvent, même la plus ancienne, être utilisée selon leur raison d'être. Mais ces tracteurs ne sont pas prêt de retourner à la terre.
Repartir sur un Fiat/someca/etc des années 50, si ça ne s'accompagne pas de remorques à tirer, ce n'est pas un retour à l'expérience passée. Ce n'est pas comme monter dans une Ford T, faire un tour comme si on faisait un bon dans le passé.
Musées mis à part, qu'est-ce sinon un produit de placement ?