Rétromobile 2018 : 19. Trois Ferrari F1
Qu'on aime ou pas Ferrari, ce constructeur possède une place à part en F1. Quand je me suis intéressé à la discipline, j'ai vu successivement disparaitre Brabham, March et Lotus, Tyrrell et Ligier suivirent peu après. Quelques hommages, des double-page avec quelques photos en noir et blanc et c'est tout. Si demain, McLaren et Williams disparaissaient, il y aurait la même absence de réactions (NDLA : notons que mi-2006, le rachat de McLaren par Mercedes et la disparition du nom semblaient actés.) Mais dès que Ferrari menace de quitter la F1, cela fait les gros titres ! Les dirigeants de la Scuderia usent et abusent régulièrement de cette stratégie du "retenez-moi ou je fais un malheur."
Les plus jeunes n'ont pas connu cette longue traversée du désert. De Jody Scheckter (1979) à Michael Schumacher (2000), aucun pilote Ferrari n'avait décroché de titre. La Scuderia fut l'une des premières écuries à passer au turbo. La 126 fut donc compétitive. En 1982, la lutte entre Gilles Villeneuve et Didier Pironi connu une issue tragique, mais Ferrari fut champion constructeur. En 1983, Patrick Tambay et René Arnoux n'avaient pas l'étoffe d'un champion du monde. Néanmoins, c'était une paire beaucoup plus homogène que celle de Renault ou de Brabham. D'où un second titre.
En fin de saison, Williams, McLaren et Lotus sont passés au turbo. Ferrari perdit son avantage et ce fut la dégringolade. La faute aussi à des recrutements hasardeux, comme Stefan Johansson et au renvoi du jour au lendemain d'Arnoux. Les Rosso assistèrent en spectateur à la domination des McLaren-Honda, puis au duel McLaren-Williams et Williams-Benetton.
Plus Ferrari reculait dans la hiérarchie et plus les grands pilotes voulaient en être. Ils voulaient être "l'homme qui redressa la Scuderia Ferrari". C'était encore mieux que de décrocher un titre avec une voiture invincible. Nigel Mansell n'y arriva pas. Alain Prost sortait d'une cohabitation houleuse chez McLaren. Après 10 ans de F1 et trois titres, il cherchait un nouveau défi. En 1990, il frôla le titre. Bien sûr, à Estoril, si Mansell ne l'avait pas tassé au départ et si, à Suzuka, Ayrton Senna ne l'avait pas proprement sorti... Néanmoins, soyons pragmatique. Prost n'avait décroché aucune pole. Mansell en obtint trois. Et McLaren ? Douze (deux pour Berger et dix pour Senna, le roi des qualifications.) En prime, Mansell marqua à peine la moitié des points de son équipier. Bref, c'était malgré tout un demi-succès.
1991 fut un naufrage. Cesare Fiorio était parti et l'écurie n'avait plus vraiment de chef. Pour la première fois depuis 1980, Prost ne remporta aucune course. Ferrari termina 3e du championnat, avec moins de la moitié des points du 2e, Williams. Prost claqua la porte.
En France, on cherchait activement "le futur Prost". La pression était forte. Yannick Dalmas, Olivier Grouillard, Eric Bernard ou Erik Comas ont explosé en plein vol. Jean Alesi, lui, fut le seul à garder la tête froide. A l'été 1990, Ken Tyrrell tentait désespérément de le garder. Williams lui aurait soumis un pré-contrat. Mais "Jeannot" préféra Ferrari... Lui, le fils d'immigré Italiens. Lui qui avait piloté la F40 GTE en IMSA, il ne rêvait que de rouge. Cette histoire très romantique n'est pas forcément vraie, mais elle lui attira indubitablement de la sympathie.
Prost parti, Alesi se retrouva leader de la Scuderia, en 1992, aux côtés d'un Ivan Capelli transparent. Ce fut la seconde saison sans victoire et l'équipe glissa au 4e rang du championnat constructeur.
Gerhard Berger, déjà pilote Ferrari en 1987-1988, signa un contrat pour 1993. "Rouge et blanc" lui garantissait un salaire confortable. Mais il faut se souvenir qu'après le retrait de Honda, McLaren n'avait ni moteur, ni pilotes (Senna disant tout et son contraire) pour la saison prochaine ! Peut-être que Berger avait tout simplement choisi la sécurité... Alesi et Berger durent se contenter d'un podium chacun. Dix ans après le dernier titre constructeur, l'équipe devait se battre pour le top 5 final face à Ligier et Sauber !
Au même moment, chez Peugeot-Talbot Sport, Jean Todt était furieux. Le projet "F1" ne portait plus que sur une fourniture de moteurs. Alors qu'il considérait que Peugeot devait représenter un ensemble et que la 905 avait déjà quasiment un châssis de F1. Bernie Ecclestone l'aurait alors aiguillé vers Ferrari.
L'ère Todt ne débuta vraiment qu'en 1994. Alesi décrocha sa première pole en F1. Berger remporta le Grand Prix d'Allemagne ; le premier succès de Ferrari après trois saisons de disette. L'Autrichien termina la saison au 3e rang, derrière Michael Schumacher et Damon Hill. L'écurie termina également 3e du classement constructeur, profitant d'un McLaren en plein désarroi.
Pour 1995, Todt rembaucha les mêmes pilotes. Le destin nous a privé de voir Senna chez Ferrari. Thierry Boutsen (pourtant retraité depuis 1993) était sur les rangs pour être son équipier ! A l'heure où une nouvelle génération débarquait, Ferrari misait sur deux trentenaires ! Berger se voyait déjà champion 1995. Il faisait parti du top 5 de la fin des années 80, avec Prost, Senna, Mansell et Nelson Piquet. Désormais, il n'y avait plus que lui sur la grille. Il pensait que Benetton mettrait du temps à s'habituer au moteur Renault et que David Coulthard allait mettre des bâtons dans les roues à Hill. Donc, mathématiquement, Berger était favori ! En pratique, les duo fut assez brouillons. Berger cala lors de l'arrêt aux stands d'un Grand Prix de Saint Marin qu'il devait gagner et Alesi ne parvint pas à récidiver sa victoire Canadienne. Le Français n'arriva même pas à contenir Coulthard et Johnny Herbert dans la course à la 3e place du championnat... Signalons que ce fut la dernière saison du V12.
Jacques Villeneuve déposa son CV, de manière ostentatoire. Mais à l'été, coup de théâtre : Schumacher signait chez Ferrari. Dans la foulée, Benetton recrutait Alesi, puis Berger. On attendait Rubens Barrichello, mais ce fut Eddie Irvine qui décrocha le second baquet de Ferrari. Eddie Jordan considéra que c'était une trahison et il embaucha sur-le-champ Martin Brundle (sans consulter Peugeot...) Ce fut un drôle d'automne.
Cette Ferrari, j'ai une tendresse particulière pour elle, car j'ai posé avec ! C'était en 1996, au salon Auto-moto compétition du Bourget. "Rouge et blanc" avait un stand. Comme la cigarette, c'est mal, seuls les majeurs avaient droit à un polaroïd aux côtés de la McLaren-Peugeot ou de la Ferrari. "Vous avez 18 ans ? - Euh, oui." Donc, j'ai posé avec la Ferrari de Berger. Moi, j'aimais mieux les Benetton, mais il n'y en avait pas, alors par défaut...
Les plus jeunes n'ont pas connu cette longue traversée du désert. De Jody Scheckter (1979) à Michael Schumacher (2000), aucun pilote Ferrari n'avait décroché de titre. La Scuderia fut l'une des premières écuries à passer au turbo. La 126 fut donc compétitive. En 1982, la lutte entre Gilles Villeneuve et Didier Pironi connu une issue tragique, mais Ferrari fut champion constructeur. En 1983, Patrick Tambay et René Arnoux n'avaient pas l'étoffe d'un champion du monde. Néanmoins, c'était une paire beaucoup plus homogène que celle de Renault ou de Brabham. D'où un second titre.
En fin de saison, Williams, McLaren et Lotus sont passés au turbo. Ferrari perdit son avantage et ce fut la dégringolade. La faute aussi à des recrutements hasardeux, comme Stefan Johansson et au renvoi du jour au lendemain d'Arnoux. Les Rosso assistèrent en spectateur à la domination des McLaren-Honda, puis au duel McLaren-Williams et Williams-Benetton.
Plus Ferrari reculait dans la hiérarchie et plus les grands pilotes voulaient en être. Ils voulaient être "l'homme qui redressa la Scuderia Ferrari". C'était encore mieux que de décrocher un titre avec une voiture invincible. Nigel Mansell n'y arriva pas. Alain Prost sortait d'une cohabitation houleuse chez McLaren. Après 10 ans de F1 et trois titres, il cherchait un nouveau défi. En 1990, il frôla le titre. Bien sûr, à Estoril, si Mansell ne l'avait pas tassé au départ et si, à Suzuka, Ayrton Senna ne l'avait pas proprement sorti... Néanmoins, soyons pragmatique. Prost n'avait décroché aucune pole. Mansell en obtint trois. Et McLaren ? Douze (deux pour Berger et dix pour Senna, le roi des qualifications.) En prime, Mansell marqua à peine la moitié des points de son équipier. Bref, c'était malgré tout un demi-succès.
1991 fut un naufrage. Cesare Fiorio était parti et l'écurie n'avait plus vraiment de chef. Pour la première fois depuis 1980, Prost ne remporta aucune course. Ferrari termina 3e du championnat, avec moins de la moitié des points du 2e, Williams. Prost claqua la porte.
En France, on cherchait activement "le futur Prost". La pression était forte. Yannick Dalmas, Olivier Grouillard, Eric Bernard ou Erik Comas ont explosé en plein vol. Jean Alesi, lui, fut le seul à garder la tête froide. A l'été 1990, Ken Tyrrell tentait désespérément de le garder. Williams lui aurait soumis un pré-contrat. Mais "Jeannot" préféra Ferrari... Lui, le fils d'immigré Italiens. Lui qui avait piloté la F40 GTE en IMSA, il ne rêvait que de rouge. Cette histoire très romantique n'est pas forcément vraie, mais elle lui attira indubitablement de la sympathie.
Prost parti, Alesi se retrouva leader de la Scuderia, en 1992, aux côtés d'un Ivan Capelli transparent. Ce fut la seconde saison sans victoire et l'équipe glissa au 4e rang du championnat constructeur.
Gerhard Berger, déjà pilote Ferrari en 1987-1988, signa un contrat pour 1993. "Rouge et blanc" lui garantissait un salaire confortable. Mais il faut se souvenir qu'après le retrait de Honda, McLaren n'avait ni moteur, ni pilotes (Senna disant tout et son contraire) pour la saison prochaine ! Peut-être que Berger avait tout simplement choisi la sécurité... Alesi et Berger durent se contenter d'un podium chacun. Dix ans après le dernier titre constructeur, l'équipe devait se battre pour le top 5 final face à Ligier et Sauber !
Au même moment, chez Peugeot-Talbot Sport, Jean Todt était furieux. Le projet "F1" ne portait plus que sur une fourniture de moteurs. Alors qu'il considérait que Peugeot devait représenter un ensemble et que la 905 avait déjà quasiment un châssis de F1. Bernie Ecclestone l'aurait alors aiguillé vers Ferrari.
L'ère Todt ne débuta vraiment qu'en 1994. Alesi décrocha sa première pole en F1. Berger remporta le Grand Prix d'Allemagne ; le premier succès de Ferrari après trois saisons de disette. L'Autrichien termina la saison au 3e rang, derrière Michael Schumacher et Damon Hill. L'écurie termina également 3e du classement constructeur, profitant d'un McLaren en plein désarroi.
Pour 1995, Todt rembaucha les mêmes pilotes. Le destin nous a privé de voir Senna chez Ferrari. Thierry Boutsen (pourtant retraité depuis 1993) était sur les rangs pour être son équipier ! A l'heure où une nouvelle génération débarquait, Ferrari misait sur deux trentenaires ! Berger se voyait déjà champion 1995. Il faisait parti du top 5 de la fin des années 80, avec Prost, Senna, Mansell et Nelson Piquet. Désormais, il n'y avait plus que lui sur la grille. Il pensait que Benetton mettrait du temps à s'habituer au moteur Renault et que David Coulthard allait mettre des bâtons dans les roues à Hill. Donc, mathématiquement, Berger était favori ! En pratique, les duo fut assez brouillons. Berger cala lors de l'arrêt aux stands d'un Grand Prix de Saint Marin qu'il devait gagner et Alesi ne parvint pas à récidiver sa victoire Canadienne. Le Français n'arriva même pas à contenir Coulthard et Johnny Herbert dans la course à la 3e place du championnat... Signalons que ce fut la dernière saison du V12.
Jacques Villeneuve déposa son CV, de manière ostentatoire. Mais à l'été, coup de théâtre : Schumacher signait chez Ferrari. Dans la foulée, Benetton recrutait Alesi, puis Berger. On attendait Rubens Barrichello, mais ce fut Eddie Irvine qui décrocha le second baquet de Ferrari. Eddie Jordan considéra que c'était une trahison et il embaucha sur-le-champ Martin Brundle (sans consulter Peugeot...) Ce fut un drôle d'automne.
Cette Ferrari, j'ai une tendresse particulière pour elle, car j'ai posé avec ! C'était en 1996, au salon Auto-moto compétition du Bourget. "Rouge et blanc" avait un stand. Comme la cigarette, c'est mal, seuls les majeurs avaient droit à un polaroïd aux côtés de la McLaren-Peugeot ou de la Ferrari. "Vous avez 18 ans ? - Euh, oui." Donc, j'ai posé avec la Ferrari de Berger. Moi, j'aimais mieux les Benetton, mais il n'y en avait pas, alors par défaut...
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